De la Pologne au Qatar au nom de l'amour

Interviews d'expatriés
  • expatriee au Qatar
Publié le 2021-07-23 à 10:00 par Veedushi
Joanna est originaire de la Pologne. Même si elle est une passionnée de voyages, c'est l'amour qui l'a conduit au Qatar. En effet, son conjoint, qui est d'origine tunisienne, y avait déjà un emploi. Joanna revient sur son parcours et nous parle de ce changement de vie au Qatar.

Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre parcours ?

Je m'appelle Joanna et je suis née et j'ai grandi à Gdansk, en Pologne. Quand j'étais plus jeune, je ne me suis jamais imaginé expatriée un jour. Dans mon entourage, je ne connaissais personne qui avait déménagé à l'étranger et je n'avais jamais envisagé cela pour moi-même. J'adorais voyager, certes, mais j'avais d'autres projets : celui d'avoir une brillante carrière dans le domaine du droit, travaillant pour le compte de l'un des plus grands cabinets d'avocats de la Pologne. Avec des parents pratiquant le droit, c'était le cheminement de carrière le plus logique et le plus souhaité pour moi. Du moins, c'est ce que je pensais.

Qu'est-ce qui vous a amené au Qatar ? Depuis combien de temps y vivez-vous ?

Le plus grand tournant de ma vie a été ma rencontre avec Khaled qui est aujourd'hui mon époux. C'était en 2009, et à cette époque, il était déjà basé à Doha, au Qatar. Nous nous sommes mariés en 2012, puis nous avons été confrontés à un dilemme. Khaled est Tunisien et il lui est assez difficile d'obtenir un visa de résident pour la Pologne. C'était certainement beaucoup plus difficile que pour moi de voyager au Qatar. D'autre part, je travaillais comme assistante d'un juge dans un tribunal de district : un poste pas suffisamment rémunéré pour que je puisse subvenir aux besoins de mon mari jusqu'à ce qu'il obtienne tous ses papiers et un permis de travail. Le choix le plus logique était donc pour moi de déménager au Qatar. Ce que j'ai fait en juin 2012.

Avez-vous eu des difficultés à vous adapter au Qatar ? Quels ont été les principaux défis et comment les avez-vous surmontés ?

Quand je suis arrivé au Qatar, je savais que ma vie serait bien plus différente qu'en Pologne. Les Polonais ont d'innombrables idées reçues sur les pays du Moyen-Orient. À ma grande surprise, il s'est avéré que la vie au Qatar ressemble beaucoup plus à la vie en Europe, chose que je n'aurais jamais imaginée. Mais, bien sûr, j'ai aussi été confronté à un certain nombre de défis.

Le principal défi pour moi était (et est toujours !) le climat. En Pologne, j'avais l'habitude de profiter du plein air. Au Qatar, pendant les mois d'été, il est presque impossible de rester dehors, sauf très tard la nuit. Pendant ma première année à Doha, j'étais une sorte de folle qui osait sortir par une chaleur de plus de 40 degrés alors que tout le monde restait à l'intérieur. La plupart du temps, j'entraînais mon pauvre mari avec moi, vexée de sa résistance. Je me rappelle encore comment je marchais vers un supermarché en août, et une charmante Qatarienne qui passait en voiture s'est arrêtée à ma hauteur pour me demander si ma voiture était en panne et si j'avais besoin d'aide ! Malheureusement, la seule façon pour moi de surmonter ce défi était de changer mon mode de vie pour qu'il corresponde aux conditions météorologiques locales.

Le deuxième grand défi était la conduite ! J'étais absolument terrifiée à l'idée de conduire au Qatar. Les routes étaient (et sont toujours) envahies de conducteurs imprudents qui ne respectent pas les règles de la circulation, volontairement ou par ignorance. J'ai surmonté cette peur grâce à mon mari qui, à un moment donné, n'avait plus de patience avec moi (pendant des mois, je n'ai fait que répéter que j'allais reprendre le volant « éventuellement »). Un beau jour, il s'est simplement arrêté au bord de la route, est sorti de la voiture et m'a demandé de prendre le volant. J'étais trop surpris pour protester, alors j'ai suivi ses instructions. C'est à ce moment-là que j'ai réalisé que ce n'était pas si mal après tout. Depuis, je conduis.

Il ne s'agit pas de votre premier séjour à l'étranger. Parlez-nous donc de vos voyages.

J'ai attrapé la bougeotte en 2006 lorsque j'ai pris l'avion pour la toute première fois pour l'Égypte. Comme j'étais étudiant à l'époque, j'avais du temps libre pour cultiver ma nouvelle passion. Avant de rencontrer Khaled, j'ai visité plein d'endroits. J'ai fait un voyage de 3 semaines au Maroc avec une amie, ce qui a été une expérience formidable car le « Couchsurfing » nous a permis de rencontrer beaucoup de gens extraordinaires. J'ai également voyagé dans les montagnes de Fagaras en Roumanie, où j'ai passé deux semaines loin de la civilisation, à faire des randonnées, à boire dans les ruisseaux de montagne et à partager une tente avec des insectes et des araignées. J'ai spontanément sauté dans un bus pour un voyage de 35 heures pour rendre visite à un ami en France. J'ai pris un train pour passer quelques jours à Budapest, hébergée par une fille que j'ai rencontrée en ligne (nous sommes toujours amies !). La liste est longue.

S'installer au Qatar a été une opportunité parfaite pour explorer d'autres parties du monde qui sont soudainement devenues plus proches que jamais. En famille, nous avons visité de nombreux endroits incroyables, mais nos meilleurs souvenirs sont liés à des voyages aux Seychelles et à Zanzibar.

Comment adaptez-vous votre passion pour le voyage à votre vie de maman ?

Je fais de mon mieux, mais j'avoue que ce n'est pas toujours facile ! Une fois qu'on a des enfants, on change automatiquement d'attitude envers les voyages. Ce n'est plus aussi simple de faire une valise et de partir spontanément pendant une semaine ou deux (c'est ce que j'aimais faire dans le passé). Chaque voyage doit être soigneusement planifié et il faut apprendre à anticiper et à surmonter de nombreux défis supplémentaires. N'oublions pas non plus à quel point les voyages coûtent cher ! Cela dit, voyager avec des enfants est aussi une source de plaisir immense. Il n'y a pas de sentiment meilleur que celui de pouvoir montrer à ses enfants à quoi le monde ressemble. Et les voir attraper la bougeotte à leur tour est une expérience qui n'a pas de prix !

À quoi ressemble la vie d'une maman expatriée au Qatar ?

Le Qatar est un pays très accueillant, avec beaucoup de choses à faire avec les enfants, allant des parcs et terrains de jeux aux ateliers et bibliothèques. Et la plupart sont gratuits ou très abordables. J'ai aussi constaté que les mamans expatriées au Qatar sont beaucoup plus sociables qu'en Pologne. C'est assez facile ici de se faire des amis. Ce qui est aussi important, contrairement à ce qu'on a tendance à croire, c'est que les femmes au Qatar sont encouragées à travailler même après avoir fondé une famille. Il est tout à fait concevable de voir des mamans avec une carrière brillante ici. Le seul inconvénient que j'ai constaté, à ce stade, est la courte durée du congé de maternité. Selon la loi du travail au Qatar, les femmes ne bénéficient que de 50 jours calendaires de congé maternité au terme d'une année de service. Bien sûr, il peut arriver que l'employeur décide d'accorder plus de jours, mais c'est assez rare.

La pandémie de COVID-19 a-t-elle eu un impact sur votre vie et vos projets de voyage ?

Oui, un impact majeur ! Mais pas tout à fait comme je l'espérais. Au pic de la pandémie, nous sommes restés à la maison comme tout le monde, sans même envisager de voyager. C'était d'abord pour notre propre sécurité, mais aussi parce que si nous avions quitté le Qatar, nous n'aurions pas pu rentrer. Le Qatar avait introduit une politique d'entrée très stricte, interdisant à tout le monde sauf aux citoyens d'entrer dans le pays. Cette interdiction n'a été levée que très récemment. Nous sommes également devenus les parents de notre troisième fils, que nous nous amusons à appeler « Bébé Covid ». En raison de la lenteur bureaucratique depuis le début de la pandémie, bébé Alex a maintenant sept mois et nous n'avons toujours pas reçu son passeport ! C'est actuellement le plus gros obstacle à nos projets de voyage.

Quelle est la situation actuelle au Qatar ? Comment les autorités ont-elles réagi face à la pandémie ?

La première vague de la pandémie a durement frappé le Qatar. Pendant plusieurs mois, nous avons été en tête de liste des pays avec le plus grand nombre de cas de Covid-19 pour 1 million d'habitants. Mais le gouvernement a réagi rapidement et a imposé de nombreuses restrictions : fermeture des frontières, rendu obligatoire du port du masque (même à l'extérieur), restriction des rassemblements, entre autres. Nous avons eu droit à une petite pause lorsque le nombre de cas a baissé, mais ensuite, en mars 2021, nous avons été touchés par la deuxième vague. Heureusement, entre-temps, le Qatar avait lancé un programme de vaccination intensif pour ses citoyens et résidents. Ce qui a permis au gouvernement de déclarer officiellement qu'il ne s'attend pas à une nouvelle vague à l'avenir. Ce serait une très bonne chose puisque le Qatar a prévu d'accueillir la Coupe du monde de football en 2022 !

Qu'est-ce qui vous manque de votre pays d'origine ?

Deux choses : la nourriture et les hivers principalement !

Ne vous méprenez pas, le Qatar est un endroit incroyable où vivre pour les amateurs de bonne cuisine. Il y a tant de nationalités qui vivent ici, chacun présentant sa propre cuisine à la scène culinaire du pays. Mais certains aliments de base et plats polonais me manquent. Il me manque aussi de pouvoir acheter de l'alcool dans un supermarché. Si vous avez envie d'un verre de vin au Qatar, vous avez deux options : soit réserver une table dans l'un des restaurants les plus chers d'un hôtel de luxe, soit vous rendre au seul magasin de tout le pays qui vend de l'alcool (et du porc). Mais pour y faire des achats, vous devez d'abord obtenir un permis.

La deuxième chose est le climat. Les hivers au Qatar sont incroyables, mais ils ressemblent à l'été dans mon pays d'origine. On a droit à un beau temps ensoleillé en général, avec des températures tournant autour de 25 °C. Ce qui me manque en fait, ce sont les hivers blancs magnifiques, lorsque la température chute en dessous de zéro, et qu'on peut se blottir sur un canapé avec une tasse de chocolat chaud et regarder la neige tomber à l'extérieur.

Si vous pouviez tout recommencer à zéro, y a-t-il quelque chose que vous feriez différemment ?

Oui ! L'un de mes plus grands regrets est de ne pas avoir commencé à apprendre la langue (dialecte local de l'arabe) immédiatement après mon installation ici ! Je suis devenue paresseuse comme presque tout le monde ici parle très bien anglais. Mais si j'avais commencé dès mon arrivée, j'aurais pu parler couramment la langue aujourd'hui. J'arrive à comprendre et à la parler un peu, mais certainement pas assez pour une communication efficace !

Avez-vous des conseils à donner à tous ceux qui souhaiteraient s'installer au Qatar pendant ou après la pandémie ?

Mon principal conseil serait d'attendre que la situation se stabilise (sauf si vous avez déjà décroché un emploi !). Le Qatar a encore de nombreuses restrictions en place, qui affectent la qualité de nos vies. En fait, la plupart de mes amis ont quitté le Qatar pour l'été pour attendre ailleurs que la situation évolue.

Pour ceux qui viendraient après la pandémie : je vous conseillerais certainement de visiter le Qatar en tant que touriste au moins une fois avant de vous installer ici. Le Qatar est certes un endroit merveilleux où vivre, mais le mode de vie ici est très spécifique et n'est pas au goût de tout le monde.

Où vous voyez-vous dans les dix prochaines années ?

Au Portugal ! Il est vrai que j'aime énormément le Qatar, mais je ne pense pas que ce soit un endroit où j'aimerais prendre ma retraite. Nous avons eu l'occasion de visiter le Portugal lors de l'un de nos voyages en famille et nous en sommes tombés amoureux. Nous avons donc pour projet d'acheter une petite maison quelque part dans la campagne portugaise et de nous y installer en famille. Cela dit, je suis sûre que je reviendrai encore au Qatar de temps en temps !

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