Entre l'allégement des restrictions sanitaires et les nouveaux pics de Covid : comment les pays s'en sortent

Vie pratique
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Publié le 2022-04-13 à 10:00 par Asaël Häzaq
« Il faut bien vivre avec ! » Les populations semblent s'être habituées à la vie avec la Covid, et aspirent à un retour à « la vie normale ». Mais dès que les masques tombent, les contaminations repartent à la hausse. Les causes sont vite trouvées : allégement des gestes barrières, vaccination et rappels pas toujours suivis, insouciance d'une population pressée de s'en retourner à la vie d'avant… Une vie qui n'existe plus, alertent certains experts. Quelles solutions envisager ? Celles des comités scientifiques ne provoquent pas l'enthousiasme. Mais localement, masques et restrictions refont leur apparition.

Les pays qui allègent totalement leurs restrictions ou presque

En Europe, nombre d'États ont supprimé tout ou presque des restrictions Covid. L'Islande et Norvège ont enclenché le « retour à la vie normale » entre fin février et la mi-mars, faisant le pari de l'immunité collective. La stratégie est pourtant toujours décriée. Mais en Islande, après un pic épidémique à près de 3000 cas par jour en début mars, le nombre de contaminations baisse à 177 cas en moyenne par jour. Même évolution pour la Norvège, qui a connu une poussée plus précoce (fin janvier mi-février, avec près de 20 000 cas quotidiens), pour une décrue qui se confirme : à peine 1050 cas positifs en moyenne la semaine dernière. Le Danemark et les Pays-Bas observent les mêmes tendances. L'allègement des restrictions est-il donc sans risque ? Pas si sûr. Au Royaume-Uni ou en France, les contaminations sont toujours à un niveau élevé. 

Royaume-Uni 

Étrange coïncidence. Le 1er avril dernier, les autorités britanniques appliquent un nouveau point de leur plan « Living with Covid ». Les tests ne sont désormais plus gratuits. Depuis fin janvier, l'État supprime tour à tour ses restrictions : port du masque en extérieur et dans les lieux recevant du public, accès à l'île aux vaccinés et non-vaccinés… Boris Johnson incarne cette frange de la population pressée d'en finir avec les mesures Covid. Il semble surtout prêt à tout pour faire oublier le scandale Downing Street. Mais le 1er avril est aussi le jour où le Royaume-Uni bat de nouveaux records de contaminations, avec plus de 100 000 nouveaux cas. Pour les experts, le sous-variant d'Omicron, BA.2, serait responsable de ce rebond. Si le pic est passé (actuellement, environ 60 000 cas par jour), l'OMS estime que le Royaume-Uni a levé les restrictions « trop brutalement ». Mais le gouvernement reste sur sa ligne et décide, vendredi dernier, d'alléger son dispositif en matière de surveillance virale. Quitte à passer à côté de nouveaux variants ? C'est le scénario catastrophe que veut à tout prix éviter l'OMS.

France

En France, la brise fraîche arrive le 14 mars. Coup électoral ? Les résultats du premier tour de l'élection présidentielle éclipsent l'actualité Covid. Mais depuis la fin du passe vaccinal et la suppression du port du masque obligatoire dans les lieux accueillant du public (sauf dans les transports, les hôpitaux et les EHPAD), le chiffre des contaminations remonte en flèche. Jusqu'à 148 798 nouveaux cas vendredi dernier. Des chiffres qui inquiètent. Selon un sondage YouGov réalisé pour le Huffington Post, 58% des Français jugent que les restrictions ont été levées trop tôt. Même inquiétude dans les hôpitaux, non saturés, mais dont le personnel accuse de plus en plus de cas d'épuisement professionnel. Les contaminations, elles, restent à un niveau haut : plus de 130 000 cas quotidiens en moyenne, la semaine dernière. 

Vers un allégement progressif des restrictions

États-Unis, Italie, Japon… Ces pays optent plutôt pour un allégement progressif des restrictions. Rassemblé jeudi dernier, le conseil des ministres italien a validé le calendrier du « retour à la normale », avec la fin du passe sanitaire dès le 1er avril, malgré des contaminations qui restent élevées (plus de 60 000 cas par jour). Le port du masque est toujours obligatoire dans les lieux publics. D'autres États, comme le Japon, se montrent plus prudents encore.

Avec près de 50 000 cas en moyenne par jour, le vent d'inquiétude continue de souffler sur le Japon. Les contaminations restent tout de même inférieures aux quelque 100 000 cas quotidiens observés début février. Le Japon a très légèrement desserré la bride, notamment en milieu scolaire. Les fermetures de classes ont eu des effets catastrophiques sur la santé physique et mentale des écoliers. Le gouvernement réduit les fermetures d'une semaine à 5 jours en cas de plusieurs confirmations de Covid. Légère bouffée d'air aussi pour les étudiants étrangers. Depuis mars, le Japon ouvre quotidiennement ses portes à 5000 d'entre eux. Le pays reste cependant très strict. Les Pvtises sont de retour depuis le 1er mars, mais doivent être sponsorisés par une entreprise ou une école. Mission quasi-impossible – le contexte actuel favorisant peu les embauches – et budget considérablement alourdi, une école de langue coûtant en moyenne 6000 euros par an. Mais le Japon prévient : seuls les candidats détenteurs du « Uketsuke zumisho » (Certificate for Complexion of Registration to the ERFS system ; le certificat de sponsoring) seront acceptés sur le territoire. Et tant pis pour ceux qui dépassent la limite d'âge (30 ans) ; aucune dérogation ne leur sera accordée. Ce certificat rappelle fortement celui imposé fin 2020, lorsque le Japon a tenté une timide ouverture. Les experts dénoncent des traitements injustes imposés aux étudiants étrangers, et regrettent que leur pays ne s'oriente pas davantage vers une politique d'ouverture et de gestion des frontières eu égard au contexte Covid. Les touristes, eux, restent toujours interdits de séjour.

Alléger les restrictions pour sauver le tourisme

D'autres pays, comme le Maroc, l'Australie ou la Thaïlande, rouvrent progressivement leurs frontières pour les touristes vaccinés. Après avoir rouvert ses frontières aériennes, le Maroc rouvre, le 7 avril dernier, ses liaisons maritimes avec l'Espagne. Une décision capitale pour le Maroc, qui doit à tout prix relancer son secteur touristique. Côté vie quotidienne, le couvre-feu et la limitation des déplacements ont été supprimés, mais le port du masque reste généralisé. Confrontée aux mêmes défis concernant le tourisme, la Thaïlande veut aller plus loin, en proposant la suppression de toutes les restrictions aux voyageurs vaccinés ou non, d'ici juin. Le pays est sur un plateau que le gouvernement juge maîtrisable, avec un peu plus de 20 000 cas Covid par jour, en moyenne. 

Conclusion

Allégement des restrictions : a-t-on fait tomber le masque trop tôt ? Scientifiques et médecins restent divisés – les situations sont très variables d'un pays à l'autre. Aux États-Unis, le masque est devenu un signe de ralliement : les démocrates le plébiscitent. Les républicains le rejettent. La population fait avec. Même dans les États à forte poussée Covid, les masques tombent. Les démocrates osent davantage le « il faut vivre avec ». La baisse du nombre de contaminations (moins de 30 000 cas quotidiens aujourd'hui) encourage le mouvement. Très médiatisée, la vaccination obligatoire en Autriche est suspendue depuis le 9 mars. Le nombre de contaminations (plus de 30 000 en début mars, environ 15 000 actuellement) ne justifie plus, selon le gouvernement, une telle mesure. Hong Kong, confronté à une nouvelle vague en mars dernier, réfléchit à autoriser de nouveau les vols en partance de certains États. La France s'aligne sur Israël et ouvre la 2e dose de rappel aux plus de 60 ans, sans provoquer de ruée vers les centres de vaccination. Seule la Chine s'accroche toujours à sa stratégie « zéro Covid » malgré l'envolée des cas depuis le début du mois. Fermeture d'usines, confinements à répétition, tests… au grand dam de la population.