Retour d'expatriation : ce qui change pour les expats français

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Publié le 2021-11-02 à 11:00 par Asaël Häzaq
Les expatriés fraîchement rentrés sur le territoire affrontent une actualité des plus tendues. Entre les manifestations des antivax et anti passe sanitaire (elles continuent tous les samedis, malgré une baisse des participants), les hausses du prix de l'essence, du gaz, de l'électricité, de la taxe foncière... tout cela sur fond d'inflation. À quoi doivent s'attendre les expatriés français ?

Les expatriés français partageront-ils le sentiment de leurs compatriotes ? Pour ces derniers, le pouvoir d'achat est en berne. Tout coûte de plus en plus cher, et la Covid-19 n'a rien arrangé, au contraire. L'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) modère. Le pouvoir d'achat des ménages a progressé : +0,4% en 2020, et +1,8 cette année. Le gouvernement s'en félicite, et conclut : « 50 milliards d'euros d'impôts sont restés entre les mains des Français depuis le début du quinquennat ». Ces données macroéconomiques cachent cependant de fortes disparités. Si les ménages à faibles ressources bénéficient des dernières mesures gouvernementales - notamment, le chèque énergie de 100€ pour compenser la hausse des prix des carburants pour toute personne touchant moins de 2 000€ net/mois - ils sont aussi les plus impactés par sa politique. L'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) note même que la politique fiscale menée depuis 2017 aurait fait baisser le niveau de vie des ménages les plus modestes. 

Hausse des tarifs du carburant, du gaz et de l'électricité

« Tout augmente » résument les Français échaudés par un quotidien de plus en plus difficile. Brutal retour à la réalité française pour l'expatrié. Même si la Covid-19 frappe le monde entier, les États et populations adoptent des réactions différentes. En France, la grogne monte et les manifestations se multiplient. Première source de crispation : le prix du carburant. En octobre 2018, il s'élève à 1,57€ (sans plomb 95) et 1,53€ (gazole). C'est à cette période que commence le mouvement des Gilets jaunes. Les prix plongent lors du premier confinement (1,23 et 1,15€), avant de repartir à la hausse. Ils s'élèvent désormais à 1,65 et 1,55€, soit un niveau supérieur à celui du début de la crise des Gilets jaunes. Les manifestants retrouvent d'ailleurs leurs ronds-points, prêts à une nouvelle protestation. C'est justement ce que souhaite éviter le gouvernement. Le chèque énergie est censé calmer les tensions. Cela suffira-t-il ? Car le carburant n'est pas la seule hausse pointée du doigt. Le prix du gaz a bondi de près de 14%, soit 500€ supplémentaires pour un foyer se chauffant au gaz naturel. La hausse frappe aussi le secteur de l'électricité. Les confinements successifs ont plombé les revenus des ménages. Ainsi, la facture d'électricité pour un foyer moyen est passée de 1 502€ en février 2020 à 1 551€ en février 2021. Au vu des chiffres, le gouvernement a décidé, en plus du chèque énergie, de geler les tarifs réglementés du gaz et de limiter ceux de l'électricité à 4% en 2022. 

Flambée de la taxe foncière 

En 2019, 7 Français sur 10 rêvent d'accéder à la propriété. Devenir propriétaire est encore un marqueur social, le rêve d'une vie. Un rêve qui coûte de plus en plus cher, pour les 58% de Français propriétaires de leur logement (chiffre 2020). La taxe foncière enregistre une nouvelle augmentation, soit près de 28% en dix ans. C'est trois fois plus que l'inflation. Selon l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI), « la taxe foncière a augmenté de plus de 30 % dans douze grandes villes sur cinquante (entre 2010 et 2020) ». Nantes enregistre la plus forte hausse, avec +37,5%. Viennent ensuite Villeurbanne (+ 36,81 %) et Clermont-Ferrand (+ 36,02 %). À Paris, la hausse s'élève à 17,98%. Est-ce l'un des contrecoups de la suppression de la taxe d'habitation ? Interrogé par le journal le Parisien, Christophe Demerson, président de l'UNPI, tire la sonnette d'alarme : « Aujourd'hui, le coût moyen de l'impôt foncier est de 2,3 mois de loyer. Ça devient compliqué d'être propriétaire ». D'autant plus compliqué car cette flambée ne semble pas prête de s'arrêter.

Revalorisation salariale : les gagnants et les perdants

Au 1e octobre, le Smic a augmenté d'environ 35€ brut, soit 10,48€ brut/h pour 1 589,47€ (brut mensuel). Raison de cette hausse automatique : l'inflation. En août dernier, l'INSEE calcule une inflation d'1,9%. C'est 2,2% pour les 20% de ménages les plus modestes. Pour l'économiste Xavier Jaravel, c'est plutôt le double. Pour lui, « ces indicateurs cachent de grandes disparités ». Et les Français de témoigner : 75% d'entre eux estiment que leur pouvoir d'achat diminue (sondage Odoxa-Groupama réalisée pour France Bleu). Les hausses successives (gaz, électricité, carburant, taxe foncière...) semblent confirmer ce sentiment. La solution serait-elle d'augmenter les salaires ?

Côté salariés, on plaide naturellement pour une hausse des salaires. Ils ont accepté deux années blanches - Covid-19 oblige. Ils ont supporté des contraintes nouvelles, fait face aux pénuries, y compris les pénuries de main-d'œuvre, accumulé des heures de travail, subit les contrecoups du télétravail (hausse de la facture de chauffage et d'électricité, problèmes de santé dus à l'utilisation d'un matériel inadapté...). Mais côté entreprises, ça coince. Les grands groupes ont su résister à la crise, voire, à augmenter leurs bénéfices, mais n'envisagent pas pour autant une revalorisation des salaires. Les grèves se multiplient dans le secteur privé comme dans le public. Pour les PME, la situation est encore plus tendue. Nombre d'entre elles restent en situation précaire. Les entreprises invoquent la fragilité de l'embellie économique pour justifier leur prudence. Les négociations s'annoncent tendues.

Il existe pourtant des gagnants. Les cadres profitent d'une hausse des salaires estimée à 2% pour cette année. Soit l'équivalent de l'inflation. La hausse est plus marquée chez les cadres du transport et de la logistique (+3,9%), de la banque et des assurances (+3,6%), des biens d'équipement (+2,6%) et de l'agroalimentaire (+2,3%). Tous ces secteurs ont profité des confinements, avec une hausse significative des achats en ligne. Autre profession gagnante : les RH (+3,3%). Les grands perdants sont les salariés de la grande distribution, de l'hôtellerie et de la restauration. Près de la moitié des salariés ne devrait pas bénéficier d'une hausse de salaire.

La fin d'année s'annonce décisive. De nombreux secteurs comptent sur les fêtes et la réouverture des frontières (États-Unis, Australie…) pour augmenter leur chiffre d'affaires. Les retraités espèrent ne plus être les grands oubliés des mesures gouvernementales. Gouvernement qui table sur un maintien de la reprise économique, pour éviter une nouvelle protestation nationale. 2022 s'ouvre sur l'élection présidentielle et la présidence de l'Union européenne. Deux rendez-vous cruciaux que l'exécutif ne veut pas manquer.