Expatriation en Iran : l'aventure d'un couple français

Interviews d'expatriés
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Publié le 2021-03-18 à 07:43 par Veedushi
Shahin et Sarah sont un couple de jeunes Français. Leur curiosité, mais aussi leur soif de découverte de nouvelles cultures les a menés en Iran où ils étudient aujourd'hui la calligraphie, la poésie ainsi que la langue perse. Originaires de l'île de la Réunion, ils nous parlent aujourd'hui de leur parcours et nous expliquent ce choix de destination hors du commun.

Pouvez-vous vous présenter brièvement et nous parler de votre parcours ?

Nous sommes originaires de l'Île de la Réunion, et nous sommes tous les deux partis à Paris pour nos études supérieures. Sarah a travaillé dans le domaine du tourisme, aussi bien en agence de voyage que dans les tours opérateurs, et moi dans le domaine de la finance.

Aujourd'hui, nous sommes tous les deux étudiants en Iran. On étudie la calligraphie perse, le Santour qui est un instrument de musique traditionnel iranien, la poésie et la langue perse.

Qu'est-ce qui vous a amenés en Iran ? Depuis combien de temps y vivez-vous ?

Nous étions déjà venus en Iran deux fois avant de nous y installer, une fois en 2018 et une fois en 2019, principalement pour du tourisme religieux. Sarah, à travers son travail, envoyait des groupes de touristes français en Iran. Du coup on avait toujours une sorte de « premier pas » qui était déjà fait.

Lors de notre dernier voyage en Iran en 2019, un de nos amis qu'on avait rencontré à Mashaad en 2018, et avec qui nous sommes restés en contact, nous a fait visité la ville de Mashaad, en dehors des lieux de culte. Mashaad c'est une ville principalement connue pour son grand mausolée, qui est le plus grand d'Iran.

Nous avons découvert la ville qui était plutôt moderne et nous nous sommes rendu compte que nous pouvions avoir un style de vie qui nous convenait. En fait, lorsqu'on vient comme ça pour du tourisme religieux, on ne se rend pas compte de comment est la vie en Iran. Forcément, il y a les à prioris qui jouent aussi, et puis là, grâce à notre ami, Ali, on a découvert un peu plus la vie à Mashaad, le côté plus moderne. On a réalisé qu'il était possible de vivre dans cette ville en combinant aussi bien l'aspect moderne que religieux.

Depuis septembre 2020, on s'est donc installés à Mashaad, en Iran.

Une expatriation en Iran n'est pas une chose courante. Pourquoi avoir fait ce choix plutôt que rentrer à l'île de la Réunion ?

Rentrer à l'île de la Réunion représentait vraiment le choix de la facilité, un peu comme si on retournait dans notre « cocon ». Forcément là-bas, on a nos parents à tous les deux, on a grandi là-bas, du coup aucune difficulté.

Partir en Iran, ça représente une aventure, le genre de décision qui ne vient qu'une seule fois dans une vie. Soit on prend le virage, soit on ne le prend pas et l'opportunité ne se représentera pas une deuxième fois.

Il y a aussi un gros fossé entre ce qu'on voit aux infos concernant ce pays et la réalité sur place. Vu que nous y sommes allés, nous avons pu le constater de nos propres yeux.

Le troisième point, c'est le monde de la consommation à Paris. On en était fatigués. Et l'Iran vous savez, c'est comme le fin fond de l'Asie. Le pays n'est pas touché par tout ce système de consommation, des marques et des publicités omniprésentes. Ici, il n'y a rien de tout ça.

Avez-vous eu des difficultés à vous adapter à votre nouvel environnement ? Comment avez-vous surmonté ces étapes ?

Des difficultés, il y en a eu beaucoup. Tout est différent : le système, la langue, il n'y a plus aucun repère avec l'Europe... Absolument rien ! Nous en arrivant, on ne parlait aucun mot de Perse et personne ne parlait anglais ici. Du coup, on était illettrés et on ne pouvait communiquer qu'avec des gestes. On avait deux personnes sur place pour nous aider, notre ami Ali, qui parlait un peu anglais et qui a fait énormément pour nous, et une amie de la famille de Sarah qui habitait à Mashaad elle aussi, et qui nous a énormément aidé pour trouver notre logement. Même pour manger, les premiers mois, c'était très difficile. On avait tellement perdu du poids. Les menus sont tous en persan. Il y a le fameux kebab, comme en Turquie, mais avec du riz blanc. On ne savait que ça !

En même temps que notre installation, on prenait des cours de persan pour pouvoir communiquer. C'était une formation de 6 mois en accéléré, 5h par jours et 6 fois par semaine. Une fois qu'on avait notre appartement, on devait en même temps acheter les premiers équipements essentiels, et aller en cours.

C'était aussi de la découverte dans ce challenge, et on avait hâte d'arriver au bout. C'est ce qui nous motivait et nous poussait à continuer et surmonter ces épreuves.

Qu'en est-il de votre vie sociale ? Vous êtes-vous fait de nouveaux amis depuis votre arrivée ?

Pour se faire des amis ici, c'était vraiment facile. Surtout qu'on est Français et ici les Français il n'y en a pas beaucoup. A vrai dire, les Européens en général, il y en a très peu. Du coup le contact avec les gens se fait facilement. Notre cercle d'amis ici est très restreint, mais ce sont tous des gens très bien et avec qui on s'entend à merveille. Il est aussi nécessaire, surtout dans un pays où il n'y a pas beaucoup d'étrangers, de sélectionner ses amis.

Quelles sont les différences les plus marquantes entre la France, votre pays d'adoption, et l'Iran ?

Ici lorsqu'on fait un virement bancaire, ça prend environs 5 secondes pour que le destinataire reçoit l'argent sur son compte ! Et tout ça, sans frais. Et il y a un système grace auquel lorsqu'on fait un paiement par carte, on reçoit un SMS directement avec le montant dépensé et le solde restant sur le compte.

Autre chose aussi qu'on avait abordé plus haut, c'est le fait qu'il n'y ait pas de présence de marques internationales. En tout cas, il y en a très peu.

La culture iranienne qui est totalement différente, ils ont beaucoup de formules de politesse ici. La gentillesse des gens est un peu comme à l'île de la Réunion, que ce soit les commerçants ou les taxis. On peut facilement tisser des liens juste comme ça. Pour un pays dont la monnaie locale a peu de valeur, le nombre de fois qu'on s'est fait arnaqués, on peut les compter sur les doigts d'une main.

Y a-t-il tout de même des choses qui vous manquent de la France ou de l'île de la Réunion ?

Des bouchons, des samoussas, les biscuits Nutella, les fruits exotiques. Bref, surtout la nourriture !

Lorsqu'on habitait à Paris, on pouvait prendre un billet d'avion et faire un week-end en Europe, alors qu'ici si on veut sortir du pays, on doit demander une autorisation de sortie, déposer nos passeports, ce qui prend facilement une semaine, et ensuite on peut sortir du pays. Mais par contre, se faire des week-ends à l'intérieur du pays c'est très facile.

Qu'en est-il du coût de la vie en Iran, tout particulièrement depuis le début de la crise ?

La situation économique du pays est très difficile. C'était déjà le cas avant la crise et c'est devenu pire. L'embargo des États-Unis impacte aussi énormément et a entraîné une inflation énorme dans le pays : environ 100% d'inflation entre aujourd'hui et il y a un an et demi lorsqu'on était arrivés ! Ce qui fait qu'aucun prix n'est stable. Par exemple les loyers des magasins à chaque fin du contrat prennent des augmentions d'au moins 50% et il y a régulièrement des boutiques qui ferment.

L'Iran est-il un pays que vous conseilleriez aux personnes qui souhaitent partir vivre à l'étranger ?

Pour quelqu'un qui n'est pas musulman, l'Iran c'est un pays difficile pour y vivre. En fait, lorsque que quelqu'un s'expatrie dans un pays comme l'Iran, c'est parce qu'il a un objectif précis en tête. Sinon, c'est très peu probable qu'un pays comme celui-là vienne à l'esprit des gens !

Et si tout cela était à refaire, y a-t-il une chose que vous feriez différemment ?

Nous sommes très content de toutes les étapes que nous avons réussi à franchir pour nous installer ici, et nous ne changerions rien si c'était à refaire !

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