Droits de l'homme : où se situe Maurice ?

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Publié le 2024-01-31 à 11:41 par Lila Chaleon*
Maurice est actuellement au cœur de l'examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies. Alors que le gouvernement met en avant les avancées du pays, les rapports soulignent des défis majeurs, allant des conditions carcérales à la liberté de la presse.

Maurice se trouve une fois de plus sous le feu des projecteurs internationaux alors que le Groupe de travail sur l'Examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies se penche sur la situation des droits de l'homme dans le pays. 

Il s'agit de la quatrième fois que le pays se soumet à cet examen. Ce mercredi, la délégation mauricienne, dirigée par le ministre des Affaires étrangères, Maneesh Gobin, a assumé la responsabilité de défendre la position du gouvernement face à l'EPU ce mercredi à Genève.

Si le premier rapport du gouvernement suggère que Maurice respecte largement les normes internationales, l'examen a relevé plusieurs zones de préoccupation persistantes quant à la situation des droits de l'homme dans notre pays.

Discriminations de genre et contre les LGBT+

Bien que le premier rapport gouvernemental laisse entendre que Maurice respecte largement les normes internationales, l'EPU a soulevé plusieurs préoccupations persistantes quant à la situation des droits de l'homme dans le pays. La question des discriminations de genre et contre les personnes LGBT+ a été mise en avant, soulignant des lacunes dans la législation mauricienne en matière de protection des femmes et des personnes LGBT+. La Commission nationale des droits de l'homme a notamment signalé le manque d'initiatives pour remédier aux violences domestiques en forte augmentation, préconisant des mesures plus larges, telles que des conseils prénuptiaux et des thérapies de couple axés sur la violence conjugale en collaboration avec des ONG.

Les critiques ont également porté sur la définition législative du conjoint, entravant l'acceptation des couples homosexuels. Des recommandations ont été émises pour élargir la portée de la loi relative à la protection contre la violence domestique aux personnes LGBTQI vivant en cohabitation. De plus, des appels ont été lancés en faveur de la dépénalisation totale de l'avortement et de mécanismes plus efficaces pour lutter contre la violence domestique persistante.

Liberté d'expression et de la presse

La législation mauricienne relative aux technologies de l'information et des communications a été vivement critiquée, à cause de nombreuses dispositions non conformes aux normes internationales en matière de liberté d'expression et de respect de la vie privée. Ainsi, l'EPU a appelé à un renforcement du cadre juridique mauricien pour garantir des protections adéquates contre la surveillance injustifiée et l'utilisation abusive des données personnelles. Un contrôle judiciaire indépendant a été suggéré comme moyen de renforcer ces garanties, soulignant ainsi la nécessité d'une réforme substantielle pour répondre aux normes internationales.

Parallèlement, l'utilisation de moyens juridiques et financiers par le gouvernement mauricien pour réduire au silence les journalistes locaux a été évoquée. Des préoccupations qui ont été exacerbées par la révision de la loi relative aux technologies de l'information et des communications, autorisant des peines de prison allant jusqu'à dix ans pour des contenus jugés « offensants » et « susceptibles de causer un préjudice ». 

Violences policières et carcérales

Les observations du département d'État des États-Unis en 2022 sur les droits humains à Maurice mettent en lumière des problèmes persistants. Des allégations d'actes de torture policière, bien qu'interdits par la loi et la Constitution, subsistent. On pense aux vidéos choquantes de mai 2022, montrant des policiers agressant sexuellement un détenu. Bien que des enquêtes aient été lancées, des questions subsistent quant à l'efficacité des mesures prises pour remédier à ces abus.

Les rapports indépendants, tels que ceux du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, présentent une image plus sombre, soulignant des retards dans les enquêtes policières, des conditions carcérales problématiques et des atteintes à la liberté de la presse comme des points critiques nécessitant des améliorations urgentes.

Les conditions de détention pour les affaires liées à la drogue sont également critiquées : la Commission nationale des droits de l'homme a mis en évidence des retards dans les enquêtes de police, et recommande des révisions de la réglementation pénitentiaire conformément aux règles Nelson Mandela.