Famille et séparation : le blues des expatriés

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Publié le 2023-04-14 à 10:00 par Estelle
Être loin de ses proches est l'une des principales causes du coup de blues en expatriation, qui porte le plus souvent à un retour au pays d'origine. Cet éloignement est souvent source de remise en question et de volonté de rentrer chez soi. Mais à quel moment et pourquoi certains vivent ce manque plus fort que d'autres ?

Une expatriation n'est pas toujours tout rose et la découverte d'un nouveau pays n'est pas toujours au centre de l'attention. Parfois, la séparation avec la famille peut être une réelle souffrance pour un expat. Oui, un départ est préparé, logiquement. Mais qu'en est-il de l'aspect psychologique d'une séparation à plusieurs milliers de kilomètres de sa famille ?

La remise en question de son séjour à l'étranger peut arriver à l'improviste. On peut parler de quelques semaines, quelques mois, mais aussi de plusieurs années après l'arrivée dans le pays d'accueil. Il peut y avoir un événement déclencheur, mais ça peut aussi être un cheminement qui prend progressivement de la place, jusqu'à devenir impossible à ignorer.

Pour ne donner qu'un exemple, la solitude peut être l'élément déclencheur d'une remise en question, ou encore le départ de ses amis expatriés. En effet, beaucoup se retrouvent confrontés notamment aux va-et-vient incessants des expatriés qui restent puis repartent. On lie des amitiés, on partage des choses, mais on continue à dire au revoir au fil du temps. Et il est fort probable que l'expat en question décidera d'en faire de même car au final, seuls les membres de sa famille ne le quitteront jamais, du moins, pas par choix.

En fait, chaque expatrié à son propre vécu, comme pour beaucoup d'autres sujets. Les parents qui vieillissent, la maladie, le décès, la naissance d'un neveu ou d'une nièce, ou simplement la distance qui ne devient plus supportable sont quelques-uns des éléments qui peuvent conduire un expat à décider de rentrer.

Ces expats qui ont tout remis en question

Hannah a été fille au pair dans une famille italienne pendant quelques mois. « J'avais vraiment envie de voir la vie en Europe. J'étais très jeune et je connaissais des filles de ma ville qui avaient fait cette expérience à mon âge et qui l'avaient très bien vécu. Alors je me suis lancée ; j'ai trouvé une famille. Comme les membres de cette famille parlaient anglais, c'était plus facile. Tout ce qu'ils proposaient me convenait, j'ai même parlé avec la fille au pair précédente qui était aussi adorable et m'a tout expliqué. Dès mon arrivée, ça a été un choc : très dur de me retrouver seule avec des inconnus (même si on avait parlé plusieurs fois par Skype). Je me suis tout de suite sentie très triste et je pleurais beaucoup, ma famille et mes amis me manquaient. » Hannah a fait quelques connaissances par le biais de réseaux d'Américains sur place, mais ça n'allait toujours pas. « Je ne m'arrangeais pas bien avec la maman qui était très exigeante, et avec le recul, je pense que je n'étais pas assez mûre pour affronter ça. Je pensais peut-être trouver une mère de substitution pendant mon expatriation, mais ça ne marche pas comme ça. » Toute cette situation a poussé Hannah à remettre en question l'entièreté de son séjour. C'est ainsi qu'elle s'est résolue, assez tôt, à trouver un moyen de rentrer aux États-Unis rapidement. « Je suis repartie pour les fêtes de fin d'année comme c'était prévu et je devais revenir avec le nouvel an… Mais je ne suis jamais repartie. » La jeune femme n'a plus donné de nouvelles à la famille d'accueil. « Ils ont cherché à me contacter plusieurs fois, même la fille au pair précédente qui était restée très proche d'eux a essayé de me contacter. Avec le recul, je ne suis pas fière de moi, mais sur le coup je ne pouvais pas rester et affronter la déception de cette famille qui comptait beaucoup sur moi. Vraiment, je crois que l'expatriation n'est pas pour moi. »

Mara a également été expatriée en Italie pendant quelques années. « Je suis d'abord venue pour un programme Erasmus, puis je suis restée car j'ai rencontré quelqu'un, et la vie en Italie était vraiment chouette à cette époque. Malgré l'éloignement, je suis restée très attachée à ma famille. Mes parents et mes frères et sœurs me manquaient beaucoup et d'ailleurs je rentrais dans mon pays d'origine dès que possible. » Au fil du temps, Mara s'est rendu compte que la vie en Italie n'était plus aussi idéale qu'elle en avait l'air au début. « Il faisait beaucoup trop chaud en été, les transports en commun étaient désastreux, j'avais du mal à trouver un travail en CDI... Bref c'était loin d'être la Dolce Vita. » Puis est arrivée la maladie de l'un des membres de sa famille, suivie par la Covid et les confinements qui allaient avec. « C'est à ce moment-là que j'ai réellement tout remis en question. Être loin de mes proches pendant toutes ces épreuves m'a vraiment affecté et j'ai ressenti comme un déclic : je devais rentrer définitivement. J'ai beaucoup réfléchi car ma décision n'était pas facile : j'étais en couple, nous étions fiancés, même si les choses n'allaient pas fort… Mais à la fin nous avons décidé de nous séparer (première raison : il n'était pas question pour lui de partir vivre à l'étranger) et j'ai déménagé. » Aujourd'hui, Mara est très heureuse de ma décision et n'a aucun regret. « J'ai passé de belles années en expatriation mais, en fin de compte, ma vie est ici, proche de ma famille. Je ne pense pas repartir vivre à l'étranger un jour. J'ai acheté une maison, j'ai un job qui me plaît, je n'ai plus vraiment les mêmes envies qu'il y a 10 ans. »

Rentrer pour mieux repartir

Pour autant, rentrer d'expatriation parce que notre famille nous manque ne veut pas dire ne jamais repartir. Certains expatriés n'étaient pas prêts lors de leur première expatriation. Trop jeune, pas le bon moment… On trouve plusieurs explications à ça. On veut partir vivre la grande aventure à l'autre bout du monde sans prendre en compte le fait que la séparation peut être dure à vivre. Beaucoup rentrent en plein milieu de leur séjour, mais repartent après plusieurs années car leur envie d'évasion revient au pas de course. Il sera donc nécessaire cette fois d'entreprendre une préparation plus minutieuse pour eux-mêmes et leurs proches afin d'appréhender toute éventualité et éviter que le manque et le sentiment de solitude ne reprennent le dessus.