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Pourquoi rentrer chez soi pour Noël peut être si éprouvant

Reunion familiar para Navidad
nd3000 / Envato Elements
Écrit parLaura le 17 Décembre 2025

Illuminations dans les rues, enfants en vacances, magasins bondés de clients pressés, va-et-vient incessant dans les aéroports… Pas de doute : Noël est arrivé. Noël fait partie de ces périodes de l'année qui divisent profondément. Certains l'adorent, d'autres la détestent, souvent dans des proportions équivalentes. Et lorsque l'on vit à l'étranger, cette période prend une dimension encore plus grande. Il arrive que l'on traverse une phase transitoire marquée par une envie soudaine de rentrer « à la maison » : retrouver les plats avec lesquels l'on a grandi, la famille, les traditions. À l'inverse, on peut aussi ressentir un rejet total de cette période et rêver d'entrer en « hibernation » du 1ᵉʳ décembre au 8 janvier. Les deux réactions sont parfaitement normales. 

Parfois, la situation est encore plus complexe. Une part de vous brûle d'envie de rentrer pour Noël, tandis qu'une autre se sent profondément mal à l'idée même d'y penser. Comment est-ce possible ?

Noël est un moment très particulier de l'année. En très peu de temps, tout s'enchaîne : visites familiales, nombreux événements sociaux, puis, à nouveau, les séparations pour la majorité des expatriés qui retournent dans leur pays d'origine pour les fêtes. D'un point de vue psychologique, rentrer chez soi à Noël comporte de véritables défis auxquels nous avons le sentiment de devoir, une fois encore, faire face, comme les conversations délicates avec certains proches, les annonces que l'on redoute, les conflits familiaux anciens ou non résolus, ou encore ce sentiment déroutant de ne plus vraiment se sentir « chez soi », même en étant de retour.

Le reste de l'année, vivre à l'étranger offre une forme de protection. La distance géographique nous évite souvent d'avoir à affronter certaines dynamiques familiales complexes ou douloureuses. Le retour pour les fêtes nous remet brutalement en contact avec ces réalités, ce qui peut provoquer une anxiété anticipatoire dans les jours précédant le départ, des troubles du sommeil, une agitation intérieure qui tend à s'intensifier à mesure que la date du voyage approche.

À l'inverse, certaines personnes vivent les jours précédant le départ avec beaucoup d'enthousiasme et de joie. Elles s'imaginent déjà les retrouvailles avec la famille ou les amis, le plaisir de retrouver les saveurs familières ou de se promener à nouveau dans les rues de leur ville natale. Quelle que soit votre expérience, mon travail de psychothérapeute auprès de personnes expatriées m'a appris une chose : le retour au pays est toujours un moment délicat et le départ pour reprendre sa vie à l'étranger est, je dirais, particulièrement délicat.

Chaque année, après les fêtes, les consultations se remplissent de récits de patients qui, s'ils ont vécu de très beaux moments en rentrant chez eux, ont aussi traversé des situations difficiles, parfois éprouvantes émotionnellement. Cette ambivalence, le fait de ressentir des émotions si opposées dans un laps de temps très court, peut laisser un profond sentiment de désorientation et de confusion, et renforcer encore ce sentiment de déracinement que certains éprouvaient déjà avant même de monter dans l'avion.

Si vous vivez à l'étranger et que vous rentrez chez vous pour Noël, voici quelques pistes qui pourront peut-être vous aider à mieux comprendre et gérer vos émotions pendant votre séjour comme au moment du retour dans votre pays d'accueil.

Les conflits interpersonnels font partie de la nature humaine

Si un conflit est en suspens avec un membre de votre famille ou un ami, il sera toujours là lorsque vous rentrerez. Rappelez-vous que c'est vous qui êtes parti. Le conflit, lui, n'est allé nulle part. Il vous attend simplement. Les conflits font partie intégrante des relations humaines. Il est illusoire de penser qu'ils puissent disparaître totalement. Plutôt que d'espérer tout régler en quelques jours, il peut être plus sain de revoir vos attentes. Si le moment d'en parler se présente, prenez le temps de respirer, prenez un peu de recul et essayez de maintenir une communication aussi ouverte que possible. Il est probable que le conflit ne se résolve pas complètement, mais un léger apaisement, comme comprendre le point de vue de l'autre, même sans le partager, peut déjà représenter une avancée significative.

Ne pas vraiment se sentir « chez soi »

Le sentiment de ne plus vraiment se sentir chez soi, alors même que l'on est de retour « à la maison », est l'un de ceux que j'entends le plus souvent en consultation. L'enthousiasme du retour se heurte parfois brutalement à une pensée douloureuse : « Je ne me sens plus d'ici ».

Si cela vous arrive, rassurez-vous : c'est une expérience extrêmement fréquente chez les expatriés. Votre vie, et avec elle votre identité, a évolué au fil des années passées à l'étranger. Il est tout à fait normal de se retrouver autour de la table de Noël, avec les mêmes personnes, les mêmes plats, les mêmes traditions, et de ressentir pourtant que quelque chose a changé. Et c'est vrai : les choses ont changé. Vous n'êtes plus exactement la personne qui est partie vivre à l'étranger. Vos proches non plus.

Rentrer chez soi, c'est souvent une forme de retour vers le passé. Dans ces moments-là, il est important de se rappeler que, même si tout a évolué, vous restez lié à ce lieu et à ces personnes. Les liens se transforment ; ils évoluent. Même sans partager le quotidien, on peut continuer à se sentir de quelque part, tout en se sentant, peu à peu, appartenir à la culture du pays dans lequel on vit aujourd'hui. Reconnaître cette ambivalence comme une conséquence naturelle du parcours migratoire est essentiel.

Beaucoup d'émotions en peu de temps… puis retour à la vie « normale »

C'est exactement cela. Une patiente m'a un jour raconté sa visite de Noël chez ses parents d'une manière très parlante. Lorsqu'elle vivait à Londres, elle avait l'impression d'être l'héroïne principale de sa propre vie. Mais à Noël, en rentrant en Espagne, elle avait le sentiment de changer de film : un film très ancien, dans lequel elle n'était plus le personnage principal. D'autres protagonistes occupaient le devant de la scène, et tout le monde semblait rejouer le même scénario, avec les mêmes dialogues, en boucle. Elle se sentait piégée dans une répétition sans fin, un peu comme le personnage de Bill Murray dans Un jour sans fin.

Trouver un espace refuge pour se réguler émotionnellement

Entre les repas de famille, les obligations sociales et les multiples rendez-vous, il est essentiel de s'accorder un espace sécurisé pour souffler et se recentrer lorsque l'on se sent submergé émotionnellement. J'appelle cet espace un refuge. Ce refuge vous permet d'entrer et de sortir des situations sociales, de retrouver un sentiment de calme et de vous autoréguler. Des gestes simples peuvent aider : se passer le visage à l'eau froide, pratiquer une respiration lente et profonde, ou faire une courte promenade. Ces actions favorisent la détente du système nerveux et activent le système parasympathique.

Se répéter intérieurement des phrases rassurantes comme « Ça va. Je suis en sécurité » peut également être très utile, en particulier dans des contextes familiaux tendus ou conflictuels, en aidant à diminuer l'état d'alerte du corps.

N'oubliez pas : prendre soin de votre équilibre émotionnel pendant les fêtes est essentiel pour retrouver votre quotidien avec une bonne santé mentale.

Joyeuses fêtes à toutes et à tous.

Vie quotidienne
A propos de

Psychologue généraliste de la santé. Expert en psychologie de la migration auprès du Conseil général de psychologie d'Espagne. Membre du groupe de travail sur la migration, le refuge, l'asile et les relations internationales du Collège de psychologie de Catalogne. Elle offre un soutien psychologique en ligne aux expatriés et aux migrants depuis 2003.

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