OCDE : Quels les pays attirent le plus de travailleurs étrangers ?

Actualités
  • employes multiculturels au bureau
    Shutterstock.com
Publié le 2023-03-20 à 10:00 par Asaël Häzaq
Opportunités professionnelles, cadre de vie, environnement, inclusivité, niveaux de salaires, impôts… Choisir son pays d'expatriation est rarement une affaire d'improvisation. Que l'on parte pour étudier, travailler, ou créer une entreprise, les critères de sélection du pays sont nombreux. L'édition 2023 de l'OECD Indicators of Talent Attractiveness (ITA) se penche sur l'attractivité des États. Une attractivité différente selon le statut de l'expatrié et ses exigences. Analyse.

Sur quels critères choisir son pays d'expatriation ?

Photographie de l'attractivité des pays membres à l'instant T, l'OECD Indicators of Talent Attractiveness (ITA) permet de mieux comprendre quelles sont les attentes des expatriés en fonction de leur projet de vie, et quelles sont les forces et les faiblesses des États. Des données précieuses pour des pays en compétition directe pour attirer les talents étrangers. La pénurie de main-d'œuvre se poursuit en 2023. Elle est même particulièrement critique dans certains secteurs comme la santé ou le bâtiment. Tous les pays sont en manque de personnels soignants et de techniciens qualifiés. Sur quels critères ces derniers arrêtent-ils leur choix ?

Pour son étude, l'OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques) a retenu 4 profils d'expatriés : les travailleurs hautement qualifiés, les chefs d'entreprise, les créateurs de start-up et les étudiants. Le rapport décrypte 7 indicateurs pour chaque profil : qualité des opportunités (le critère comprend l'environnement plus ou moins propice au développement du projet de l'expatrié), les salaires et impôts (coût de la vie, charges…), les perspectives d'avenir (intégration sur le long terme, changement de statut, accès à la citoyenneté...), l'environnement (cadre de vie, vie familiale…), qualité de l'environnement professionnel (le pays donne-t-il toutes leurs chances aux talents ? Quelle est la place de l'innovation, la R&D?), l'inclusivité, la qualité de la vie et la santé. Chaque indicateur peut être classé selon 3 critères : très important, important, peu important.

Travailleurs hautement qualifiés en quête de stabilité

Candidats à l'expatriation hautement qualifiés, c'est en Nouvelle-Zélande qu'il faut poser ses valises. Le pays dépasse tous ses autres concurrents de l'OCDE et arrive en tête des États où il fait bon démarrer une carrière professionnelle. Mais la compétition est serrée. La Nouvelle-Zélande dépasse d'une très courte tête la Suède, la Suisse et l'Australie, qui finit au pied du podium. Le Canada termine 10e.

Les trois premiers pays (respectivement Nouvelle-Zélande, Suède et Suisse) gardent généralement leur position dans tous les critères choisis (très important, important, peu important) et pour tous les indicateurs. S'ils intervertissent parfois leurs positions, ils conservent la tête du classement. La Nouvelle-Zélande et la Suisse ont en commun un faible taux de chômage, respectivement 3,3 % et 2,2 %. Celui de Suède est plus élevé (7%), mais le pays reste économiquement dynamique, surtout pour les talents internationaux. Les 3 pays se rejoignent côté perspectives de carrière et qualité de vie. Les travailleurs étrangers qualifiés se projettent sur le long terme, et peuvent plus facilement envisager vie familiale et réussite professionnelle.

Entrepreneurs : où payer le moins de taxes ?

La Nouvelle-Zélande, la Suisse, et la Suède restent bien évaluées par les entrepreneurs. La Suède arrive même en tête des pays de l'OCDE, devant la Suisse, et la Norvège. Le Canada arrive au pied du podium. La Nouvelle-Zélande est cinquième (configuration avec tous les indicateurs de l'étude marqués comme importants). Mais lorsque les revenus et taxes sont considérés comme plus importants que les autres indicateurs, c'est la Suisse qui prend la première position, devant la Suède et le Canada. Sans surprise, les entrepreneurs sont sensibles aux facteurs pouvant directement impacter leur entreprise (coût des salariés, des investissements, impôts sur les sociétés, taxes à l'importation, etc.) Inversement, lorsque les charges sont considérées comme moins importantes que les autres indicateurs, la Suède reprend la première place, devant le Canada et la Suisse.

Des écosystèmes calibrés pour les créateurs de start-ups

À en croire les résultats, les créateurs de start-ups semblent, en revanche, porter plus attention au cadre de vie qu'aux charges à payer. Lorsqu'ils portent attention à tous les indicateurs, ils placent le Canada meilleur pays de l'OCDE pour implanter sa start-up. Les États-Unis viennent en 2e position. La France occupe la 3e position. Le Royaume-Uni ferme le podium. La Suède est 7e, la Nouvelle-Zélande, 14e et la Suisse n'apparaît même pas dans le classement. Là encore, les résultats confirment l'importance du cadre de vie en fonction de son activité. Le Canada ne cesse de gagner en popularité auprès des créateurs de start-ups. En début d'année, le Canada a même relancé son start-up visa, pour attirer davantage de créateurs. Les États-Unis restent le pays phare de l'innovation. Les créateurs de start-ups disent rechercher avant tout un écosystème propice à la création et au développement de leur entreprise : intérêt de l'État pour l'innovation, soutien aux entreprises innovantes, investissement dans la R&D, réseau professionnel, hub, etc.

Étudiants : rêve américain ou nippon

Chez les étudiants, le rêve américain a de beaux jours devant lui. Les États-Unis devancent l'Allemagne et la Norvège, et occupent la première place des pays de l'OCDE où s'expatrier. Lorsque tous les voyants sont au vert, les étudiants prennent le large vers la première puissance mondiale. Lorsqu'ils focalisent toute leur attention sur les opportunités de carrière, le pays creuse même l'écart avec les autres pays. Les États-Unis arrivent toujours premiers lorsque la qualité de l'environnement professionnel ou les perspectives d'avenir sont les indicateurs les plus importants. Mêmes résultats si la famille, la santé ou la qualité de la vie deviennent les facteurs les plus importants. Les étudiants rêvent américain. Pour eux, les potentielles difficultés d'obtenir un visa H-1B relèvent encore de la fiction. Le coût des études ne semble pas non plus freiner les aspirations des étudiants internationaux.

Fait rare, comparativement aux autres profils d'expatriés : le Japon entre dans le top 10 des meilleurs pays où s'expatrier pour ses études. Les travailleurs hautement qualifiés le classent 20e, les entrepreneurs, 21e, et les startupers, 19e. Alors même que le Japon affronte une pénurie de main-d'œuvre inédite, il peine à attirer et retenir les talents internationaux. En cause, une un rythme de travail jugé effréné, des heures supplémentaires à rallonge, la barrière de la langue, ou encore, la lourdeur administrative. Les étudiants, eux, ont une tout autre image du Japon. Cool Japan, le mouvement soft power nippon lancé dans les années 2000, a porté ses fruits. Les étudiants étrangers plébiscitent justement le Japon pour sa culture, sa langue, ou encore, son cadre de vie. Étudier au Japon marque aussi la différence sur le CV. Le pays est à la pointe dans de nombreux domaines, avec des universités renommées délivrant un enseignement de qualité.

Choix du pays d'expatriation : ce qui fait la différence

L'étude de l'OCDE confirme les constats empiriques. Les attentes et besoins d'un entrepreneur ne seront pas les mêmes que ceux d'un étudiant ou d'un travailleur étranger. Et même entre les créateurs d'entreprise « classiques » et de start-ups, des différences émergent. Il convient de rappeler que l'étude agrège des moyennes. Bien entendu, il existe une multitude d'entreprises dans de multiples domaines. Une PME œuvrant dans le textile n'aura pas les mêmes besoins d'une PME de commerce de détail.

Le rapport appuie plutôt les tendances observées. La Nouvelle-Zélande, la Suède ou la Suisse sont considérées comme des destinations propices à l'expatriation familiale et au développement de carrière. Même approche pour les étudiants, les chefs d'entreprise et les startupeurs, qui vont chacun rechercher les pays les plus attractifs en fonction de leur statut.

Ce qui fait la différence pour s'expatrier n'est donc pas toujours une question d'argent. Bien sûr, le coût de la vie entre en ligne de compte. Mais il est loin de constituer l'élément essentiel de décision. Les candidats à l'expatriation vont plutôt choisir en fonction de critères essentiels au développement de leur projet. Des critères objectifs et subjectifs, prenant en compte leur situation professionnelle, universitaire, leur état de santé, mais aussi leur ressenti, leurs valeurs, leurs aspirations.