Vivre dans l'État de New York autrement : une Française parle de sa vie d'expatriée dans les montagnes

Interviews d'expatriés
  • Geraldine
Publié le 2022-03-25 à 10:00 par Nelly Jacques
Un amour très tôt pour les États-Unis et un parcours de vie personnel difficile ont amené Géraldine à venir passer plusieurs mois dans les montagnes de l'État de New York pour prendre le temps de se reconstruire et, finalement, elle n'en est jamais partie. Elle nous raconte, aujourd'hui, comment elle a pu obtenir l'autorisation de rester vivre aux USA, comment se passe la vie dans une zone rurale de l'État de New York et ce qu'elle aime le plus dans sa nouvelle région d'adoption.

Comment a commencé votre histoire avec les États-Unis ? 

Mon histoire avec les États-Unis a débuté au lycée (1989-90). Mon père faisait de la radio ondes courtes, plus communément connue à l'époque sous le nom de CIBI (Citizen band radio en anglais). Ne parlant pas anglais, il m'a plus ou moins « poussé » à prendre place derrière le micro et j'ai rapidement conversé en anglais avec des personnes principalement localisées sur la côte est des États-Unis. S'en sont suivies des correspondances écrites lorsqu'on ne pouvait pas s'entendre sur les ondes.

En 1992, je réunis mes économies et je prends un billet d'avion. J'ai tout juste 20 ans et je pars à l'aventure pendant 3 mois en solo direction le Maryland dans la banlieue de Washington DC puis la Caroline du Nord et du Sud avant de remonter jusqu'à Buffalo dans l'ouest de l'État de New-York. Je fais la connaissance de toutes les personnes avec lesquelles j'ai parlé pendant 2 ans et développé des liens solides d'amitié. J'en prends plein les yeux et le cœur. Cupidon ayant frappé à ma porte en la personne qui m'avait accueilli dans le Maryland, nous avons entamé une relation longue distance et j'ai donc voyagé régulièrement au pays de l'Oncle Sam jusqu'en 1995 où survint la rupture.

Vous étiez donc très jeune et avez dû reprendre le cours de votre vie en France. Qu'avez-vous fait ensuite ? 

Me voilà donc de nouveau en France. J'ai 23 ans et je travaille à temps partiel. C'est aussi la période où je décide de quitter le nid familial. Très rapidement après, je rencontre la personne qui deviendra mon mari. De cette union va naître 3 enfants. Malheureusement, mon conjoint s'avère être un pervers manipulateur narcissique et ma vie est un enfer. En 2016, j'atteins mes limites et je me sépare de lui.

Au final, vous avez toujours eu les États-Unis dans un coin de votre tête, non ? 

C'est tout à fait ça. La liberté retrouvée, je renoue contact avec certains amis sur la côte Est, dont mon compagnon actuel, Perry, que j'avais eu aussi la chance de rencontrer lors d'un voyage les années précédentes. Il a bien compris que psychologiquement et physiquement j'étais juste épuisée et il m'a proposé de venir me reposer ici dans les Adirondacks (massif montagneux dans l'État de New York) afin de pouvoir réfléchir à ce que je voulais pour ma vie d'après.

Et donc maintenant vous vivez aux États-Unis, comment avez-vous pu vous installer et avoir un visa ? 

Je suis initialement arrivée sous ESTA et je n'avais pas la possibilité de rester plus de 3 mois. J'ai donc dû rentrer en France et faire une demande de visa B1-B2 (valable 10 ans, qui permet de rester aux États-Unis 6 mois maximum). J'ai vraiment eu beaucoup de chance que tout se soit déroulé très rapidement et sans accroc. 14 jours, jour pour jour après mon départ, j'étais revenue sur le territoire américain. J'ai pu prolonger ce visa à deux reprises pour une durée de 6 mois chacune avant d'aller consulter un avocat en immigration. Il m'a orienté sur un moyen légal mais peu connu d'obtenir la Green Card (qui permet de vivre légalement aux USA) qui correspondait tout à fait à mon cas de figure dans la mesure où mon mari était de nationalité américaine. Cela a été un processus très long de deux ans et demi au total mais j'ai obtenu le fameux sésame pour 10 ans en mars 2020.

Aujourd'hui votre vie est donc aux États-Unis. Comment vous êtes-vous intégrée ?

Ma vie ici est très simple. Je vis dans une zone de pleine montagne, pas densément peuplée, loin du bruit et de l'agitation des grandes villes.

C'est la « slow life », loin du stress et en pleine nature, un retour à l'essentiel dont j'avais besoin pour guérir.

Avec du recul, en dehors des histoires de visa et de démarches administratives, quelles sont finalement les plus grandes difficultés que vous avez rencontrées dans votre expatriation et quels sont les conseils que vous pourriez donner à quelqu'un qui vient s'installer aux États-Unis dans une région comme la vôtre ? 

Dans l'ensemble, je n'ai pas eu de problèmes particuliers pour m'intégrer. La langue n'a pas été un obstacle et les gens sont très accueillants et accessibles. En zone rurale, ce n'est pas forcément évident de s'intégrer dans des cercles déjà établis : les gens ont souvent grandi ensemble, sont allés à la même école, tout le monde se connaît. Quand vous arrivez de l'extérieur, ils sont naturellement méfiants, mais vivre avec un « local », ça aide aussi. La solidarité et l'esprit de communauté étant très forts, je me suis naturellement proposée pour aider à l'organisation des œuvres de charité locales. Cela m'a permis de connaître un peu de monde, et plus tard une activité professionnelle m'a permis de créer du lien. Donc, si vous êtes amenés à vous établir en zone moins densément peuplée, je recommande vivement de vous inscrire sur les groupes locaux Facebook et d'aller vers les gens en participant à des activités organisées par la ville.

Vous vivez dans l'État de New York, mais pensez-vous que si vous viviez dans la ville même de New York votre intégration aurait été pareille ? 

Je ne saurais dire si mon intégration se serait passée de la même façon dans la ville de New York. Je pense que c'est propre à la situation et à la personnalité de chacun. L'avantage avec les grandes villes, c'est qu'elles ont peut-être des structures qui facilitent l'établissement des expatriés mais pas forcément l'intégration dans la population locale : les expats se sentent moins seuls du coup mais ont tendance à ne se fréquenter peut-être qu'entre eux. La notion d'amitié aux États-Unis est particulièrement souple dans le sens où les locaux vont être très accueillants et avenants mais cela ne signifie pas nécessairement qu'ils vont vous laisser pénétrer leur sphère privée. Il y a pas mal d'amitiés par réseautage donc ça peut surprendre ou parfois même décevoir. Une fois qu'on a compris les règles du jeu, cela va un peu mieux mais il faut rester ouvert d'esprit et comprendre le fonctionnement du tissu social. New York a quand même l'avantage d'être très cosmopolite.

Quand on vous suit sur les réseaux sociaux, on se rend vraiment compte de votre amour pour votre région d'adoption. Pouvez-vous nous dire ce qui vous touche particulièrement ? 

Ce qui me plaît le plus ici, c'est la proximité avec la nature. Des paysages et des couleurs magnifiques, la montagne bien sûr et beaucoup d'étendues d'eau, loin du bruit et de l'agitation des grandes villes. C'est exactement ce dont j'avais besoin pour me ressourcer et guérir à ce tournant de ma vie. Un grand retour à l'essentiel. La sérénité d'une balade en forêt le long de la rivière, respirer l'air pur, aller se baigner dans un lac, faire du kayak au coucher du soleil, observer par la fenêtre les biches qui viennent mâchouiller les arbustes au fond du jardin ou encore la danse incessante des écureuils, aller marcher sous la neige tombante qui crisse sous le pied : ce sont tant de moments ressourçant qui m'apportent plénitude et sentiment de sécurité. Avec mon compagnon, nous faisons des balades à moto, nous aimons aussi les concerts gratuits en plein air et les festivals en tous genres. C'est la slow life et donc un excellent endroit pour déconnecter du monde.

Sur mon Instagram(@adirondackfrenchie), je partage ma vie quotidienne et mes découvertes. J'ai vraiment à cœur de montrer que les États-Unis ne se résument pas qu'aux grands buildings, aux grands parcs nationaux ou aux grands espaces. Il y a tellement plus que ça. Certes, c'est le pays de la démesure parfois mais il y a aussi beaucoup de gens comme vous et moi qui mènent une vie comme tout le monde.

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