Christelle: « J'aime le côté petite ville de province de Pondichéry »

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Publié le 2013-07-04 à 02:00 par Expat.com team
Christelle est française, guadeloupéenne d'origine indienne. Après avoir étudié et débuté sa carrière dans l'hexagone, elle s'est rendue en Inde, à la découverte de ses racines indiennes. Elle a alors décidé d'y rester et s'est installée à Pondichéry.

Pourquoi as-tu choisi de t'installer à Pondichéry?

Ayant toujours été intéressée par mes origines indiennes, je suis venue pour la première fois il y a presque 9 ans, une révélation, ensuite j'y allais 2 fois par an. J'ai pris un congé sabbatique pour faire des recherches généalogiques dans différentes régions en Inde.
A mon retour, je voulais absolument y travailler mais ne trouvant pas d'opportunité, j'ai décidé de démissionner et de partir. C'était il y a presque 2 ans. Je suis passée par hasard à Pondichéry en attendant la fin de la mousson du nord et finalement j'y suis restée. J'ai créé une société de services: en bref, on fait la passerelle entre l'Inde et l'étranger pour ce qui touche au voyage de retour aux sources et au business en/avec l'Inde. Enfin, je me suis mariée l'année dernière avec un Indien de Pondichéry.

Comment s'est passée ton installation?

Mon installation s'est très bien passée car cela faisait longtemps que je voyageais en Inde et je connaissais assez bien la culture et les difficultés qu'on peut rencontrer. Je suis partie avec un visa « Tourist » pour avoir le temps d'explorer et décider de mon lieu d'installation.
J'avais trouvé un appartement meublé à Pondichéry pour une période de quelques semaines via une broker et à mon arrivée, elle m'a permis de bien m'installer et prendre mes repères. Dès que je me suis décidée à rester, j'ai cherché un appartement pour une longue durée, cela n'est pas évident quand on est seule surtout en pleine saison mais j'ai fini par trouver.

As-tu eu des difficultés d'adaptation?

J'ai eu du mal avec le climat chaud et humide à mon arrivée, il m'a fallu bien 2 semaines pour m'y faire et bien dormir.
Autre chose, je ne savais pas comment m'habiller sans avoir l'air d'une touriste : il ne faut pas trop se découvrir par respect pour les locaux qui sont traditionnels et en même temps il fait une chaleur !!

Qu'est-ce qui t'a le plus surpris à Pondichéry?

J'ai été surprise de voir autant d'Européens venir pour des longs séjours. J'étais déjà venue mais je les voyais comme des touristes de passage et cela ne m'avait pas frappée à l'époque.

Est-il facile de s'intégrer à Pondichéry et de faire de nouvelles connaissances ? Quels sont tes conseils pour rencontrer du monde?

Ce n'est pas si facile que cela car la société « Pondichérienne » est très fragmentée et beaucoup de gens ne font que passer.
Quand tu veux faire la fête, c'est facile, tu vas dans les café/clubs de l'ancien quartier français et tu rencontreras du monde. Quand tu as des enfants qui vont au lycée français, tu es dans un réseau déjà établi avec les parents d'élèves. Quand tu veux t'occuper avec activités associatives, tu as aussi des réseaux établis. Mais quand tu viens pour gagner ta vie, que tu n'as pas d'enfants et que tu ne veux pas te sentir enfermé dans un groupe, c'est plus difficile.
J'ai malgré tout tissé quelques liens avec le travail et c'est ainsi que j'ai rencontré mon mari qui est d'ici. Avec lui, j'ai pu connaître d'autres personnes, plutôt des Indiens.

Tu as créé ta société: quelles sont les formalités pour pouvoir monter son entreprise en Inde? Quels sont les secteurs porteurs?

Les formalités sont complexes, changent souvent et il y a plusieurs types de société. Il faut passer par un expert-comptable qui s'occupera de la création administrative et être au moins 2 pour créer une entreprise.
La création en elle-même n'est pas compliquée mais c'est le dossier pour la demande de visa « Business » qui peut poser problèmes avec les lettres d'invitations à fournir et la durée du visa qui est en général de 30 jours à 60 jours. J'avais déjà préparé mon projet professionnel avant le départ en restant dans mon domaine d'expertise et d'intérêt. J'ai juste fait quelques ajustements et pris le temps de démarrer une activité à la fois.
Pondichéry est un tout petit marché, pas de grosses entreprises internationales et on a le problème de la saisonnalité entre Avril et Septembre où il y a peu de visiteurs. Je vois beaucoup de gens « ouvrir des guest-houses » ou se lancer dans le tourisme mais la concurrence est rude et tous les coups sont permis... Ce qui est porteur, je pense, c'est de créer un produit ou service pour l'international et de s'appuyer sur son réseau en France pour vendre, communiquer, etc. Mais il faut vraiment vouloir s'installer pour quelques années car cela prend du temps à construire.

Peux-tu citer un trait caractéristique de la ville ou du pays qui te plaît particulièrement ainsi qu'un aspect négatif?

J'adore la flexibilité et sensation de liberté qui existent en Inde, on finit toujours par trouver une solution à tout. A Pondichéry, j'aime le côté « petite ville de Province », pas besoin de voiture, il y a la mer, on peut manger de tout et il y en a pour tous les budgets. Mais l'augmentation de la population venant d'autres régions/pays et le tourisme de masse ont fait augmenter les prix de l'immobilier de façon dramatique. Les prix dans l'ancienne ville française sont proches des prix en France et pourtant les routes sont aussi mauvaises qu'ailleurs.
Comme partout en Inde, l'urbanisation est mal planifiée et les infrastructures sont défaillantes. J'ai bien peur qu'à terme Pondichéry ne devienne comme Chennai avec le manque d'eau et d'électricité de façon plus systématique.

Qu'est-ce qui te manque le plus par rapport à la France, ton pays d'origine?

Ma famille et mes amis car cela prend du temps de recréer de vrais liens. Heureusement, je vais régulièrement en France et j'ai de temps en temps de la visite.

A quoi ressemble ton quotidien à Pondichéry?

Si on n'est pas envoyé par sa société, il faut beaucoup bosser pour arriver à bien gagner sa vie et c'est comme partout, la création de la société peut mettre du temps à porter ses fruits. Donc je travaille beaucoup.
Par contre, en Inde, on peut facilement avoir une personne pour s'occuper de la maison et des courses ce qui est un stress en moins et du temps en plus. De plus je n'ai pas de temps de transport, sauf si je suis en mission ailleurs.
En fin de journée, on va marcher sur la Promenade au bord de mer où il fait plus frais. Le samedi, on travaille comme volontaires pour notre ONG Ader India et le dimanche, on part en moto explorer les environs et on finit souvent à la plage. J'ai peu de temps pour d'autres activités mais on trouve de bons cours de danse, yoga, art, etc.

Quels conseils peux-tu donner à ceux qui veulent s'installer à Pondichéry?

La préparation est primordiale :

1 - Il faut savoir exactement pourquoi on quitte ce que l'on a et ce qu'on cherche à obtenir ailleurs. Cela aide, lorsqu'on se sent frustré, de se rappeler pourquoi on est venu.

2 - Avoir un projet pro ou perso et se renseigner sur le visa qui ira avec car cela peut compromettre le séjour. Beaucoup s'imaginent qu'ils peuvent jongler mais sur le long terme c'est fatigant et coûteux.

3 - Prévoir son budget de façon large : il faut minimum 500 euro par mois pour 2 personnes, en plus, il faut payer la caution du logement (de 3 à 10 mois), le meubler, créer la société et la faire tourner.
Les prix augmentent vite donc d'une année à l'autre, votre budget va devoir évoluer. L'Inde n'est plus un pays pas cher, entre l'augmentation de la TVA, des matières premières et des salaires, on a ressenti le changement depuis 2 ans.
La langue française est peu parlée donc des rudiments d'anglais ou de tamoul sont nécessaires.

4 - Se documenter : certains journaux ou documentaires insistent trop à mon goût sur les problèmes de l'Inde sans en montrer les avantages.
Pour autant, il ne faut pas sous-estimer ces problèmes : les routes dangereuses, le bruit, la mauvaise gestion des déchets ou les problèmes d'électricité ont un réel impact sur notre vie quotidienne. Et cela ne change pas aussi vite qu'on le souhaiterait.

Dernier conseil, ne pas sous-estimer les Indiens. Comme l'a dit M. le Consul Général de France à Pondichéry Pierre Fournier dans une interview : l'Inde n'a pas besoin de nous mais nous avons beaucoup à y faire ! Si vous êtes prêt à vous lancer dans l'aventure indienne en connaissance de cause, vous vivrez une merveilleuse expérience humaine !

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