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Vivre à l'étranger quand Noël envahit tout

couple regardant des sapins de Noel
sedrik2007 / Envato Elements
Écrit parNatallia Slimanile 18 Décembre 2025

Pour beaucoup de personnes, Noël et le Nouvel An sont des repères familiers de l'année, façonnés par des traditions transmises depuis l'enfance. Mais tout le monde ne partage pas le même calendrier culturel. Pour les expatriés originaires de pays où Noël n'est pas une fête majeure, vivre dans une société où elle s'impose partout, dans l'espace public comme dans la sphère privée, peut être déroutant. Décorations, musiques, rituels : tout devient omniprésent, transformant une période censée être festive en un rappel constant de la distance culturelle. Dans cet article, nous explorons la manière dont ces expatriés vivent ce décalage et comment ils apprennent à s'adapter quand Noël n'est pas leur fête.

La période approche à grands pas. Les centres commerciaux sont déjà décorés, les sapins installés, et si vous allumez la télévision, il y a de fortes chances que vous tombiez sur une programmation spéciale de Noël.

Pour beaucoup d'entre nous, Noël est une période attendue avec impatience, comprenant des repas en famille, des congés, une ambiance chaleureuse… Difficile de ne pas y trouver son compte. Vous avez sans doute déjà vu des vidéos ou lu des articles sur des expatriés déstabilisés parce qu'ils vivent dans des pays où Noël ou le Nouvel An ne sont pas célébrés comme chez eux. Mais que se passe-t-il lorsque l'on se retrouve, année après année, dans la situation inverse ?

Selon le Pew Research Center, on comptait environ 2,3 milliards de chrétiens dans le monde en 2020, soit près de 28,8 % de la population mondiale. Autrement dit, environ une personne sur trois se déclare chrétienne. Environ 12 % d'entre elles sont des chrétiens orthodoxes, qui célèbrent Noël selon un calendrier et des traditions légèrement différents. Aujourd'hui, la plupart des sources indiquent que Noël est célébré dans environ 160 à 170 pays. Cela signifie que la majorité du monde célèbre cette fête, d'une manière ou d'une autre. Mais même dans les pays où Noël n'est pas un jour férié officiel, la fête est souvent célébrée sur le plan commercial, visuel ou social.

« Chaque année, on décore notre bureau pour Noël et on organise une petite fête. Nous n'avons que deux collègues étrangers, venus d'Angleterre, et la majorité de l'équipe est chinoise. Chez nous, on ne célèbre pas Noël, mais au bureau, oui », raconte John, expatrié à Shenzhen, en Chine.

Puisque la majorité du monde célèbre Noël d'une façon ou d'une autre, on se met rarement à la place de celles et ceux qui n'ont pas grandi avec ces célébrations à grande échelle, et qui se retrouvent ensuite dans des pays où Noël et le Nouvel An occupent une place centrale. Le contraste est encore plus fort pour les expatriés originaires de régions où la grande fête annuelle n'est pas Noël, mais le Nouvel An lunaire, l'Aïd, Diwali ou la fête nationale.

Imaginez avoir grandi avec un calendrier émotionnel totalement différent, puis vous retrouver soudain à vivre dans celui de quelqu'un d'autre.

Le choc culturel des fêtes : un impact psychologique sous-estimé

Si vous êtes expatrié, le concept de choc culturel ne vous est probablement pas inconnu. Les chercheurs le décrivent souvent comme une courbe : une phase d'enthousiasme, suivie d'une chute brutale, puis d'une remontée progressive. Le choc culturel lié aux fêtes, en revanche, est souvent plus soudain et plus intense. Un jour, tout va bien, vous vous adaptez à votre nouvelle vie, et le lendemain, une célébration collective à laquelle vous ne vous identifiez pas vous replonge dans ce sentiment d'être « à part ». Les fêtes accentuent la frontière entre « eux » et « nous ».

Quand le pays que vous appelez désormais « chez vous » parle un langage culturel que vous ne maîtrisez pas, avec des chansons, des rituels et des codes familiaux que vous n'avez jamais appris, votre cerveau peut réagir comme si vous vous trouviez face à toute situation inconnue : par une forme d'alerte, voire d'anxiété.

Certaines études suggèrent qu'un moyen efficace de réduire cette distance émotionnelle consiste à pratiquer une immersion culturelle « à faible enjeu ». Autrement dit, plutôt que de vous forcer à adopter une tradition dans laquelle vous ne vous reconnaissez pas, il peut être utile d'y entrer progressivement, par petites touches. Par exemple, faire un tour dans un marché de Noël ou participer à l'organisation d'une fête de bureau permet parfois de mieux comprendre pourquoi tant de personnes sont attachées à cette période.

À l'inverse, il est tout aussi possible que vous n'ayez tout simplement aucune envie de vous intégrer à ces célébrations. Dans ce cas, comment faire ? « Je me souviens de toutes ces lumières, partout. Dans les centres commerciaux, les vitrines, chez mes collègues, même au travail. Au début, j'aimais bien. Mais année après année, voir toujours les mêmes décorations et entendre les mêmes chansons… C'est devenu fatigant », confie Kumar, originaire d'Inde.

S'adapter à des fêtes hivernales très présentes quand elles n'ont pas de signification particulière pour soi

« Quand j'ai quitté Satun Town, en Thaïlande, pour m'installer à Interlaken, en Suisse, je savais que je devrais m'adapter à un climat très différent et à un mode de vie nouveau. Mais je n'étais pas préparée à l'ampleur des célébrations en décembre. Toute la ville se transforme en marché de Noël ; des visiteurs arrivent des pays voisins. C'est agréable, mais quand on ne se sent pas concerné, cela peut être très solitaire et parfois sembler excessif », raconte Preeda.

C'est l'une des particularités de Noël et du Nouvel An. Lorsqu'on les célèbre, cela se fait souvent à grande échelle et sur une période relativement longue. Les décorations apparaissent parfois dès novembre, les publicités et programmes télévisés thématiques se multiplient, et chaque sortie donne l'impression que le fameux « esprit de Noël » vous poursuit.

Être loin de chez soi pendant une fête importante peut être difficile. Mais l'inverse l'est aussi : ouvrir sa porte à des chanteurs de cantiques et se sentir totalement étranger à ce qui se passe. À force d'être exposé, chaque hiver, à des messages liés à une fête que l'on ne célèbre pas, un sentiment d'exclusion peut s'installer, suivi d'une certaine lassitude, voire d'agacement.

Alors, que faire ? Nous avons échangé avec plusieurs expatriés confrontés à cette situation. Voici ce qui ressort de leurs expériences.

La solution la plus simple, mais clairement temporaire, consiste à voyager pendant cette période. Dans les pays où Noël et le Nouvel An sont largement célébrés, il est probable que vous puissiez profiter de quelques jours de congé. En s'y prenant à l'avance, on peut transformer l'agitation des fêtes en une parenthèse reposante ailleurs. « Je ne suis pas fan de l'hiver. Paris est magnifique pendant les fêtes, mais une fois qu'on a vu un sapin de Noël, on les a tous vus. Alors chaque année, je pars avec ma famille dans un pays chaud pendant les vacances d'hiver. C'est devenu notre tradition », explique Igor Mistayevskiy, originaire d'Ukraine.

Une autre option consiste à composer avec l'ambiance tout en y intégrant vos propres repères. Vous pouvez vous laisser porter par la période sans adopter les codes traditionnels de Noël. Cuisiner les plats que vous aimez, décorer votre intérieur à votre façon, et vivre ce moment de l'année selon vos propres règles. Si c'est surtout l'aspect social qui vous pèse, pourquoi ne pas prendre l'initiative et organiser une fête « fusion » ? Si vous êtes invité à une soirée de Noël, apporter un plat emblématique de votre culture peut donner du sens à l'événement et permettre à vos collègues ou amis de découvrir autre chose.

Je peux d'ailleurs partager une expérience personnelle. Lorsque je vivais en Chine, un collègue américain organisait chaque année un dîner participatif le 24 décembre. Au lieu de suivre strictement les traditions de Noël, il demandait à chacun d'apporter un plat familial et de raconter son histoire. Ces soirées sont rapidement devenues incontournables pour les expatriés, car elles offraient une expérience différente à chaque édition.

Pour celles et ceux qui vivent mal cette période en raison de différences religieuses ou spirituelles, rejoindre des communautés d'expatriés partageant les mêmes croyances peut être une solution précieuse. Cela peut se faire en ligne via des groupes Facebook, Telegram ou WhatsApp ou sur place, en se rapprochant de clubs d'expatriés, de lieux de culte ou d'associations culturelles.

Si vous ressentez plutôt le besoin de ralentir, cette période peut aussi être propice à l'introspection et au recentrage sur votre bien-être mental. « En général, je célèbre Noël, mais ces dernières années, je me sens de plus en plus déconnectée des fêtes trop bruyantes. L'an dernier, j'ai passé quatre jours dans une retraite silencieuse à Hong Kong. L'expérience a été très bénéfique ; je suis rentrée ressourcée… même si j'ai raté quelques cadeaux », raconte Jasmine, expatriée à Hong Kong.

Enfin, si vous n'avez pas de projet particulier pour cette période, s'engager dans le bénévolat ou une action solidaire peut être un excellent moyen de lutter contre le blues des fêtes. On pourrait même dire que la générosité est l'antidote idéal à un Noël parfois trop commercial, en offrant un sentiment d'utilité et d'ancrage : deux choses que beaucoup d'expatriés recherchent loin de chez eux.

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A propos de

Titulaire d'une licence (avec distinction) en langue anglaise et interprétation simultanée, Natallia a exercé en tant que rédactrice et éditrice pour diverses publications et chaînes médiatiques en Chine pendant dix ans.

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