Expatriation au Canada : avez-vous le profil recherché ?

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Publié le 2022-12-05 à 14:00 par Asaël Häzaq
Le Canada a toujours la cote auprès des étrangers, et le gouvernement compte bien en profiter. Décidé à accueillir quelque 500 000 immigrants par an d'ici à 2025, l'État se lance dans une nouvelle campagne de communication, et déroule le tapis rouge aux candidats à l'expatriation. Age, diplôme, langues parlées, expérience professionnelle… Quels sont les meilleurs profils pour immigrer au Canada ?

Immigration au Canada : à la recherche du meilleur candidat

Jeune diplômé expérimenté maîtrisant parfaitement le français et/ou l'anglais (maîtriser les deux étant un plus considérable). Voici donc quel serait le profil idéal pour immigrer au Canada. En mars 2022, Statistics Canada met à jour son enquête de 2015 intitulée « Quels facteurs de sélection permettent le mieux de prédire les gains des demandeurs principaux de l'immigration économique ? » Les autorités canadiennes s'appuient sur cette base pour brosser les portraits types des étrangers répondant le mieux aux besoins économiques du pays, et ayant le plus de chance d'immigrer durablement au Canada. C'est également ces enquêtes qui permettent de mettre à jour le Système de classement global (SCG) (ou Comprehensive Ranking System – CRS), qui classent les candidats à l'expatriation éligibles au permis Entrée express.

Le premier critère de sélection se joue avant l'arrivée au Canada. Sans surprise, les étrangers ayant une expérience professionnelle sont avantagés. Ils le sont encore plus lorsqu'ils sont natifs francophones ou anglophones, et jeunes. Les 25-29 ans obtiennent davantage de points que les seniors. Les détenteurs d'une Licence ou d'un Master sont préférés aux non-diplômés. Ils le sont encore davantage s'ils évoluent dans un secteur sous tension. La Chambre du commerce et de l'industrie française de Montréal fait état d'une pénurie de main-d'œuvre sans précédent. Le 9 octobre, le journaliste Emmanuel Langlois recueille pour Radio France les propos de Julien Tougeron, nouveau directeur de la CCI : « Il manque 1 million de travailleurs à travers le Québec, et bientôt 3 dans tout le Canada. »

Métiers sous tension et meilleurs profils pour immigrer au Canada

Le profil idéal du candidat à l'immigration n'est pas qu'une simple donnée abstraite. Il augmente non seulement les chances d'immigrer au Canada, mais permet aussi d'avoir des revenus plus élevés. D'après Statistics Canada, chaque année d'expérience peut faire gagner jusqu'à 50 % de revenus en plus (sur les revenus à moyen terme). Dans le même sens, les immigrants plus jeunes gagnent en moyenne 27 à 35 % de plus que les plus âgés. Les diplômés du baccalauréat gagnent environ 14 à 21 % de plus que les non-diplômés. La langue d'origine paie également : les natifs anglophones et francophones perçoivent généralement davantage de revenus que les autres (environ 42 % de plus). Des schémas équivalents s'observent pour les immigrations sur le court et le long terme. L'expérience professionnelle avant l'arrivée est même davantage favorisée sur le court terme (+84 % de revenus en plus). En revanche, elle peut faire perdre des revenus lorsqu'elle est très « trop » importante : une longue expérience professionnelle (plus de 10 ans) signifie souvent un âge plus avancé. Or, plus l'âge avance, moins le profil de l'immigrant est intéressant.

Tout ceci est bien sûr à mettre en balance avec le projet d'expatriation et le poste visé. C'est ce que rappelle Statistics Canada. En novembre, une vingtaine d'emplois sont particulièrement en tension au Canada : directeur en commerce de détail et de gros, adjoint administratif, infirmier, aide-soignant, caissier, serveur, cuisinier, ou encore, superviseur des services alimentaires. Des métiers techniques, mais aussi des emplois non qualifiés, souvent occupés par des étudiants internationaux. Dans le domaine de la santé, le Canada manque aussi de médecins généralistes et spécialistes, de dentistes, de pharmaciens. Mais les professionnels de la santé étrangers sont freinés par les fortes restrictions qu'impose le pays. Le même problème se pose pour les enseignants étrangers dont les diplômes ne sont pas reconnus au Canada. Le pays compte aussi recruter plus de 256 000 apprentis d'ici à 5 ans, dans des métiers eux aussi sous tension : cuisiniers, électriciens, mécaniciens, peintres et soudeurs.

Politique d'immigration canadienne : les nouveaux objectifs

L'annonce a fait grand bruit. Mardi 8 novembre, Sean Fraser, ministre de l'Immigration, dévoile les nouveaux seuils que doit atteindre le Canada pour assurer sa prospérité économique. L'objectif est ambitieux, puisque l'État prévoit d'accueillir 500 000 nouveaux immigrants par an d'ici à 2025. Alors en visite à New York, le ministre déclare : « notre plan met l'accent sur la croissance économique. [...] Et d'ici la troisième année de ce plan [en 2025], 60 % des nouveaux immigrants seront admis dans la catégorie « immigration économique ». Concrètement, le nouveau plan fédéral compte accueillir 465 000 nouveaux immigrants à partir de 2023, pour arriver à 500 000 en 2025.

Comme le martèle Fraser, c'est l'immigration économique qui prime. Le même plan prévoit d'accueillir moins de réfugiés et de freiner la progression des regroupements familiaux. Mais Justin Trudeau ne laisse aucune place à la polémique, et rappelle que le Canada a été « le chef de file mondial » en ce qui concerne l'accueil des réfugiés syriens, afghans et ukrainiens.

Mais le pays pourra-t-il traiter les nouveaux dossiers des candidats à l'expatriation ? Immigration Canada, ministère chargé des programmes d'immigration est vivement critiqué pour ses retards. Le problème s'est aggravé avec la Covid. Sean Fraser promet l'embauche de 1250 nouveaux agents. Comment traiteront-ils les dossiers ? En septembre, le gouvernement reconnaît des pratiques discriminatoires « par inadvertance » à l'encontre d'étudiants venant d'Afrique francophone. Peu de temps plus tard, des étudiants indiens dénoncent les effets pervers de la politique canadienne, qui les contiendrait dans des secteurs peu rémunérateurs. Le Canada manque en effet de main-d'œuvre dans beaucoup d'emplois non qualifiés. Le gouvernement promet d'examiner ces cas de discrimination (une promesse déjà donnée l'an dernier) et maintient une stratégie qui a déjà fait ses preuves : attirer les jeunes actifs qualifiés et expérimentés pour booster la croissance du pays.