Se lancer dans une carrière atypique à l'étranger : mode d'emploi

Vie pratique
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Publié le 2023-10-04 à 08:00 par Asaël Häzaq
Aventure en soi, l'expatriation revêt encore une autre dimension lorsqu'il s'agit d'exercer un métier atypique. Reconversion professionnelle, poursuite d'un rêve, challenge personnel… Comment se lancer dans un pays qu'on ne connaît pas ? À quoi faut-il prêter attention ?

Métier atypique, carrière de rêve

Par « carrière atypique », on entend ici des métiers qui ne sont pas ceux visés par la plupart des expatriés. Les pénuries de main-d'œuvre mettent en effet en avant certains types de professions, essentiellement dans la santé, la construction, le transport et la logistique, l'hôtellerie et la restauration, ou encore les technologies de l'information et de la communication (TIC). La banque, l'ingénierie et l'enseignement font aussi partie des secteurs qui recrutent. On parle bien plus de faire carrière à l'étranger dans la finance que de faire carrière dans l'agriculture ou la restauration d'œuvre d'art.

C'est en ce sens qu'on entend « carrière, métiers atypiques ». Ces métiers peuvent être traditionnels (agriculteur, horloger, caviste, brasseur, luthier, relieur, potier, boulanger…), avant-gardistes (éleveur d'insectes comestibles, fabricant de maisons minimalistes…) ou tournés vers le numérique et les nouvelles technologies (testeur de jeu vidéo…). On observe également un intérêt pour les professions orientées vers le bien-être, la nature, le développement personnel (herboriste, naturopathe, masseur…). À la différence des secteurs connus, qui recrutent et dont les offres d'emploi se trouvent facilement, les secteurs atypiques sont généralement moins visibles.

Se lancer dans une carrière atypique va souvent de pair avec le métier-passion, la concrétisation d'un objectif, la réalisation d'un rêve. Il n'est bien sûr pas dit que la passion doit être présente avant l'expatriation. Parfois, le ou les voyages à l'étranger font office de déclencheur. Il peut aussi s'agir d'un choix de l'étranger de se reconvertir professionnellement. Sa vie dans le pays d'accueil l'a mis en contact avec son futur environnement professionnel.

Carrière atypique : un double challenge

Se lancer dans une carrière atypique à l'étranger représente un double challenge. Il faut tout d'abord savoir si l'on pourra se lancer dans le pays d'accueil choisi, et avec quel statut juridique. Car les professions ne sont pas toutes ouvertes aux expatriés. La Thaïlande, par exemple, réglemente certaines de ces professions et en interdit d'autres aux étrangers. Pour se lancer à l'étranger, il faut aussi connaître le marché local, les possibilités de développer son activité (trouver un employeur ou monter son entreprise), les subventions et aides que l'on pourrait recevoir, par exemple, en travaillant comme agriculteur.

Le plus beau métier du monde

On le surnomme « le plus beau métier du monde ». Indispensable, le métier d'agriculteur a ses exigences et ses contraintes. Contraintes pouvant être encore plus importantes à l'étranger. Des passionnés ont pourtant décidé d'embrasser leur carrière atypique ailleurs que dans leur pays d'origine. C'est le cas de Daniel Durso, Australien établi en Chine depuis plus de 10 ans dont l'histoire a fait la une de plusieurs médias chinois. Intéressé par la culture chinoise, il arrive dans le pays comme étudiant, et commence à travailler dans le secteur agricole après l'obtention de son diplôme. L'entrepreneur n'est pas tombé dans l'agriculture par hasard, mais dit avoir grandi dans une famille qui cultivait ses propres fruits et légumes. Même réflexion concernant sa ville d'accueil, Tianjin, région agricole.

La Chine est le 1er producteur mondial de blé et le 2e producteur mondial de maïs. Mais l'agriculture chinoise est aussi en pleine transformation ; le gouvernement encourage le remplacement des exploitations familiales, qui constituaient le paysage agricole traditionnel, au profit de grands groupes agroalimentaires mécanisés et autres coopératives. Se renseigner sur les grandes lignes de la politique du pays d'accueil (et se mettre à jour) peut aider à vérifier la viabilité de son projet.

Préserver un savoir-faire, un patrimoine

Apprendre la langue du pays d'accueil est tout aussi indispensable. Car construire une carrière atypique demande de dénicher son marché, ses partenaires, son réseau. On les trouvera plus facilement en parlant la langue du pays.

Ainsi, des étrangers racontent être partis au Japon apprendre le kobido, massage facial ancestral. Plus qu'un simple massage, il est un véritable art, nécessitant au moins 10 ans de pratique. Plutôt que de suivre les formations disponibles dans leurs pays d'origine, formations qui peuvent être non conformes à celles du véritable kobido, ces passionnés ont fait le choix d'aller à la source se former auprès de maîtres kobido japonais. Certains envisagent de faire carrière au Japon. D'autres entendent retourner dans leur pays d'origine ou s'établir dans un autre pays pour perpétuer l'art du kobido. C'est aussi le souhait des maîtres. Au Japon, le kobido semble moins intéresser les jeunes générations. L'engouement des expatriés est une manière de préserver la tradition.

On peut imaginer faire carrière en intégrant un centre de bien-être ou en s'établissant à son compte. On peut imaginer combiner le massage facial avec d'autres formes de massages et de pratiques relaxantes. Mais dans tous les cas, la maîtrise du japonais facilitera grandement la poursuite du projet. Les cours nécessitent déjà d'apprendre le japonais, car rares sont les maîtres à parler anglais (et tous les étrangers ne parlent pas anglais non plus). Certains maîtres se lancent sur le net, en version multilingue, mais de l'aveu des élèves expatriés, rien ne vaut la maîtrise de la langue. Elle permet, non seulement, d'établir les contacts professionnels, mais aussi de s'intégrer à tous les niveaux.

Carrière atypique à l'étranger : à quoi faut-il faire attention ?

Avant de vivre pleinement de votre passion, renseignez-vous bien sur la pratique de votre activité dans votre pays d'origine. Existe-t-il un marché ? Comment se porte-t-il ? Établissez une sorte de business plan, que vous créez votre entreprise (là, un business plan solide est indispensable) ou que vous intégriez une entreprise existence.

On ne rappellera jamais assez l'importance de parler la langue du pays d'accueil. Ceci est encore plus vrai quand on se lance dans une carrière atypique. Vous aurez peu de chances de trouver des ressources dans votre langue ; vos partenaires seront majoritairement des locaux. Conseil valable même si vous visez la clientèle étrangère (si vous exercez une activité vous mettant en contact avec une clientèle). N'oubliez pas que vos interlocuteurs ne se résumeront pas à vos clients. Parler la langue du pays d'accueil facilitera votre intégration à tous les niveaux.

Faites la bonne formation. De nombreux étrangers choisissent d'intégrer d'abord la structure qui leur permettra de se former. Ces années d'apprentissage (même sans apprendre concrètement votre métier) préparent votre future carrière. Vous connaissez le terrain, avez peut-être pu voyager dans le pays d'accueil, et pouvez envisager plus concrètement votre projet.

Entourez-vous d'experts locaux. Une parfaite maîtrise de la langue et des rouages de votre métier ne vous dispense pas de faire appel à des spécialistes locaux. Chaque domaine a son jargon, et il n'est pas dit que vous connaissiez le jargon juridique, pour ne citer que celui-là. De même, fréquentez d'autres professionnels exerçant la même activité que vous.

Il n'est pas toujours simple de se lancer dans une carrière atypique à l'étranger. On peut avoir l'impression que les risques sont plus grands, car ces domaines d'activité sont moins mis en valeur que d'autres. Restez confiant et gardez votre motivation. Une « expatriation passion » est toujours possible.