Peut-on travailler à l'étranger en situation de handicap ?

Vie pratique
  • personne handicapée au travail
    Shutterstock.com
Publié le 2024-04-30 à 10:00 par Asaël Häzaq
Oui, travailler et vivre à l'étranger en situation de handicap est possible. Et oui aussi, des obstacles existent, que le handicap soit visible ou non. Mais ces freins ne mettent pas en péril le projet d'expatriation, loin de là. S'expatrier en situation de handicap pour travailler : les conseils pratiques.

Combattre les idées reçues

C'est, de loin, le premier obstacle qui se dresse sur le chemin des personnes en situation de handicap. On associe encore trop souvent handicap et inactivité. Une association corroborée par des chiffres bien réels. Rien qu'en France, à peine « 38 % des personnes reconnues handicapées » travaillaient en 2022. C'est deux fois moins que l'ensemble de la population. (chiffre de la DARES, Direction de l'Animation de la recherche, des Études et des Statistiques en France). D'après le Bureau des statistiques du ministère du Travail des États-Unis, 21,3 % des personnes en situation de handicap travaillaient en 2022, contre 65,4 % des personnes sans handicap. Si l'écart reste important, le Bureau des statistiques relève que le taux d'emploi des personnes en situation de handicap progresse légèrement (il était de 19,1 % en 2021).

C'est également ce que veulent souligner les structures qui accompagnent les travailleurs en situation de handicap dans leurs démarches d'expatriation. Les mêmes chiffres montrent inversement qu'il est non seulement (et bien entendu) possible de travailler en situation de handicap, mais qu'il est tout aussi possible de s'expatrier. Une vision optimiste qui ne se voile pas la face pour autant. L'important écart entre les personnes avec et sans handicap, observable dans de nombreux pays, montre qu'il est plus difficile d'accéder au marché de l'emploi avec un handicap.

Plus difficile, mais pas impossible. C'est tout le combat des associations et des organisations d'aide à l'insertion des personnes en situation de handicap. L'organisme européen de mobilité Erasmus+, par exemple, octroie des aides pour accompagner les expatriés en situation de handicap.

Construire son projet professionnel

Anticipation. Le conseil est prodigué à tous les futurs expatriés, qu'ils soient ou non en situation de handicap. On insistera encore plus sur l'importance de l'anticipation quand on a un handicap. Dans quel cadre part-on à l'étranger ? S'il s'agit d'une mutation (avec un contrat de détachement ou d'expatriation), on conseille de bien négocier son contrat avec l'entreprise. En général, le contrat prévoit des aides pour l'installation dans le pays étranger, compte tenu de la situation du travailleur.

Concernant le handicap, nombre de régions du monde ont encore des progrès à faire en matière d'accessibilité. L'accessibilité reste l'un des principaux obstacles pour les futurs travailleurs en situation de handicap. Impossible de choisir sa future ville de résidence sans prendre en compte ces paramètres pratiques. Selon le handicap, une expatriation dans une région mal desservie, avec peu de transports (et des transports accessibles) sera à écarter. Même raisonnement avec, par exemple, une région où l'accès aux soins est difficile (peu de médecins, peu de spécialistes de la pathologie de l'expatrié, médicaments difficilement trouvables, prise en charge compliquée, etc.).

Le projet professionnel englobe donc tous les aspects pratiques de la vie. Il faut également s'assurer avec l'employeur (si l'on a déjà un contrat de travail) que l'entreprise a bien pris en compte la nature du handicap et adaptera le poste de travail et les conditions de travail en fonction de ce dernier. Un détour par la législation du pays d'accueil en matière de handicap confirmera les avancées (ou non) du pays en la matière et l'investissement du gouvernement du pays dans la défense et la protection des droits des personnes en situation de handicap. 

Bien s'informer et s'entourer

Si des ressources existent pour les personnes en situation de handicap, elles sont encore trop méconnues. C'est le cas d'Erasmus+, qui développe sa communication pour toucher davantage de personnes en situation de handicap. Encore trop de futurs expatriés abandonnent leur projet sans savoir qu'il était réalisable. Erasmus+ propose une prise en charge pour les personnes ayant un handicap ou des problèmes de santé. L'aide de l'organisme n'est pas uniquement financière. Erasmus+ accompagne et oriente les futurs expatriés dans la construction de leur projet professionnel à l'étranger.

Au niveau des États, plusieurs autres structures d'accompagnement des travailleurs en situation de handicap existent. Formation, mise en relation avec les entreprises… ces organismes militent pour une meilleure inclusion des personnes en situation de handicap sur le marché du travail. Ces établissements peuvent avoir une branche internationale, comme France Travail, l'institution française de recherche d'emploi. Le gouvernement canadien a développé un outil d'autodéclaration de sa situation de handicap. Réalisable en ligne, cette autodéclaration permet d'accéder aux offres d'emploi de la Fonction publique fédérale réservées aux personnes en situation de handicap. Le site Guichet Emploi publie également des offres d'emploi et des solutions pour les personnes en situation de handicap. En Nouvelle-Zélande, le ministère des Personnes en situation de handicap propose des ressources pour être accompagné et trouver du travail.

Travailler à l'étranger en situation de handicap : les conseils en plus

Attention aux allocations : celles liées au pays de résidence seront supprimées en cas d'expatriation. En France, par exemple, l'allocation aux adultes handicapés (AAH) sera perdue en cas d'expatriation, sauf dans le cadre d'un départ à l'étranger pour poursuivre ses études, suivre une formation professionnelle ou apprendre une langue.

D'autres aides existent : les ressortissants européens partant dans un autre pays de l'Union européenne (UE) peuvent bénéficier des aides desdits pays. En cas d'expatriation dans un pays non européen, on conseille tout d'abord de contacter les services sociaux pour expliquer son projet, et connaître les démarches pour bénéficier d'une aide éventuelle. Une personne handicapée vivant à l'étranger déposera une demande auprès du service social de son consulat, qui évaluera le taux d'invalidité pour accorder ou non l'aide.

Oui à l'expertise des expats sur place : le retour des personnes en situation de handicap vivant dans le pays d'accueil est une ressource précieuse. Entrer en contact avec eux permettra d'avoir un aperçu de la vie pratique dans le pays étranger. Même si ces expats n'ont pas le même handicap, ils poseront un autre regard, attireront l'attention sur des éléments que des personnes sans handicap ne verraient pas. Ils sont également des modèles pour le futur expatrié ; ils confirment qu'une expatriation avec un handicap est bien possible.

Liens utiles :

Erasmus+ : Accompagnement des personnes en situation de handicap

World Disability Union

International Disability Alliance

France : Mon parcours handicap

Canada : s'autodéclarer en situation de handicap ; guichet emploi

Nouvelle-Zélande : Whaikaha, Ministry of Disabled People

Japon : Accessible Japan