Cinéma mauricien : Le long-métrage Simin Zetwal en salle depuis le 24 mai

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Publié le 2023-06-01 à 06:39 par Lila Chaleon*
Dans un quartier résidentiel ouvrier de Maurice, Bolom, un homme âgé, a disparu. Son fils Ronaldo décide de partir à sa recherche et rencontre Ajeya, une immigrée indienne travaillant comme ouvrière. C'est le résumé du film "Simin Zetwal", "Regarde les étoiles" en français, la dernière réalisation de David Constantin, sorti en salle le 24 mai.

Une vision inédite de Maurice

Dans son deuxième long-métrage, David Constantin nous offre une vision contrastée de l'île Maurice, loin des clichés véhiculés par les téléfilms occidentaux. Ici, point d'hôtels luxueux, de danseuses exotiques ou de plages immaculées. À la place, nous plongeons dans un univers urbain, marqué par les sweatshops, les bars insalubres, les cases en tôle et les chiens errants. D'ailleurs, le réalisateur se moque ouvertement de l'image de carte postale qui colle à notre île en intégrant des images paradisiaques rongées par les moisissures dans le décor du film.

Car l'île Maurice de Constantin est à la fois belle, avec son ciel d'encre parsemé d'étoiles, ses néons et ses autels, mais aussi empreinte de désespoir. Ce sentiment est illustré à travers le destin des trois protagonistes : Bolom, un vieil alcoolique, Ronaldo, un jeune désœuvré aspirant à de nouveaux horizons, et Ajeya, une immigrée bangladaise attirée par la promesse d'un avenir meilleur.

Certes, le film n'est pas toujours subtil dans sa critique de la société locale, mais il reste néanmoins efficace. Certaines scènes, peut-être déconcertantes pour un public étranger, résonnent particulièrement chez les spectateurs mauriciens, comme une scène se déroulant dans un cimetière, montrant sur les pierres tombales les porteurs des noms de la honte, ces patronymes humiliants donnés aux anciens esclaves après le Slavery Abolition Act de 1833.

Des visuels créatifs pour un scénario bien rythmé

Le film bénéficie également de visuels magnifiques, parfois empreints d'une grande créativité. Et malgré des moments où le rythme peut sembler lent, le récit est ponctué de scènes d'humour surprenamment bien écrites (mention spéciale à Guillaume Silavant, qui incarne parfaitement le rôle d'un policier excentrique).

En ce qui concerne les acteurs, Jérôme Boulle offre une fois de plus une brillante interprétation, capturant avec justesse l'esprit de Bolom. Les deux autres membres du casting, Edeen Bugheloo et Sharonne Gah Roussety sont moins expérimentés mais cela n'affecte en rien .

Une reconnaissance internationale

En définitive, malgré ses imperfections, "Simin Zetwal" demeure un vibrant hommage à la classe populaire mauricienne et à la culture locale, s'imposant comme un des meilleurs long-métrage mauriciens à ce jour. D'ailleurs, le film est déjà porteur de pas moins de 4 distinctions internationales, dont le Prix du Meilleur montage aux Journées cinématographiques de Carthage (Tunisie), le Bronze Award et le Fipresci Award (Prix de la Critique) au Luxor African Film Festival (Égypte) et une Mention spéciale du jury au FESPACO (Burkina Faso). Espérons qu'il inspire d'autres réalisateurs talentueux de notre île à poursuivre leurs ambitions sur la scène cinématographique locale.