Je vous transfert ce post, transmis par des amis immigrés français depuis plus de 40 ans sur Montréal(Longueuil, plus exactement).A chacun de se faire sa propre idée, Ils sont, je cite "très réalistes, encore faut-il en être conscients"!!
Merci à M..
Bien entendu, cela ne reflète pas la totalité des réflexions des immigrants..Pour nous, c'est clair nous sommes partants!!!
Originaire de Nice, marié en France à une québécoise en 1998, nous avons atterri à l'aéroport de Mirabel le 06 août 2004. Après avoir vécu ensemble 6 ans sur la Côte d'Azur, nous avons décidé de quitter notre petite routine pour venir nous installer au Québec. Nous avons donc quitté nos 2 emplois de cadres, vendu tout ce que nous possédions là-bas et nous sommes arrivés au Québec avec quelques fringues, 80 bouteilles de vin et pas mal d'argent en banque.
Emploi :
Même si nous sommes très loin d'être des citadins dans l'âme, nous avons fait le choix de nous installer en Banlieue de Montréal afin de trouver rapidement un travail dans notre domaine (Administration de Bases de Données et Marketing). Cette stratégie semble avoir porté fruit : arrivés au mois d'août, nous avons commencé à travailler tous les deux dans notre branche dés le début du mois de novembre.
Ma conjointe, bien que Québécoise avec des diplômes locaux, a eu droit à la même petite phrase réservée aux immigrants fraîchement débarqués : « vous n'avez pas d'expérience Québécoise ». En effet, elle est partie en France dès qu'elle a obtenu ses diplômes. Résultat, elle a été contrainte de recommencer tout en bas de l'échelle avec environ la moitié de son salaire français. Cependant, après avoir fait ses preuves, elle a eu une bonne promotion accompagnée d'une bonne augmentation et ce, même si elle est a présent en congé maternité pour une durée d'un an. Alors qu'en France, dans son dernier job, elle subissait du harcèlement moral de la part de « petits chefs » dans toute leur splendeur, ici, elle s'éclate.
De mon côté, dès le début, j'ai obtenu environ le même salaire qu'en France, 3 semaines de congés, heures supplémentaires payées ou récupérées, assurance santé, actions de la compagnie, etc. L'ambiance avec mes collègues immédiats est excellente. Cependant, même si elles ont payées, je ne compte pas mes heures, j'ai ma « laisse électronique » (pagette, cellulaire, accès à distance, etc.) en permanence avec moi. C'est parfois assez usant surtout lorsqu'on essaie d'avoir également une vie de famille. J'espère pouvoir un jour me faire embaucher comme « col bleu » à la Ville de Montréal afin de pouvoir enfin me reposer... Du fait de départs successifs dans l'équipe, mes responsabilités se sont considérablement accrues. Mon salaire, lui, a juste suivi l'inflation. Ici, comme en Europe, il paraît que la « fidélité » à un employeur ne paie pas et qu'on accroit jamais autant son salaire qu'en changeant d'employeur.
Un point important : même si on fait miroiter à qui veut bien l'entendre que le Québec est une province francophone, dans les faits, pour trouver un bon travail à Montréal, il est indispensable d'avoir un assez bon niveau d'anglais. A toutes les entrevues que nous avons passé, nous avons eu droit à un « how's your english? » et une partie de l'entrevue en anglais. Cela se comprend assez aisément : bon nombres de clients et de fournisseurs sont soit au Canada Anglais soit aux États-Unis. Mais il vaut mieux avoir conscience de cela avant de venir.
Social :
De ce point de vue, ma perception n'est pas exactement celle que peut avoir un immigrant « normal ». Je suis marié à une québécoise, je connais donc pas mal de gens par son entremise. Cependant, je suis forcé de constater que même si j'ai de très bonnes relations avec mes collègues de travail et les gens qui fréquentent la même école d'ébénisterie que moi, cela n'a en pas encore fait des « amis ». En dehors des 5 à 7 et des partys de Noël, nous ne voyons jamais en d'autres occasions. Mais, lorsque je pense aux amis que j'ai en France, ils datent tous de l'école ou des études supérieures, aucun n'est issu du milieu professionnel.
Nous n'avons absolument AUCUN contact avec nos banlieusards de voisins. Tout juste un hochement de tête en sortant les poubelles. Je pense que si notre maison brûlait, ils ne bougeraient même pas. Les « 450 » tout-confort sont ainsi paraît-il : individualistes jusqu'au bout de la thermopompe
Mais c'est sans doute mieux ainsi.
Qualité de Vie :
« Qualité de vie », c'est très vaste comme concept
En vivant sur la Côte d'Azur, nous étions gâtés au niveau « qualité de vie » : ski, alpinisme, plongée, bronzette sur la plage, soirées en boîte. Sur ce plan là, en Montérégie, c'est la dégringolade. Platitude à perte de vue, centres d'achat à l'américaine
C'est très déprimant...
Au niveau « stress », là, le Québec sort gagnant : les gens sont globalement plus « cools » dans la vie et au volant. Même si cela n'empêche pas parfois de croiser un excité au volant de sa Honda Civic ou de son F-150 et qui se pense sur « sa » route.
Au niveau habitat, nous avons troqué un appartement 3 pièces dans une petite résidence à environ 20 kms des rivages de la Méditerranée contre une maison en banlieue de Montréal avec garage, piscine, grand terrain et tondeuses-souffleuses à neige tout autour.
Cela dépend bien sûr des goûts mais, je pense que je ne me ferais jamais à cette ambiance de « banlieue à l'américaine ». Le week-end, le bon banlieusard se doit d'astiquer son auto de fond en comble, de passer sa tondeuse à moteur Honda et jantes alliage, d'arroser sa pelouse et son entrée en asphalte à grandes eaux et de faire chauffer son BBQ à $700 et 350 000 BTU en buvant de la bière insipide.
Climat :
Ce qu'il y a de bien au Québec c'est qu'il y a réellement 4 saisons marquées : Été étouffant, Automne flamboyant, Hiver polaire (de moins en moins froid cependant) et Printemps bourgeonnant. Le seul petit problème, c'est que la répartition est assez mal faite : l'hiver dure ainsi environ 6 mois. Là aussi, il vaut mieux en avoir conscience avant de venir car cela peut sembler très long !!!! C'est aussi toute une adaptation pour tout bipède qui se respecte : gougounes, botte en caoutchouc pour la pluie, la boue et la sloche, crampons à glace, etc.
Familial :
Aucun problème pour moi de se côté-là : avec Skype, Messenger et toute la clique, au bout d'un moment on ne sait même plus quoi se dire ! Pour mes parents, c'est un petit peu plus dur, surtout depuis la naissance de leur première petite fille à 6500 kms d'eux. Chaque année, on prend nos vacances en France et on en profite pour faire le tour de la famille et des amis. Mais au bout de 2 à 3 semaines, on est quand même bien contents de rentrer chez nous.
Services :
Autant il est très bon dans les commerces où il est digne du service à la « Nord-Américaine » (jamais aucun problème pour ramener un article ne donnant pas entière satisfaction et être remboursé sur le champ), autant pour le reste des services publics, c'est assez désastreux. Alors qu'on est autant taxés qu'en France (sinon plus), le moins que l'on puisse dire c'est qu'on en a pas pour notre argent.
L'État des routes, même au centre ville de Montréal sur la rue Sherbrooke, est lamentable : les nids de poule voire d'autruches ne se comptent plus, et ce, malgré, l'ardeur au travail légendaire des cols bleus syndiqués qui travaillent tout de même une bonne heure par jour ! Bien sûr, les autoroutes sont gratuites mais je vous assure que les jantes ovalisées, les suspensions cassées, les crevaisons, au bout d'un moment cela revient cher également...
Depuis que nous sommes ici, la seule occasion où nous avons eu affaire au système de santé Québécois, a été pour le suivi de grossesse et l'accouchement de ma conjointe. Lors du suivi prénatal à l'hôpital Charles Lemoyne sur la Rive Sud, ils se sont trompés de patiente lors de l'analyse des échantillons sanguins en diagnostiquant un problème qui n'existait pas. Nous avons donc changé d'hôpital. L'accouchement à l'hôpital Pierre Boucher, toujours sur la Rive Sud, s'est très bien passé, le personnel était très qualifié mais le manque de moyen était criant : rien à manger suite à l'accouchement (nous avons fait livrer une pizza à 1 heure du mat à l'hôpital, vive le service à l'Américaine
), chambre délabrée datant des années 70 avec murs croutés et crucifix, nourriture infecte pour tous les repas En revanche, le tarif de la chambre était à la hauteur : près de $200 par jour qui ont été pris en charge par mon assurance privée. Avis à ceux qui n'en auront pas en arrivant.
Lorsque je suis retourné au service comptabilité, là, j'ai eu l'impression de me retrouver dans les « Invasions Barbares ». Les lits de patients (pas de gens en train d'attendre leur tour pendant des heures aux urgences hein
) encombraient le couloir. C'était très gênant que de se retrouver dans leur intimité.
Bref, en cette période bénie de l'année où je suis en train de préparer nos 4 (!!!) rapports d'impôt (vous vous plaignez du fisc français, attendez donc d'être ici
), je me demande vraiment où passe tout cet argent.
Perspectives d'avenir :
Pour l'instant, nous sommes ici et nous sommes plutôt heureux
Si un jour cela ne fait plus notre affaire, et bien, il sera l'heure de partir ailleurs comme nous l'avons déjà fait depuis la France.
Mais, ne nous voilons pas la face : la France
le Québec
les 2 pays ont leurs avantages et leurs inconvénients. Avant de venir ici, renseignez-vous bien en diversifiant les sources et prévoyez un bon coussin financier car sans emploi, les économies filent très vite... Et il vaut mieux être conscient de cela avant de se retrouver ici, le cul dans la neige...
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Le Québec en 10 certitudes.
Voilà maintenant 5 ans que nous sommes arrivés, très exactement 5 ans et 2 jours pour être plus précis.
Faire un bilan c'est résumer, résumer c'est extraire la matière principale dont sont faites toutes les choses et ce n'est pas facile lorsqu'il s'agit de sa propre expérience, l'objectivité n'est généralement pas au rendez-vous alors allons-y donc :
Première certitude, nous ne finirons pas notre vie ici, malgré un cadre de vie très agréable, certaines façons de faire, l'approche très superficielle des problèmes majeurs, le manque de rigueur à tous les niveaux nous pèsent ou devrais-je dire me pèse de plus en plus, nous sommes au pays de « Jacques a dit » et lorsque Jacques ne l'a pas dit alors il n'y a rien à dire ou à faire, il faut se contenter de ce qui est offert, baisser la tête et tenter de s'arranger pour trouver une alternative et ceci est d'autant plus vrai qu'on est Français.
Deuxième certitude, la famille nous manque également de plus en plus, nous n'avions pas suffisamment juger l'importance du besoin de retrouver ceux qui nous sont chers et qui vieillissent tranquillement, qui grandissent trop rapidement et qui changent radicalement, les coûts de voyage pour une famille de 5 personnes ne se comparent malheureusement pas à un plein et à un péage d'autoroute même si ces derniers ont largement augmenté au cours des 5 dernières années.
Rentrer en France pour les vacances est un sacrifice qui vous déstabilise un budget pour l'année suivante et il est ensuite difficile de continuer à vivre sereinement et d'avoir des projets en sachant qu'une bonne part des économies partira en fumée de kérosène !!!
Troisième certitude, le climat viendra à bout de mon optimisme, si nous restons trop longtemps.
Cet hiver qui traîne en longueur ne me fera plus rire d'ici quelques années et j'essaierai de partir avant qu'il ne me fasse pleurer.
Quatrième certitude, la précarité est un élément non pris en compte et qui ne peut pas l'être d'ailleurs au moment où l'on s'installe, on s'imagine que la courte période nécessaire à la découverte et à l'installation est bien un mal nécessaire mais il est plus profond, tout ici me semble précaire pour ne pas dire bancal, je n'aborderais pas le système de santé qui à lui seul pourrait nous donner l'image de l'organisation et de la gabegie qui règne dans cette province.
Précarité également dans le monde du travail, interprétation unilatérale des conventions collectives, décision de licenciement arbitraire, vision à trop court terme des investissements humains et financiers, nous ne sommes pas ici au pays du développement durable à part peut-être dans la gestion du commerce du café
Cinquième certitude qui pourra sembler contradictoire avec les précédentes mais mes enfants sont épanouis, je les sens moins exposés à l'insécurité qui régnait dans la région parisienne lorsque nous y habitions, plus ouverts et moins contraints à entrer dans un moule, est-ce le résultat d'une moins grande exigence du système, c'est possible mais ils y trouvent leur compte n'est- ce pas là l'essentiel.
Sixième certitude, si je devais partir demain ce n'est pas en région parisienne que je rentrerais et j'en suis même à me demander si je remets les pieds en France métropolitaine ou alors loin des villes, loin de toute cette agitation qui ne génère que stress et confusion, c'est bien connu, pour vivre heureux vivons cachés.
Septième certitude, j'ai beaucoup appris ici par la force des choses, j'ai compris que si tu n'y es pas né tu ne pourras jamais revendiquer le statut de citoyen mais cette vérité s'applique également en France, j'ai compris la difficulté d'un étranger de se réaliser dans un pays qui n'est pas le sien, j'ai appris à cultiver ma différence car la nier n'apporte rien et si je devais rentrer en France j'en tirerais la leçon dans mon regard au quotidien.
Huitième certitude, j'ai rencontré ici des gens que je n'aurai jamais eu l'occasion de fréquenter en France, la plupart sont devenus des amis, certains n'ont fait que passer, d'autres m'ont profondément déçu mais tous m'ont permis de mieux comprendre et d'aller chercher au fond de moi-même ces motivations qui nous font partir en espérant trouver mieux ailleurs même si le résultat n'est pas toujours à la hauteur de nos espérances.
Neuvième certitude, lorsqu'on vient en famille et qu'on désire absolument s'installer définitivement, on se retrouve être une génération sacrifiée, celle du défrichage, du labour et de la semence, la récolte profitera à nos enfants s'ils souhaitent rester.
J'ai défriché, j'ai commencé à labourer mais je ne me sens pas aujourd'hui capable de lancer ces graines qui un jour produiront le bonheur, je veux voir le résultat des mes efforts et l'attente de la récolte me paraît bien longue, en conséquence nous plantons des annuelles à défaut de vivaces, le résultat est moins spectaculaire mais bien plus rapide, nous nous sommes mis au diapason
Dixième certitude, il reste énormément de travail à faire dans le cadre de l'immigration et de l'accompagnement des nouveaux arrivants, je m'y suis essayé et c'est un constat de semi-échec, les préoccupations quotidiennes de chacun, les critiques acerbes, la mauvaise foi ont miné les bonnes volontés et c'est avec beaucoup de regret que je fais ce constat mais j'ai entendu dire qu'iC était à vendre alors pourquoi ne pas profiter de l'occasion et ainsi remodeler cet outil qui nous as permis de nous rencontrer et d'en faire ce formidable espace de discussions et de rencontres.
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Précédent bilan:
Nous sommes arrivés en octobre 2000, avec des projets pleins la tête. Des amis nous attendaient, l'histoire a tourné court car au bout de 10 jours, ils nous avaient "plumé".
Nous sommes donc partis à l'aventure dans notre petite voiture de location, moi, ma femme enceinte de 6 mois et mes deux autres enfants. Direction Montréal avec l'adresse d'une vague cousine installée ici depuis 1952 !!!
Après avoir tourné un bon moment, nous avons finalement trouvé, sonné, nous sommes entrés et nous en sommes ressortis 1 an 1/2 plus tard.
Pendant cette période, nous avons travaillé fort (6 mois) sur la réalisation de notre projet, l'ouverture d'une auberge. Tout était réglé, ne manquait qu'un misérable petit prêt afin de créer le fond de roulement et les quelques investissements nécessaires pour démarrer l'activité. C'était sans compter sur la mauvaise foi des banquiers, en particulier à cette époque où notre ami Bush a pris les commandes des USA.
Nous avons donc sabordé le projet, et nous nous sommes remis en question, suivi une grosse déprime, un éventuel retour en France. A l'été 2001, ma femme et les enfants sont rentrés en France, moi ici à chercher du travail, pas facile, même très difficile, persévérant sans trop y croire, j'ai fini par décrocher le bon plan. Ma femme et les enfants sont revenus, le moral était revenu au beau fixe.
Nous avons pu acheter une maison et avoir enfin un "chez nous". Depuis des hauts et des bas, toujours en rapport avec mon activité, en effet les produits que je fabrique (et dont je ne ferais pas la publicité) sont une des cibles privilégiées des gouvernements pour remplir les caisses et combler les déficits. Malgré tout ce la, nos enfants sont heureux et nous nous construisons au jour le jour, mais ici tout nous semble très fragile. Ce qui nous manque le plus c'est certainement la famille, les amis.
Notre rêve serait de voir se construire une communauté française, à l'image des italiens et asiatiques, qui dans l'expression de sa différence amènerait aux autres toute sa richesse.