Premier bilan

Bonjour à toutes et à tous.
Ca faisait un petit moment que je n'étais pas venu sur le blog et je constate avec plaisir qu'il est vivant et animé.
Cela fait cinq mois que je suis ici  et je crois pouvoir faire un premier bilan.
Je suis enseignant à Nouméa, avec un contrat de deux ans renouvelable une fois. Les conditions matérielles sont bonnes pour les profs, je ne dis pas ça par provocation mais car ça facilite grandement les choses.
J'ai cherché un logement dès mon arrivée  et Nouméa m'a déplus. J'ai perçu Nouméa comme une ville balnéaire bruyante, polluée et un peu « m'as-tu vu ». 
Je me suis donc installé en gite à la coulée sur la commune de mont dore. J'ai mis quatre mois avant de trouver le logement qui me convient. J'habite maintenant une  maison à la coulée, avec des arbres magnifiques et des perruches qui passent le soir (quand il fait beau).
En arrivant ici, j'ai été frappé par le clivage qui existe entre les différentes ethnies et par la difficulté de tisser des liens avec les kanaks. Ou même avec les calédoniens. J'ai rencontré à mon arrivé un couple très sympa. Ils m'ont clairement fait comprendre qu'ils ne souhaitaient pas entretenir des relations trop proches avec les zoreilles car ils ont été trop déçus par des gens qui n'étaient finalement que de passage. J'ai moi-même sympathisé avec des métros qui sont déjà partis.
J'ai fait au mieux pour aller vers les autres et j'ai eu la chance de rencontrer une personne d'Ouvéa qui m'a invité et fait découvrir des aspects de la culture locale que je n'aurais sans doute jamais approché. La coutume bien sûr, la cuisine, les poissons qu'on peut manger, les fruits, les plantes et les fêtes. Et aussi certains nakamals que je n'aurai pas fréquenté seul.
Pour la fête et l'alcool les kanaks sont sans retenue et j'ai entendu dire que ça peut déraper à certaines heures tardives. Perso, je n'ai jamais eu de problème mais j'étais toujours accompagné de mon pote d'ouvéa. J'aime les soirées arrosées mais j'avoue que je suis un petit joueur par rapport à certaines soirées en tribu. Je ne me sentais pas toujours à l'aise dans cette ambiance très alcoolisée mais quel accueil et quelles rencontres inoubliables.
Les jours et les semaines ont passé. Le boulot qui va plutôt bien, les sorties, le centre tjibaou, les grillades avec les potes quand il fait beau. Ce qui est plutôt rare en ce moment….
Je perçois moins le clivage que je ressentais en arrivant. Je me sens peut être mieux intégré à cette population bigarrée.
Je suis un peu isolé dans ma cambrousse mais la présence des margouillats me rassure. Je peux contempler la nature sur la terrasse en écoutant un peu de zic et planter un bananier ou un ananas de temps en temps.
Pour l'instant, je n'ai que de bonnes nouvelles de ma famille et de mes amis en métropole. A ce qu'on m'a dit, c'est très dur lorsqu'il y a un évènement grave chez les proches et qu'on est absent.
Je suis à 20mn de Nouméa dans la journée et une heure le matin dans les bouchons pour aller au boulot quand tout va bien. Ça c'est un peu galère mais c'est un choix de me retrouver dans une ambiance paisible quand je rentre chez moi.

Je viens de voir en me relisant que j'ai écrit « chez moi », ce n'est pas anodin. Vous aurez deviné que mon premier bilan est plutôt positif même si tout n'est pas rose et facile.

Mon amie vient au mois d'aout, pour ses vacances car elle a pas mal de choses personnelles à régler et sans doute aussi pour voir comment ça se passe ici.
On a tout les deux plus de 50 ans et ce n'est pas facile de tout lâcher même pour un temps.
C'est aussi une chance extraordinaire et je ne regrette rien, bien au contraire j'ai l'impression d'avoir 30 ans physiquement et mentalement.
La Calédonie vous rajeunie ?

Merci Ukulele pour ton bilan.
Tu écris souvent "quand il fait beau", la NC serait-elle en manque de soleil? :cool:

j'ai souvent lu cette "distance" des calédoniens (autochtones ou pas) par rapport aux zoreilles et j'avoue que ça m'interroge: on trouve partout des gens peu intéressants ou qui nous déçoivent, ce n'est pas spécifique à la Calédo. mais on retrouve ça un peu partout, dès lors qu'on s'expatrie non?
et dans les DOM-TOM (oui cette appellation me vient plus vite, rien de péjoratif :)) il y a pas mal de fonctionnaires ou de personnels expatriés par leur boulot (public ou privé) et donc qui ne restent pas plus d'un certain temps, pourquoi semble-t-il impossible ou inutile de lier des amitiés avec eux (en dehors des cas précedents: personnes inintéressantes ou pas d'atomes crochus)?

nous avons déménagé souvent en métropole, nos enfants avec nous évidemment et à chaque fois nous avons noué des liens. certaines amitiés ont tenu bon, d'autres pas, c'est ainsi et je ne me priverais pas en me disant que "ceux-là vont repartir" si par ailleurs ce sont des gens que j'apprécie.......

ce sont les liens que l'on créé, qu'ils soient solides ou plus lâches qui nous enrichissent aussi et "refuser" de se lier d'amitié me semble se fermer à beaucoup d'échanges, de richesses aussi, un peu comme refuser d'apprendre de l'autre. j'aime beaucoup discuter, échanger avec les gens, connaître leur vie, expliquer la mienne, rire, faire des choses ensemble; le tout sans arrière pensée à me demander si je les verrais encore dans 1 an ou dans 10, peu importe, ce seront des moments agréables partagés, un bout de chemin fait ensemble. et même si le contact est rompu parfois, je repense de temps en temps à des gens perdus de vue, ainsi va la vie, je n'ai pas d'amertume par rapport à ça :)

mais peut-être y a-t-il des explications auxquelles je ne pense pas, des spécificités locales, alors si quelqu'un veut bien essayer d'expliquer ça, je serais heureuse d'avoir d'autres points de vue, d'autres pistes ;)

Effectivement, la question mérite d'être posée. Quant aux explications, je pense qu'on ne pourra trouver que des hypothèses.
D'une façon générale, je pense déjà que les relations se créent parce qu'on retrouve dans l'autre quelque chose qui nous ressemble (même âge, même position sociale, même passe temps etc). Il n'y a qu'à lire simplement les réactions ici sur ce forum des qu'on s'aperçoit que l'autre vient de la même région. Il y a même des demandes directes  du type : est-ce qu'il y a des Charentais sur place?.
Bref, du classique.
Ici, je pense qu'il faut ajouter quelques données particulières. Une histoire douloureuse assez récente, des inégalités sociales importantes, des injustices sociales, le sentiment que la France est au bord de la faillite et  la peur de voir débarquer des zoreilles qui viennent piquer le boulot des calédoniens, le sentiment que les fonctionnaires d'état ne viennent faire un séjour ici uniquement pour s'en mettre plein les poches etc... Ça peut donner des jalousies, des peurs chez certains.
A côté de ça, j'ai rarement vu un endroit où les gens étaient si chaleureux, accueillants, souriants. Même si ça va rester superficiel, même si c'est juste le temps d'une rencontre, ça fait du bien ! Ensuite, on fait des vraies rencontres inoubliables pour peu qu'on montre notre ouverture d'esprit.
Au boulot, c'est clair qu'on a plutôt intérêt au début à se la jouer discret. on est tenté de se dire, il faut que je leur montre qu'ils ont bien fait de m'embaucher. Erreur !  tu passes pour le zoreille de base qui pense qu'il sait mieux que tout le monde. Là, je pense que c'est une vraie spécificité locale et si j'ai un conseil à donner, c'est bien celui la. Au début, on observe, on reste discret.

D'ailleurs, il faut que j'y aille au boulot ! Alors bonne journée à tous

Jurassiens a écrit:

Merci Ukulele pour ton bilan.
Tu écris souvent "quand il fait beau", la NC serait-elle en manque de soleil? :cool:


bonjour,
Il pleut pas mal en hiver et surtout en ce moment à cause d'une dépression proche de l'ile.On me dit que c'est une année exceptionnellement pluvieuse.
Mais on a quand même de belles journées de temps en temps et on est comme un été de métropole dès que le soleil brille.
bruno

Merci pour ce bilan, en ce qui concerne les rencontres, il est très difficile de voir partir ceux qu'on aime, du coup on se protège comme on peut.. certain en ne liant pas de liens trop fort, je ne pense pas qu'on puisse le leur reprocher…  ce qui n'est pas le cas des gens d'Expat.com qui eux sont super ouverts :P

mouquich a écrit:

Est-ce qu'il y a des Charentais sur place?.


Ah bah justement, parlons en!
Y en a, au moins, un et avez vous vu cette monstruosité (je ne parle pas du charentais mais de ce qui suit!)?!

Hymne de la Charente Maritime

Dernière phrase sur ce sujet:

C'est ignoble mais j'ai bien ri même si je me demande comment des personnes peuvent créer de pareilles choses!


Pour ce qui est des relations amicales... C'est un sujet un peu récurrent. Je me pose la même question, ainsi que tous mes potes et amis dans le coin... Et il est vrai que je ne suis ami qu'avec un seul calédonien, mais ce qu'il est fun! Point trop n'en faut! hu hu

Bonne journée à tous (et toutes!!!!) !

voilà, comme l'a dit si justement Mouquich, c'est ce contraste entre d'un côté la "chaleur" des calédoniens et de l'autre ce "refus" de l'attachement qui m'interroge. je ne suis pas encore sur place donc difficile de se faire une idée plus réaliste, mais je trouve ça étonnant. peut-être aussi parce que j'ai pas mal bougé et vécu dans 2 pays différents?

je ne sais pas si c'est lié à la situation actuelle de la France, (risque de "faillite"?) j'ai l'impression que c'est plus ancien que ça..........

Je suis un peu isolé dans ma cambrousse mais la présence des margouillats me rassure.


:top:

eolo a écrit:

mais peut-être y a-t-il des explications auxquelles je ne pense pas, des spécificités locales, alors si quelqu'un veut bien essayer d'expliquer ça, je serais heureuse d'avoir d'autres points de vue, d'autres pistes ;)


Peut être la distance. quand on rencontre des gens en métropole, on sait qu'on est toujours plus ou moins pas très loin. Quelques heures de voiture ou de TGV au plus. Ici, on peut faire des rencontres avec des gens qu'on ne reverra peut être jamais.

Ceci dit, je ne suis là que depuis cinq mois et j'avais beaucoup d'attente et de préjugés en arrivant.
La question des rencontre mérite sûrement plus de recul et plus de temps.

...

je crois aussi que les gens ne veulent pas cultiver de relations avec les expats car ils se projettent dans un avenir (proche ou lointain, le départ de l'expat) au lieu de profiter de l'instant présent...en occultant ainsi ce que pourrait lui apporter l'expat, (non, les expats ne sont pas tous mauvais !! :P )...

On a quand même vraiment l'impression que ce pays se sclérose...notamment avec son modèle économique hyper protectionniste.
Une preuve ? après 48h de déluge la semaine dernière, les pénuries de fruits et légumes s'installent dans les magasins....en attendant que les autorités ouvrent les vannes de l'importation...

Vous noterez le "OU NON" dans l'article..au sujet d'ouvrir les vannes de l'importation...

http://www.lnc.nc/article/pays/la-pluie … r-les-prix

Concernant les zoreilles, je pense aussi que les choses évolue. Auparavant, l'"expat" c'était le haut-fonctionnaire, le cadre qui venait ici avec un package et un bon salaire. C'est quand même moins le cas aujourd'hui et j'ai justement l'impression que le zoreille se situe un peu entre les différentes communautés Calédoniennes, qui elles s'ignorent globalement il faut le dire.
Pour ma part il serai difficile de parler d'Henri IV ou de couvert en argent, j'ai grandi dans un quartier populaire et fait mes classes en ZEP. Quand à la mixité, elle était tout aussi présente dans le quartier où j'ai grandis. Mes amis d'enfance sont d'origine africaine, magrhébines et j'ai encore des contacts très fort avec eux...

En tout cas je ne suis pas spécialement surpris non plus que les liens mettent du temps à se mettre en place. C'est le cas partout et je dois rappeler que la France n'est pas spécialement un pays accueillant pour les étrangers non plus. Se constituer un réseau de connaissance prend du temps.
En tout cas je n'ai jamais eu de soucis ici avec les océaniens que je trouve parfois distant au premiers abords mais toujours liant et sympathique une fois la confiance installé.

Merci à vous pour cette rubrique fort instructive.

J'en garde 2 éléments qui me paraissent essentiels : Discrétion et humilité... Clé de voûte pour aller à la rencontre de l'autre, mais pas seulement, une attitude générale qui vaut pour la vie de tous les jours...

un sourire ouvre beaucoup de portes...

Bonjour Ukulele,

Mon ami et moi avons aussi plus de 50 ans. Comme je te rejoints quand tu dis que c'est une nouvelle jeunesse. C'est ce que nous ressentant.

Reconstruire ailleurs, c'est carrément génial. Des nouveaux projets et en nouvelle calédonie, tout est possible. Nous avons plein de projets comme à 25 ans. C'est un renouveau avec le bon sens de la 50aine.

Ce n'est plus une dernière portion de vie, c'est enfin le début de notre vie.

Nous avons choisi la brousse ou c'est le boulot qui nous a guidé mais la aussi, c'est plutot bien (au début, je trouvais mort).

Voilà mon témoignage pour te dire que je comprends plutôt bien ce que tu vis.

Bonjour,

Je suis une caldoche ratée selon eux. 25 ans de métropole et une éducation à la française après une vie sur les propriétés calédoniennes à la calédonienne. Pendant des décennies, le clivage métro-caldoche étaient casi total. L'histoire est là et pas si loin derrière. La population est très métissée mais surtout un métissage océanien. Nous sommes presque tous descendant de bagnards (pas les mélanésiens bien sûre) et les fonctionnaires étaient hautains. L'écart social était énorme. Donc, le caldoche ne s'alliait pas avec le fonctionnaire et ça a suivit. A ça vous rajoutez une vie isolé sur de grande propriété, ça n'aide pas. Tout le monde se connait ici. Je parle des gens du pays. Qu'on me voye, qu'on entende mon nom et l'on me sort tout ma généalogie, ceux qu'on connaît, où ils travaillent ect. C'est une île et dans les îles, on est prudent voire imperméable. On ne se dévoile pas sinon la prochaine génération parlera encore de votre état d'âme du moment. Cet air fermé est un réflexe, c'est collé maintenant. A Nouméa, les choses évolues doucement...