Projet de surveillance des réseaux sociaux : De quoi s’agit-il ?

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Publié le 2021-04-23 à 07:00
La nouvelle fait rage sur les réseaux sociaux. La semaine dernière, l'Information and Communication Technologies Authority (autorité en charge des TIC) a fait circuler un consultation paper sur un projet de surveillance des réseaux sociaux. Qu'est-ce que cela signifie pour l'internaute à Maurice ?

Le 14 avril dernier, le régulateur du secteur des TIC à Maurice, l'Information and Communication Technologies Authority (ICTA), a publié un document de consultation public sur un projet de surveillance des réseaux sociaux. Objectif : lutter contre la mauvaise utilisation des réseaux sociaux, selon l'instance régulatrice. Il s'agira, donc, de surveiller et de pouvoir censurer les publications qui poseraient problème.

Comment cela marcherait ?

Selon la proposition de l'ICTA, les contenus ne seraient plus encryptés. Le système mis en place pourrait donc décrypter le contenu et l'analyser, le censurer et le stocker pour une durée indéterminée. L'ICTA pourrait même, dans cette optique, être capable d'effacer des comptes ou des pages et les bloquer.

L'instance régulatrice propose dans le papier de consultation qu'un National Digital Ethics Committee (NDEC) soit mis en place pour analyser les contenus et qu'une Technical Enfordement Unit s'attèle à la suppression ou au blocage de contenu dans des cas précis, bien qu'il n'existe pas encore de définition des cas qui pourraient être problématiques.

Plus important encore, si ce projet va de l'avant, les ordinateurs, téléphones portables et tablettes devront obtenir un certificat digital qui permettra l'identification de l'adresse IP et donc, de l'utilisateur. 

Dans un communiqué émis par l'ICTA le 19 avril 2021, l'instance précise que les services de messageries ne seront pas concernés par ce changement. Les messages échangés via WhatsApp, Messenger ou encore Telegram resteront, donc, encryptés.

Pourquoi ce projet provoque-t-il la polémique ?

L'annonce de ce projet a soulevé une vague de mécontentement sur les réseaux sociaux et dans les médias de l'île. D'ailleurs, une pétition a même été lancée sur la plateforme Change.Org intitulée « Reject the Proposed Amendments to the ICA Act dated 14/04/2021 ». Au 23 avril, elle avait recueilli plus de 20 000 signatures. La principale inquiétude : le contrôle de la liberté d'expression. 

Ariel Saramandi, auteur mauricienne qui a lancé cette pétition s'inquiète des répercussions d'un tel projet sur la démocratie mauricienne. « Nous pensons que cette proposition va restreindre la liberté d'expression des résidents de l'île Maurice et sera une menace au droit à l'information des citoyens mauriciens. Et ces droits sont fondamentaux à une démocratie. Nous pensons que les modifications proposées comportent des préjugés inhérents au fonctionnement du système des TIC. Qu'il soit humain (dans le Comité national d'éthique numérique proposé) ou IA, le système qui surveillera, signalera et supprimera les informations partagées par les utilisateurs souffrira nécessairement de préjugés conscients ou inconscients. Ces biais seront soit intégrés à l'algorithme lui-même, soit affligeront ceux qui font fonctionner le système. Même si le Département des TIC peut avoir les meilleures intentions du monde, l'existence de ce système de réglementation préventive laisse la porte ouverte aux abus et à l'élaboration de programmes par ceux qui contrôlent le système. Un outil de cette ampleur pourrait très bien conduire à l'effondrement de la liberté d'expression et d'information mauricienne ».

Ce projet deviendra-t-il réalité ?

Pour le moment, ce n'est qu'une proposition faite par l'ICTA. L'instance régulatrice attend, d'ailleurs, la contribution et les propositions du public pour décider de la mise en œuvre du projet. C'est à l'adresse [email protected] que les correspondances doivent être envoyées. Il n'empêche que l'ultime décision reviendra au parlement mauricien.