Travail à distance : le rappel à l'ordre des conservateurs britanniques
Fonctionnaires travaillant depuis la plage. L'affaire fait bondir les députés conservateurs britanniques depuis fin 2023. Les regards se tournent vers le Département de la sécurité énergétique, qui a autorisé le travail à distance. Décision prise à la suite du coup de pression des syndicats, pour permettre un travail « occasionnel » des fonctionnaires lorsqu'ils sont à l'étranger.
Il faut remonter à 2020 pour voir les premiers grands changements d'organisation de l'historique Whitehall, le centre administratif du gouvernement britannique. Pour assurer la continuité des services durant la pandémie, l'administration britannique assouplit ses règles en matière de travail à distance et d'informatique. La pandémie est passée, les assouplissements sont restés. Hors de question, pour les syndicats, de revenir en arrière. Ils militent au contraire pour que les fonctionnaires ayant des attaches avec les pays étrangers puissent travailler depuis ces pays de manière occasionnelle. Refus catégorique des conservateurs.
Mais l'exécutif se montre plus conciliant. Il propose un travail à l'étranger de manière « exceptionnelle » et seulement si le travailleur peut légalement le faire. Il ne pourrait partir que pour visiter sa famille ou des proches à l'étranger, et serait limité à 2 semaines de travail maximum par an. Tollé des conservateurs pour qui l'on ne peut mélanger vacances et travail. Ils avancent les problèmes de sécurité informatique. Ils insistent surtout sur des largesses qui gaspillent l'argent du contribuable, et rappellent le gouvernement à l'ordre. La place des fonctionnaires est sur le lieu de travail au Royaume-Uni, pas au bout du monde. Message entendu par l'exécutif. Il rappelle que les fonctionnaires ont l'interdiction de travailler à distance, sauf circonstances exceptionnelles.
Travail à distance : les métiers adaptés et les autres
Si certaines entreprises appelant au retour dans le bureau, le travail à distance a encore de beaux jours devant lui. Il s'est inscrit dans l'organisation du travail depuis la Covid, et n'est pas près de partir. Les entreprises s'adaptent. Des métiers jusque-là pensés pour le présentiel s'adaptent au travail à distance.
Les métiers adaptés au travail à distance
On pense d'emblée à tous les métiers du numérique, et aux postes ne nécessitant qu'un ordinateur et une connexion Internet. Les nomades numériques ne s'y sont pas trompés : community manager, développer, graphiste, référenceur SEO, consultant SEO, rédacteur web, journaliste, traducteur, webmaster, chargé de marketing, courtier, coach, directeur artistique, photographe… De nombreux métiers sont adaptés au travail à distance.
D'autres professions, traditionnellement exercées en entreprise, s'ouvrent au distanciel : téléconseiller, télévendeur, secrétaire, assistant juridique, avocat, comptable, ou encore enseignant. Le travail à distance peut être occasionnel, à temps partiel ou à plein temps. Il nécessite une nouvelle organisation des entreprises, surtout pour les salariés télétravaillant à l'étranger.
Les professions incompatibles avec le travail à distance
Le travail à distance a beau percer, il ne convient pas à tous les métiers. Certains postes nécessitent de fait une présence sur le lieu de travail. Certaines professions sont incompatibles avec le travail à distance. On voit mal un chauffeur de taxi exercer depuis son domicile. Même raisonnement pour les personnels soignants, les pilotes d'avion, les conducteurs de bus ou de train, les agents BTP, les archéologues, les pompiers, les chauffagistes, les agriculteurs, les cheminots, les coiffeurs, les serveurs, les cuisiniers, les maîtres nageurs, les fonctionnaires… La liste des métiers non adaptés au travail à distance est longue. On peut répertorier plusieurs grands groupes de professions incompatibles ou difficilement compatibles avec le travail à distance, pour des raisons diverses.
Protection des données
En pointant du doigt l'attitude des fonctionnaires travaillant « depuis la plage », les conservateurs britanniques rappellent notamment l'importance de la préservation des données. À l'heure où les hackers s'attaquent de plus en plus aux institutions, autoriser les fonctionnaires à se connecter depuis l'étranger représente une menace. Des informations sensibles peuvent fuiter ; l'attitude même des fonctionnaires pourrait être plus relâchée à l'étranger. D'autres professions, notamment celles stockant les informations personnelles des clients, requièrent la présence du travailleur, pour des raisons de sécurité.
Interactions
L'autre grand domaine de professions incompatibles avec le travail à distance regroupe tous les métiers où les interactions sont indispensables. Transport, plomberie, vente, agriculture, nettoyage, service à la personne, enseignement. Ce contact physique peut être techniquement indispensable (difficile d'être plombier à distance) mais aussi moralement indispensable. Par exemple, de plus en plus d'enseignes se mettent aux caisses automatiques, pour réduire la masse salariale tout en augmentant les bénéfices. Le contact avec les caissiers reste pourtant indispensable pour de nombreux clients. Plutôt que d'être seuls face à l'automate, ils préfèrent quelques minutes d'échanges avec les caissiers. Même raisonnement pour les enseignants. Malgré le boom des formations en ligne, il n'est pas possible de se passer de l'enseignement classique.
Déplacements fréquents
Autre grand groupe de métiers difficilement adaptables au travail à distance : les professions nécessitant des déplacements fréquents. Lors de la pandémie, de nombreuses agences immobilières se sont adaptées en proposant des visites virtuelles. Mais cette adaptation n'a pas transformé le métier d'agent immobilier. L'activité a vite repris son cours. Voir le bien immobilier est d'ailleurs l'un des premiers conseils donnés aux futurs acheteurs. Les commerciaux, les livreurs, doivent également effectuer de nombreux déplacements et/ou de longues distances. Ces métiers sont des métiers d'interactions avec les clients difficilement compatibles avec le travail à distance.
Vers un travail 100 % à distance ?
Le monde dématérialisé attendra. À rebours de la vision futuriste d'un monde de travailleurs à distance, on assiste plutôt à un retour vers les bureaux. Le tout dématérialisé à ses limites, et pas seulement pour des raisons techniques. La crise sanitaire a soulevé l'importance du lien social. Des salariés ont senti les effets pervers du « full remote », entre accumulations d'heures de travail et désengagement de l'entreprise.
Quel sens donner au lieu de travail ? Bien plus qu'un simple espace de production du travail, le bureau est aussi un lieu de vie et d'infractions sociales. Les employeurs l'ont bien compris. Pour faire revenir leurs salariés et attirer des talents, ils optent pour une voie médiane : un peu de travail à distance, et un grand réaménagement des locaux. Les bureaux tristes laissent la place à du mobilier plus vivant. Les plantes, espaces de repos, de détente et de jeu sont mises en valeurs. La préservation de la santé mentale devient une priorité. Les travailleurs sont davantage sollicités pour organiser leurs journées. Voilà peut-être les bases de l'entreprise de demain.
