Expatriation et médicaments : comment s'y prendre ?

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Publié le 2023-08-30 à 09:00 par Asaël Häzaq
Effectuer un long séjour à l'étranger lorsqu'on suit un traitement médical nécessite une bonne organisation. Liste des médicaments, durée du traitement, choix du médecin dans le pays d'expatriation… Comment obtenir ses médicaments lorsqu'on reste plus de 6 mois à l'étranger ? Que faire en cas de pénurie dans le pays d'accueil ? Comment adapter son traitement aux médicaments disponibles dans le pays étranger ?

Expatriation et médicaments : règles générales

Les règles établies ci-dessous sont données à titre général, et peuvent différer selon les pays. En théorie, une pharmacie ne peut vous délivrer vos médicaments que pour un mois, même si vous lui présentez une ordonnance de 6 mois (exception faite pour certains médicaments compartimentés en boîtes pour des traitements de 3 mois). Mais vous pouvez obtenir une dérogation en contactant votre médecin traitant et votre caisse d'assurance maladie.

Séjour de 1 à 3 mois

Pour un séjour de 1 à 3 mois, vous aurez besoin d'une attestation sur l'honneur et d'une ordonnance pour obtenir vos médicaments à titre dérogatoire. Votre ordonnance devra porter la mention « départ à l'étranger » et le nombre de mois de délivrance prévu. Préférez une ordonnance en Dénomination Commune Internationale (DCI) : la DCI est le nom scientifique du médicament. Il permettra aux praticiens étrangers de retrouver plus facilement vos produits.

C'est votre médecin qui devra préciser la durée de votre séjour sur votre ordonnance. Il mettra également son accord pour que la pharmacie vous délivre l'intégralité de votre traitement en une fois. L'attestation sur l'honneur est à remplir par vos soins. Elle précisera la durée de votre séjour ainsi que le nom de la pharmacie vous ayant délivré les médicaments. Cette attestation peut servir en cas de difficultés pour obtenir ou faire renouveler votre traitement dans votre pays d'accueil. Les séjours de 1 à 3 mois étant considérés comme de courts séjours, vous n'avez en théorie pas besoin d'obtenir une dérogation de la part de votre caisse d'assurance maladie. Mais tout dépend de votre pays. Il est possible qu'une autorisation de votre caisse d'assurance maladie soit exigée.

Séjour de 3 à 6 mois

Pour les séjours de 3 à 6 mois, vous devrez tout d'abord adresser une demande auprès de votre caisse d'assurance maladie, laquelle vous signifiera son accord ou son refus. En cas d'accord, vous pourrez vous rendre dans votre pharmacie muni de votre ordonnance (mentionnant toujours la durée du séjour). Contactez votre caisse en avance, pour éviter les mauvaises surprises et être sûr d'avoir la réponse de votre caisse d'assurance maladie à temps. Mais dans tous les cas, la délivrance de médicaments à titre dérogatoire ne peut dépasser les 6 mois.

Séjours plus longs à l'étranger

Il n'est techniquement pas possible d'emporter l'intégralité de son traitement pour une expatriation de plusieurs années. Pour les séjours excédent 6 mois, vous devrez trouver un médecin dans votre pays d'accueil. Informez votre médecin traitant actuel de votre projet. Il connaîtra peut-être des confrères dans votre pays d'expatriation. L'ambassade de votre pays peut également disposer d'une liste de médecins. Demandez à votre médecin traitant de prévoir une liste de médicaments alternatifs au cas où les vôtres ne se trouveraient pas dans le pays d'accueil (tout dépend de votre pays d'expatriation). Demandez-lui aussi un courrier explicatif vous concernant (antécédents médicaux, éventuelles allergies à certains médicaments…). Pensez à faire traduire son courrier dans la langue de votre pays d'expatriation et à vérifier avec lui la liste de tous les médicaments et produits d'urgence dont vous aurez besoin.

Attention : même pour un long séjour à l'étranger, certains médicaments ne peuvent être emportés. En effet, il existe des médicaments qui ne peuvent pas être délivrés plus d'un mois. Par exemple : les hypnotiques ou les stupéfiants, car leur durée de prescription est fixée par la loi du pays ; les antiviraux d'action directe (hépatite C), les médicaments qui nécessitent une surveillance particulière ou la réalisation d'examens particuliers. Les services douaniers du pays d'accueil peuvent exiger votre ordonnance médicale. Le contrôle augmentera d'un cran si vous transportez des médicaments classés comme psychotropes ou stupéfiants dans le pays d'accueil.

Quelles options en cas de pénurie de médicaments ?

Grèce, France, Allemagne, Espagne, Suisse… Des médicaments manquent régulièrement dans les stocks des pharmacies. La pénurie de médicaments continue de gagner du terrain en Europe. D'autres pays, comme les États-Unis, le Canada ou l'Australie, connaissent également des pénuries. Certains médicaments sont en rupture chronique, obligeant des patients à interrompre leur traitement plusieurs jours… avec des risques pour la santé. En France, par exemple, des médicaments du système cardiovasculaire ont subi des ruptures chroniques. Même chose pour les anti-infectieux, et même le paracétamol. Face à la crise, le président Macron a promis 200 millions d'euros d'investissement pour produire une cinquantaine de médicaments en France. En attendant que le projet sorte de terre, locaux et expatriés en France sont forcés de composer avec ce qu'il y a.

Si un ou plusieurs de vos médicaments sont en rupture, renseignez-vous tout d'abord pour déterminer l'origine de la pénurie. S'agit-il d'une rupture de stock chez le fabricant du médicament ou d'un manque d'approvisionnement de votre pharmacie ? Cette pénurie est-elle ponctuelle, chronique, ou durable ? Le second cas semble a priori plus simple à gérer, car il vous suffira d'aller dans une autre pharmacie. Le premier cas peut soulever plus de problèmes, surtout si le fabricant indique que la pénurie est chronique ou durable.

Trouver un médicament alternatif

Une première solution peut être de chercher un équivalent. Le pharmacien de votre pays d'accueil peut tout d'abord vous proposer un médicament équivalent. Pour cela, le pharmacien doit obtenir l'accord de votre médecin, car il doit tout d'abord s'assurer que le changement de médicament est possible. De plus, ce changement peut entraîner une modification de dose/de posologie.

Se faire livrer ses médicaments

Si possible, envisagez la livraison. Le transport de médicaments est soumis à des règles strictes. Les médicaments doivent vous parvenir et être viables. Le transport doit être assuré par une compagnie spécialisée dans ce domaine. Une ordonnance est obligatoire. Certains médicaments peuvent être envoyés sans restriction. D'autres, en revanche, sont soumis à des limitations ; d'autres encore sont interdits. Les restrictions peuvent dépendre du type de médicament, de la quantité transportée… Il faut aussi tenir compte des conditions de transport (certains médicaments doivent être transportés à une température spécifique).

Toutes ces réglementations rendent la livraison de médicaments délicate. Vérifiez que la société à laquelle vous faites appel livre dans votre pays d'accueil. Vérifiez également les possibilités d'effectuer un tel transport auprès des services douaniers de votre pays d'accueil. Attention : la société de transport peut exiger que vos médicaments soient tout d'abord remis à son adresse ; si vous avez des proches dans votre pays d'origine, ils pourront se charger de ces formalités.

L'autre option est, si possible, de rentrer vous-même dans votre pays d'origine pour renouveler votre stock de médicaments.

Adapter son traitement médical dans le pays d'accueil

Comment s'adapter lorsque les médicaments que l'on prend d'habitude ne sont pas disponibles dans le pays d'accueil ?

Tout d'abord, faites le point avec votre médecin avant le voyage. Quelle est la situation dans votre pays d'accueil ? Des médicaments sont-ils en pénurie ? La situation est-elle chronique ? Vos médicaments sont-ils menacés par les pénuries ? Est-il facile d'obtenir des médicaments ? Les pharmacies sont-elles accessibles ? Ces questions sont d'autant plus importantes pour les médicaments les plus essentiels pour vous.

Certains médicaments sont en effet difficilement remplaçables. Problème de molécule, d'ajustement de la posologie, d'allergie, d'efficacité… Ces paramètres sont à prendre en compte pour choisir votre pays d'expatriation. La question se pose différemment en cas de mutation à l'étranger, par exemple, ou si vous êtes conjoint suiveur. Vous n'avez pas forcément choisi le pays d'accueil et devrez composer avec ces nouvelles réalités. Il faut alors être sûr que votre pathologie est compatible avec le voyage, et que votre traitement pourra être adapté, ou que vous pourrez recevoir vos médicaments à l'étranger.

Avant le voyage, demandez à votre médecin des alternatives au cas où vos médicaments manqueraient dans le pays d'accueil. Faites traduire votre ordonnance dans la langue du pays d'expatriation et éventuellement en anglais. Sur place, cherchez un médecin de confiance qui pourra assurer votre suivi. Il pourra lui aussi adapter votre traitement en fonction des produits disponibles dans le pays. Vérifiez que vous pourrez vous rendre à la pharmacie facilement.

Dans tous les cas, redoublez d'organisation. Renseignez-vous sur votre pays d'accueil (affiliation à la caisse du pays étranger, remboursements, etc.). Une expatriation est toujours possible, même avec un long traitement médical.

Liens utiles :

Royaume-Uni : NHS – take medicine abroad

US : Centers for Disease Control and Prevention – traveling abroad with medicine

Japan : Ministry of Health, Labour and Welfare of Japan – bringing medicine for personal use

Netherlands : take medecine abroad

France : Voyager avec des médicaments

European Union : prescriptions abroad – expenses and reimbursements

Savoir si un médicament est disponible

US : drug shortages

European Medicines Agency : Public information on medicine shortage

Canada : pénuries de médicaments