Comment les expats affectent-ils les systèmes de santé dans le monde ?

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Publié le 2022-06-15 à 13:00 par Asaël Häzaq
Partout dans le monde, la Covid a révélé des systèmes de santé exsangues : dysfonctionnements organisationnels, manque d'infrastructures et de moyens humains, vieillissement de la population, crise des vocations, défis démographiques… Dans cette équation déjà complexe, les expatriés représentent-ils un coût supplémentaire, ou un avantage pour les pays d'accueil ?

Les expatriés pèsent-ils sur le système de soins de leur pays d'accueil ? L'exemple de Singapour et du Brésil

Les systèmes de soins à Singapour et à Hong Kong sont réputés pour leur qualité et leur modernité. Mais depuis la crise politico-sociale hongkongaise, rien ne va plus. Les Hongkongais sont de plus en plus nombreux à s'expatrier à Singapour. Singapour qui, pour répondre à la crise Covid, adopte des mesures controversées pour favoriser l'emploi et la couverture santé de ses citoyens et résidants. Près de 30% des expatriés seraient inéligibles au système de soins singapourien. Ces expatriés s'orientent vers les assurances privées, mais toutes ne couvrent pas Singapour. Le système de santé, lui, est sous tension, non pas à cause des expatriés, mais plutôt à cause de la crise sanitaire. Singapour vieillit, et la crise n'a fait que renforcer les tensions du milieu hospitalier.

Au Brésil, c'est plutôt portes ouvertes pour les expatriés. Depuis qu'il a créé son visa nomade numérique, le pays multiplie les appels à l'immigration. Et pour ne pas peser sur un système de soins déjà sous tension, le gouvernement brésilien table sur les assurances privées. Charge aux nouveaux arrivants d'avoir leur propre couverture santé. Car le système de soins brésiliens est à deux vitesses. D'un côté, le public, qui propose des soins gratuits pour les Brésiliens et les étrangers, mais avec délais très longs et un manque d'infrastructures. De l'autre, le privé et ses soins de meilleure qualité. Le Mexique et l'Argentine sont confrontés au même problème. Ceux qui peuvent payer des soins onéreux sont bien pris en charge. Les autres subissent les infrastructures d'un secteur public débordé.

Mesures mises en place pour assurer la prise en charge des expatriés

Pour offrir un bon système de soin aux expatriés, le Canada et la France ont établi un partenariat. Les immigrés français au Canada peuvent bénéficier de la protection sociale canadienne, garantie par le Canada Health Act. Cette protection offre la gratuité des soins chez le médecin généraliste et à l'hôpital. Les médicaments essentiels sont également remboursés. C'est un vrai coup de pouce pour les expatriés, car se soigner au Canada coûte cher. Attention : les tarifs des différents soins varient selon la province.

Autre mesure possible : la construction. Singapour construit de nouveaux hôpitaux, maisons de retraites, et autres établissements de soin. Le chantier est ancien. Il entend d'abord répondre au défi démographique de l'État. En 2020, 16,8% des 3,52 millions de Singapouriens ont plus de 65 ans. La cité-État a fait le pari d'une « immigration modérée » pour relancer sa démographie. Anticipant les besoins de santé actuels et à venir, Singapour a lancé un plan « Recherche Innovation et Entreprise 2020 » pour, notamment, donner des fonds visant à moderniser le secteur de la santé.

Peut-on rendre l'assurance santé obligatoire ? C'est le choix des Émirats arabes unis (EAU). Les EAU ont la particularité d'avoir une majorité d'étrangers (90% de la population). Ils fréquentent autant les hôpitaux publics que privés. Pour ne pas plomber leurs finances publiques, Dubaï et Abu Dhabi ont opté pour une assurance obligatoire. Ne pas en posséder est passible d'amende et de perte du statut de résident. À Dubaï, les entreprises sont obligées de proposer une couverture minimale à leurs salariés. Une couverture qui, selon les expatriés, serait trop limitée. Beaucoup la complètent avec une assurance privée.

Contrer les inégalités

Si les expatriés ne pèsent pas (encore ?) de manière significative sur les systèmes de santé, Singapour ou le Brésil ont choisi de jouer la carte de la prudence. La crise sanitaire a mis les États devant une obligation de réformer des systèmes de santé sous pression. Les expatriés, eux, sont confrontés au même problème que les locaux : l'argent reste la variable permettant ou non de recevoir des soins de qualité. Une inégalité structurelle renforcée par la Covid.