Location immobilière : à quoi faut-il s'attendre en 2024 ?

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Publié le 2024-01-16 à 10:00 par Asaël Häzaq
Crise toujours. De nombreux États font face à la crise immobilière, avec de graves conséquences économiques et sociales. Face à la montée des taux de crédit, les ménages se tournent vers la location. La demande explose, l'offre ne suit pas, les prix flambent. En parallèle, les États comptent sur l'immigration pour résorber les importantes pénuries de main-d'œuvre. Mais comment travailler dans de bonnes conditions si le logement ne suit pas ? Quelles solutions pour 2024 ?

Vers un effondrement de l'immobilier mondial ?

Nuages bas sur l'immobilier. Déjà en crise en 2023, faut-il redouter son effondrement ? Les pays font face à des flambées de taux d'intérêt qui font pression sur les ménages et empêchent l'accès à la propriété. L'inflation toujours présente plombe le pouvoir d'achat et fait bondir le coût des matières premières. Les promoteurs immobiliers ne suivent pas. C'est tout le secteur de la construction qui se grippe. La conjoncture internationale est également source d'inquiétude, alors que l'Ukraine reste en guerre et que la guerre Israël-Hamas se poursuit.

Canada, Chine, États-Unis, France, Allemagne, Argentine, Afrique du Sud, Royaume-Uni, Portugal… Comment les pays font-ils face à la crise immobilière ? Quels impacts pour les travailleurs étrangers ? Zoom sur quelques pays.

Argentine

En Argentine, les premières mesures de l'ultralibéral Javier Milei passent mal. Sa « dérégulation » a conduit à des loyers « libérés » encore plus astronomiques qu'auparavant. En décembre 2023, Milei s'empresse d'abroger une loi de 2020 encadrant les loyers. Désormais, place à la « liberté » entre les propriétaires et les locataires. Des propriétaires qui préfèrent convertir leur logement en location de courte durée pour les étrangers payant en dollars. Incapables de payer les loyers demandés, les locaux sont contraints de quitter leurs quartiers.

Les premiers jours de la présidence Milei ont fait bondir une inflation déjà incontrôlable : de 12,8 % en novembre à 25,5 % en décembre, pour un total de + 211 % sur l'année. Fin décembre, la ministre des Affaires étrangères et du Commerce extérieur Diana Mondino évoquait sur son compte X la possibilité de payer son loyer en cryptomonnaie, en kilos de bœufs ou en litres de lait. Boutade ou pas, l'annonce n'est pas passée. En Argentine, l'alimentation aussi est devenue hors de prix.

France

Explosion de la tension locative en France. En 2023, la hausse des taux de crédit immobilier a refroidi les acheteurs. Si les courtiers annoncent une baisse sous les 4 %, et même au-delà, les emprunteurs restent prudents. L'accession à la propriété s'éloigne, les habitants se tournent vers la location. D'après l'étude 2024 de l'Observatoire LocService.fr acteur phare du marché locatif, les tensions observées en 2023 resteront d'actualité cette année.

En 2023, les loyers se sont élevés en moyenne à 718 euros mensuels, charges incluses, pour un 43,6m² loué en moyenne 16,48 euros le m². 2023 enregistre déjà une faible hausse du loyer au m² (+1,7%). C'est moins que l'inflation, évaluée à + 5 % en 2023. Sans surprise, l'étude relève des disparités notables entre les régions. C'est à Paris que le prix au m² est le plus élevé (37,12 euros). Il n'est que de 14,15 euros en moyenne dans les autres régions. Régions qui enregistrent néanmoins une hausse plus marquée du prix au m² (environ + 3,8%) contre + 1,7 % à Paris. Paris n'est que la 4e ville enregistrant la plus forte tension locative. Devant elle, Annecy, Lyon, et Rennes, la ville étudiante. Bordeaux, Angers, Lille, Montpellier, Strasbourg et Caen terminent le top 10 des villes où il est difficile de trouver un logement en location.

Loi immigration : quelles conséquences pour les aides au logement versées aux étrangers ?

Les plus précaires sont particulièrement impactés par ces hausses, notamment les étudiants étrangers et locaux. Ils doivent composer avec une offre de logements CROUS (Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires) et de logements sociaux toujours insuffisante, et sont souvent contraints de se rabattre sur le privé. Difficultés pour les travailleurs étrangers et nationaux qui, même avec de bons revenus, subissent la pression locative.

Les étrangers subissent un autre coup dur : l'adoption en décembre 2023 d'une version durcie de la loi immigration, qui restreint l'accès à l'aide pour le logement (APL). Désormais, un étranger devra séjourner légalement 5 ans sur le territoire avant de prétendre à l'APL. Le délai est réduit à 3 mois pour un étranger qui travaille. La mesure ne concerne pas les étudiants étrangers. Selon les experts, elle mettra néanmoins du temps avant de s'appliquer.

Allemagne

Surchauffe du marché locatif. En Allemagne aussi, la flambée des taux d'intérêt, l'inflation élevée et le manque de logements neufs (construction au ralenti, pénuries de main-d'œuvre, hausse du coût des matières premières…) créent un cocktail explosif. En 2023, le nombre de permis de construction a baissé de 27,8 % par rapport à l'année précédente. À son arrivée au pouvoir en 2021, le gouvernement Scholz s'était pourtant engagé à construire 400 000 logements neufs par an. Promesse non tenue en 2022, avec seulement 295 000 logements neufs, avec toujours trop peu de logements sociaux, alors que la demande explose. Le pays ne compte qu'environ un million de logements sociaux, pour 11 millions de foyers éligibles. La chute du nombre de logements sociaux, constatée depuis 2006, est encore loin d'être résolue. En 2023, l'Allemagne essuie même une baisse de la construction de logements neufs, avec seulement 250 000 nouvelles constructions. Le chiffre devrait descendre sous les 200 000 cette année. Pour s'en sortir, de plus en plus de personnes se tournent vers la colocation.

Forte hausse des loyers

Les faillites de promoteurs immobiliers se multiplient, laissant les acheteurs avec des logements à moitié finis, avec des crédits sur les bras. La situation est d'autant plus critique que le manque de logement pèse sur les perspectives de croissance. Face à la pénurie de main-d'œuvre, l'Allemagne a réformé sa loi immigration pour attirer les travailleurs étrangers. Mais encore faudrait-il qu'ils trouvent un logement. Alors que les loyers explosent et plombent encore un peu plus le pouvoir d'achat des habitants, le gouvernement envisage des aides, notamment pour les étudiants et apprentis, mais aussi pour relancer l'accès à la propriété des ménages.

En 2023, il manquait environ 700 000 logements en Allemagne. La situation est particulièrement tendue dans les grandes villes. Berlin et ses 85 % de locataires subissent de plein fouet l'inflation, avec des loyers en constante hausse. À Munich, certains quartiers ont vu les loyers bondir de + 60 % en 10 ans. En août 2023, une étude du courtier Jones Lang LaSalle (JLL) estime que les contrats de location à Berlin ont atteint en moyenne 17,50 euros le m². À Munich, ils bondissent à 22,50 euros le m².

Chine

Il faut empêcher l'effondrement immobilier. En décembre 2023, Pékin précise sa politique de relance économique pour 2024. Face à l'aggravation de la crise du logement, l'exécutif veut frapper fort, tout en rassurant les investisseurs. Mais la spirale n'en finit pas. La dette de l'ex-géant chinois de l'immobilier Evergrande et celle de Country Garden représente 500 milliards de dollars. De nombreux chantiers restent à l'arrêt. La chute des géants de l'immobilier entraîne celle de tous les autres acteurs du secteur. En bout de chaîne, des acheteurs sans logement, étranglés par des prêts qu'ils ne peuvent honorer, et des locataires confrontés à une flambée des loyers.

Comme en Allemagne, de plus en plus de personnes optent pour la colocation. En Chine, le taux de chômage atteint des niveaux records, surtout chez les jeunes. Selon le gouvernement, il atteignait 21,3 % en juin 2023. Les effets de la politique zéro Covid pèsent encore sur l'économie. Une économie fragilisée par la plongée de l'immobilier. Pilier de la croissance chinoise, le secteur représente habituellement environ un tiers du PIB. C'est bien plus que le poids du secteur immobilier aux États-Unis (à peine 17%) ou en France (11%). En Chine, l'éclatement de la bulle spéculative immobilière a mis un sérieux coup de frein à la croissance. Selon le Bureau national des statistiques (BNS) chinois, le PIB a laborieusement atteint les 4,9% en 2023.

Shenzhen, Pékin, Dalian, Chengdu, Canton, Suzhou et Tianjin figurent parmi les villes les plus chères de Chine. Les disparités demeurent fortes entre les grands centres urbains et les petites communes.

États-Unis

Aux États-Unis, on tend plutôt vers une stabilisation du marché locatif, avec, toujours, de fortes disparités selon les États et les villes. La stabilisation s'était déjà constatée en 2023, après une année 2022 sous fortes tensions, essentiellement dues aux retards des constructions suite à la Covid. L'inflation reste néanmoins persistante et continue de toucher, non seulement les acheteurs, mais aussi les promoteurs immobiliers. La flambée des coûts des matières premières contraint leur avancée. Les États-Unis ont aussi rendez-vous avec eux-mêmes.

Alors que les primaires à l'élection présidentielle se préparent, le monde économique scrute de près les tendances. Pour enrayer la pénurie de logements et prévoir les futures demandes, on estime que le pays devrait produire au moins 4,3 nouveaux logements à l'horizon 2035. Également confrontés à un manque de main-d'œuvre, les États-Unis réforment certaines règles de visa pour accueillir davantage de professionnels étrangers. Des professionnels qui devront se loger. Mais à quel prix ? En 2023, l'étude ECA International, expert dans les recherches sur le coût de la vie, estime que New York est la ville la plus chère au monde pour les expatriés. San Francisco est classée 11e, devant Los Angeles (15e) et Chicago (20e). L'étude explique ces positions notamment à cause de l'augmentation significative des loyers, dus à la forte demande depuis la crise sanitaire.