Contrat de mariage: ce qui change

Vie pratique
Publié le 2019-03-21 à 13:47 par Anne-Lise Mty
Frédéric Varin et Valérie Marmey-Ravau, membres du Conseil Supérieur du Notariat de France, répondent aux questions d'Expat.com sur les changements de règlements des régimes matrimoniaux en Europe. Ce changement est entré en application le 29 janvier dernier et 18 pays de l'Union Européenne y ont agrée.

En langage courant, qu'est-ce qui change pour le couple?

La situation matrimoniale des couples mariés depuis le 29 janvier 2019 et présentant un élément d'extranéité est plus claire, plus sécurisée et plus simple.

Plus claire parce que les futurs époux peuvent choisir la loi qui s'applique à leur régime matrimonial entre plusieurs lois : loi de la résidence habituelle ou de la nationalité de l'un d'eux ou des deux au moment de la conclusion de la convention.

A défaut de choix il sera fait application en principe de la loi de la première résidence habituelle des époux après le mariage et à défaut de la loi de leur nationalité commune.

Plus sécurisée parce que la loi applicable ne peut être modifiée qu'avec le consentement des époux.

Plus simple puisque la loi choisie s'applique à l'ensemble des biens des époux quel que soit leur nature ou leur localisation.

Le règlement s'applique aux règles relatives aux régimes matrimoniaux, c'est-à-dire aux règles qui déterminent l'appartenance des biens du couple, le pouvoir des époux sur ces biens et leur partage à la dissolution du mariage.

Quand est-ce que le couple sera amené à choisir la loi qui encadrera son union?

S'agissant de la loi applicable à leur régime matrimonial, les époux peuvent la choisir à tout moment avant le mariage et même lors de la célébration du mariage, dans la mesure où cette possibilité est offerte par la loi du lieu de célébration du mariage. Le couple peut aussi en changer au cours du mariage et ce quelle que soit la date de leur union.

Le couple peut donc modifier le cadre juridique qui régit leur mariage. Comment est-ce qu'il s'y prend?

Les époux peuvent modifier le cadre juridique de leur union à tout moment dès l'instant qu'il existe un élément d'extranéité.

Cette possibilité leur est offerte quelle que soit la date de leur mariage (avant ou après le 29 janvier 2019) et qu'ils aient ou non choisi la loi applicable à leur union lors de leur mariage.

Ce choix de loi doit être passé par une convention établie par écrit, datée et signée par les époux. Cette convention doit en outre respecter le formalisme prévu par la loi applicable au régime matrimonial et par la loi de l'Etat de résidence habituelle des époux (une convention de choix de loi établie pour des époux résidents en France doit être établie par acte notarié).

Les nouveaux règlements s'appliquent, donc, aussi aux couples mariés avant le 29 janvier 2019?

Il concerne, bien entendu, les époux qui se marient après le 29 janvier 2019, mais aussi les couples mariés avant le 29 janvier 2019 et qui souhaitent modifier la loi applicable à leur union.

Les couples mariés avant le 29 janvier 2019 qui n'apportent aucune modification à la loi applicable à leur union continueront à être soumis aux règles de droit commun pour les époux mariés avant le 1er septembre 1992 ou à la convention de la Haye du 14 mars 1978 pour les époux mariés entre le 1er septembre 1992 et le 28 janvier 2019.

Ainsi trois corps de règles continuent à s'appliquer pour la détermination du régime matrimonial de personnes mariées.

Comment ce changement change-t-il la donne pour les couples?

Les époux mariés entre le 1er septembre 1992 et le 28 janvier 2019 sont soumis à la convention de la Haye du 14 mars 1978 pour la détermination de la loi applicable à leur régime matrimonial. Selon cette convention, à défaut de choix de loi par les époux, la loi applicable à leur union subi dans certaines hypothèses une « mutabilité automatique », source d'insécurité juridique, les époux ayant rarement conscience de son existence.

Pour les époux mariés à compter du 29 janvier 2019, cette modification ne peut-être que volontaire (il faut mentionner toutefois la « clause d'exception » figurant dans le règlement qui permet à l'un des époux à demander judiciairement l'application d'une loi autre que celle normalement applicable. Cette situation devrait demeurer exceptionnelle).

Il faut résider ou être citoyen des 18 pays qui ont agrée au changements pour en bénéficier?

Tous les couples sont concernés par ce nouveau règlement.

La nationalité des époux ou leur lieu de résidence importe peu : en effet le Règlement à une « vocation universelle »  c'est-à-dire que la loi désignée comme loi applicable s'applique même si cette loi n'est pas celle d'un Etat contractant.

Si le couple s'expatrie hors des 18 pays mentionnés, quels choix s'offrent au couple?

En cas d'expatriation, le Règlement continue à s'appliquer entre les époux, celui-ci ayant une vocation universelle.

Mais il faut tout de même apporter une précision : pour le cas où la situation met en présence un Etat tiers (c'est-à-dire non lié par le règlement) les époux devront vérifier quelles sont les règles applicables à leur union dans cet État.

Dans un contexte international, les situations peuvent vite devenir complexes, chaque Etat (non lié par le règlement) n'appliquant pas forcément les mêmes règles pour déterminer le régime matrimonial des personnes mariées.