Expatriation simplifiée pour les non Européens : accès facilité à l'Union européenne

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Publié le 2023-07-03 à 13:00 par Ameerah Arjanee
Le Parlement européen doit se prononcer sur une proposition visant à faciliter l'accès des expatriés non européens au statut de résident de longue durée. Il leur sera ainsi plus facile de jouir pleinement de la liberté de circulation au sein de l'Union européenne. Actuellement, il y a de facto des restrictions liées à l'accès à l'emploi dans n'importe quel pays de l'Union européenne, même pour les expatriés (non européen) vivant dans un État membre. Si la réforme est adoptée, ces expatriés pourront immédiatement obtenir le statut de résident de longue durée dans un deuxième pays de l'Union européenne dans lequel ils vont déménager. 

Les expatriés non européens ne jouissent pas d'une totale liberté de mouvement 

À l'heure actuelle, un expatrié non européen doit avoir vécu de manière continue pendant 5 ans dans un État membre pour y être considéré comme un résident de longue durée. Il ne doit pas non plus avoir séjourné à l'étranger pendant plus de 6 mois consécutifs et pendant plus de 10 mois au total au cours de ces 5 années. Dans sa demande, il doit fournir des preuves de stabilité financière (revenus réguliers au cours des 5 dernières années et épargne), présenter un plan d'assurance santé et satisfaire des conditions d'intégration telles que la preuve de la maîtrise de la langue et la réussite d'un test sur la législation et la culture du pays d'accueil de l'Union européenne.

En théorie, en devenant résidents de longue durée, les expatriés non européens bénéficient de la même liberté de circulation que les Européens et les citoyens de l'Union européenne. Dans la pratique, cependant, c'est beaucoup plus compliqué. Chaque État membre possède ses propres règles en matière de permis de travail et de résidence. Dans de nombreux pays de l'Union européenne, avant qu'une entreprise ne puisse embaucher un ressortissant d'un pays tiers, elle doit prouver à l'État que les compétences recherchées pour ce poste ne sont pas disponibles localement. C'est ce qu'on appelle un test du marché du travail.  

Parfois, ce test et d'autres procédures bureaucratiques sont tellement compliqués que les entreprises préfèrent exclure dès le départ les candidats non européens de certains postes vacants, même si ces derniers vivent déjà dans un autre pays de l'Union européenne. Cette situation prive les travailleurs d'opportunités et les entreprises de travailleurs, ce qui est encore plus grave en période de pénurie de main-d'œuvre. De nombreux pays européens souffrent d'une pénurie de main-d'œuvre depuis la pandémie de Covid-19. Pour preuve, l'Agence fédérale du travail de l'Allemagne, la plus grande économie de l'Union européenne, a signalé fin 2022 que 200 professions souffraient d'une grave pénurie de main-d'œuvre. Ces professions vont des spécialistes de l'informatique aux chauffeurs routiers en passant par les infirmières.

Un autre problème est la manière dont les déplacements en Europe nuit aux chances d'un expatrié non européen d'obtenir le statut de résident de longue durée. S'il se rend dans un autre État membre pour un stage, un cours ou une formation professionnelle qui dure quelques mois, cela portera préjudice à son dossier de séjour continu dans le premier pays de l'Union européenne où il vit. Les échanges commerciaux et culturels entre les pays de l'Union européenne étant importants, il est donc inévitable que les expatriés se trouvent face à de bonnes opportunités à court terme dans d'autres États membres, ce qui ne devrait pas pénaliser leur statut de résident.

Tous ces éléments constituent depuis longtemps des problèmes pour les expatriés provenant des pays tiers, mais depuis 2016, ils sont également devenus des problèmes pour les expatriés britanniques. Alors que les modalités de l'accord du Brexit ont été finalisées au cours des sept dernières années, les expatriés britanniques à travers l'Europe se sont retrouvés dépouillés des droits dont ils bénéficiaient depuis des décennies. Payer des impôts, toucher sa pension et même conduire dans l'Union européenne sont devenus plus compliqués pour eux. C'est pourquoi certains membres du Parlement européen ont présenté une proposition visant à améliorer leur situation en matière de résidence. 

L'exigence de séjour pourrait être réduite de 5 à 3 ans

Les principaux changements d'une réforme proposée par un groupe de députés européens sont les suivants : 

  • Réduire de 5 à 3 ans le nombre d'années pendant lesquelles les expatriés doivent avoir séjourné dans un pays de l'Union européenne pour être éligible au statut de résident de longue durée.
  • Permettre le cumul du temps passé dans différents pays de l'Union européenne. Ainsi, un expatrié indien ayant vécu deux ans en Irlande et un an au Portugal pourra parfaitement prétendre au statut de résident de longue durée.
  • En tenant compte du temps passé par les expatriés en tant qu'étudiants, travailleurs saisonniers ou demandeurs d'asile dans un État membre de l'Union européenne. Cette mesure sera aussi d'une aide certaine pour les expatriés qui sont venus en Europe pour des études universitaires. 
  • Permettre aux expatriés originaires de pays tiers d'obtenir facilement le statut de résident de longue durée dans un deuxième pays de l'Union européenne, à condition qu'ils l'aient déjà obtenu dans un premier pays. Il leur suffira de présenter leur carte de résident du premier pays dans le second pays. Ils n'auront pas besoin de se soumettre à une étude de marché du travail, de présenter à nouveau leur justificatif de ressources ou de repasser un test d'intégration culturelle.  
  • Traitement des demandes de résidence de longue durée dans un délai de 60 jours. 
  • Simplifier les exigences en matière d'assurance santé et de fonds suffisants dans la demande. 
  • Offrir des cours de langue gratuits, au moins du niveau débutant A1-A2, aux candidats potentiels qui doivent remplir les conditions d'intégration culturelle de la demande. 
  • Accorder automatiquement le statut de résident de longue durée aux enfants à charge des expatriés qui obtiennent eux-mêmes ce statut. 

La Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen a voté en faveur d'un projet de texte de cette réforme en mars 2023. Damian Boeselager, eurodéputé allemand du groupe des Verts/Alliance libre européenne, est l'un des fervents défenseurs de cette réforme. Il a déclaré à la presse : « Pour mieux attirer et retenir les travailleurs talentueux à tous les niveaux de compétences, nous proposons un statut de résident de longue durée de l'Union européenne transférable, assorti du droit de circuler librement en Europe pour y travailler ou y faire des études. Ce droit permettra aux migrants de voyager et de rechercher des opportunités à travers l'Europe et de combler les pénuries de main-d'œuvre là où cela est nécessaire ». 

La réforme proposée doit encore être examinée et approuvée par le Conseil de l'Union européenne. C'est là que les ministres des gouvernements de chaque pays membre discutent, modifient et adoptent des lois. Il pourrait être difficile d'obtenir l'accord de tous les ministres sur tous ces changements. Cela s'explique en partie parce que le sentiment anti-immigration est très fort dans certains pays. Mais c'est aussi parce que, comme l'explique M. Boeselager, les gouvernements pourraient avoir du mal à vérifier mutuellement leurs documents. Cela peut concerner les documents relatifs aux séjours continus et aux absences temporaires si l'expatrié a vécu dans plusieurs pays de l'Union européenne.  

Quoi qu'il en soit, le Conseil de l'Union européenne devra décider d'accepter totalement, partiellement ou de rejeter totalement cette réforme avant juin 2024, date à laquelle les prochaines élections du Parlement européen sont prévues.