La « génération Y » est-elle plus encline à tenter une expérience internationale ?

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Publié le 2022-06-27 à 10:00 par Asaël Häzaq
Les « millennials » (milléniaux en français) prennent du large. Ces jeunes adultes et adultes (entre 25 et 40 ans), ont essuyé les crises économiques, jusqu'à la Covid, la guerre en Ukraine et tous les autres conflits géopolitiques qui secouent le monde. 

Certains les appellent « les jeunes vieux », ou « la génération perdue ». Eux préfèrent parler de « génération de tous les possibles ». Libres, voyant à l'international, ils prennent comme une chance le fait d'avoir moins d'attaches que leurs aînés. Pourquoi le voyage à l'étranger a-t-il une si grande place pour eux ? Est-il un nouveau booster de carrière ?

Quand la génération Y voit à l'international

Qu'est-ce qui pousse à s'expatrier ? Côté pile : l'envie d'une nouvelle expérience professionnelle, de découvrir un nouveau pays, de réaliser un rêve… Côté face : la vie chère dans son pays, l'impossibilité de devenir propriétaire, d'accéder à un poste à responsabilité, de gagner plus… Il ne faut pas forcément y voir quelque chose de négatif. Partir à la recherche de l'herbe la plus fraîche est aussi une façon de réaliser ses ambitions. Les millénniaux – également appelés « génération Y » – ne se posent plus la question. Ils partent. Parmi leurs motifs de départ : le coût exorbitant des loyers dans leur pays. D'après CIA Landlord, compagnie d'assurance anglaise, Paris est la capitale la plus chère d'Europe, suivie de près par Londres. Luxembourg complète le podium. L'achat d'un logement dans la capitale française coûte près de 14 000 euros le mètre carré. C'est près de 13 000 euros pour Londres, et environ 11 000 euros pour Luxembourg. Les salaires des trentenaires ne peuvent pas suivre. Pour beaucoup, devenir propriétaire est devenu un rêve inaccessible. Condamnés à la location, enfermés dans des emplois dans lesquels ils ne se reconnaissent pas forcément, ils font le choix du départ.

C'est que les millénniaux ont généralement moins d'attaches que leurs parents. Ils n'ont pas d'enfants, sont célibataires ou en couple, sont locataires, ne sont pas liés par un prêt de longue durée… Finalement, ces éléments considérés comme « négatifs » par la pensée traditionnelle sont pour eux une chance. Ces jeunes adultes s'embarquent pour l'Espagne, l'Italie, le Canada, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis, le Brésil, où ils parviennent à augmenter leur pouvoir d'achat (salaires plus élevés, meilleures conditions de vie etc.) Jusqu'à peu, les pays d'Europe de l'Est figuraient aussi en bonne position. L'Estonie, la Croatie, la Géorgie ou la République tchèque ont d'ailleurs mis en place le visa nomade digital pour attirer la génération Y. La guerre en Ukraine a freiné les projets de certains, mais pas totalement. Ces États espèrent bien capitaliser sur leurs atouts (loyers peu élevés, coût de la vie moins élevé...) et attirer plus de profils internationaux.

La crise économique actuelle freine-t-elle les trentenaires voyageurs ?

D'un côté, des États qui recrutent des talents internationaux ou qui leur déroulent le tapis rouge du visa nomade numérique. De l'autre, une inflation galopante qui pèse sur le pouvoir d'achat. En Allemagne et en Afrique du Sud, l'inflation frôle les 8%. C'est 8,3% aux Etats-Unis, 5,2% en France, 5% en Australie, et 4,7% au Maroc. Tout miser sur les villes dont les logements sont moins chers que ceux de son pays d'origine est moins onéreux que le sien s'avère donc risqué. Tout d'abord, il faut savoir ce que l'on compare : une location ou un achat ? Ensuite, chaque pays à ses particularités. Le seul indice des coûts des logements ne suffit bien sûr pas à décider d'une expatriation.

Ça aussi, les adultes de la génération Y l'ont bien compris. Ils ont senti le vent du télétravail tourner et sont de plus en plus nombreux à saisir les nouvelles opportunités d'emploi. Plus mobiles que leurs aînés, ils évaluent leurs perspectives de carrière à l'échelle internationale, notamment, dans les métiers qui recrutent : le numérique, le commerce, l'ingénierie, le jeu vidéo, l'informatique, la finance, le développement durable. Pour les millénniaux, l'expérience à l'étranger est plus qu'une ligne supplémentaire sur le CV. C'est une nouvelle forme de réalisation de soi qui tranche avec la génération précédente. La famille à 30 ans avec maison et jardin n'est plus à l'ordre du jour. Et les multiples crises n'expliquent pas à elles seules ce basculement de valeurs. L'allongement de la durée des études et les nouveaux rythmes de vie y sont pour beaucoup.

Pourquoi partir à l'étranger ?

Aujourd'hui, il n'est pas rare de voir un jeune terminer ses études vers 30 ans. C'est encore plus s'il se lance dans un doctorat. Il arrive donc sur le marché du travail dans sa trentaine. Age auquel ses parents avaient déjà un ou deux enfants, un travail fixe, voire, une maison. Les millénniaux, eux, commencent tout juste à entrer dans la vie active, mais essuient déjà des contrecoups : Covid, crise économique, géopolitique, inflation… Partir devient, pour certains, un moyen de rattraper « le temps perdu » ou « d'accélérer le temps ». La vie à l'étranger garde sa part de fantasme. Mais au fond, l'expatrié a généralement un quotidien ordinaire. Seul son cadre de vie change. Assez pour motiver les trentenaires au départ.

Partir, c'est aussi découvrir une autre facette de soi-même. Ceux qui ont connu un long parcours universitaire n'ont peut-être jamais eu l'occasion d'effectuer un stage à l'étranger ou un long voyage. Partir permet de se confronter à soi-même et de renforcer sa confiance en soi. Car les multiples crises ont aussi fait des dégâts de ce côté-là. Pour les millénniaux privés de projets traditionnels (CDI, achat d'une maison…), l'expérience internationale est le nouveau projet de vie. Projet à la fois professionnel et personnel. Et il ne faut pas voir ici quelque chose de figé. Ces trentenaires voyageurs peuvent multiplier les expériences à l'étranger, comme autant de rêves contribuant à leur épanouissement personnel.