Pourquoi le Japon est un pays avantageux pour les professionnels étrangers

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Publié le 2021-09-27 à 07:14 par Asaël Häzaq
Tout portait à croire que la crise sanitaire rendrait l'expatriation moins attractive. C'est l'inverse qui s'observe, du moins, au Japon. Régulièrement classé comme l'un des endroits les plus chers au monde (surtout sa capitale, Tokyo), le Japon offre aussi de meilleurs salaires aux expatriés. Bonne nouvelle pour les travailleurs étrangers, ou réalité plus contrastée ?

Japon : nouvelle place forte de l'expatriation ?

En juillet dernier, ECA International (Employment Conditions Abroad), société d'expertise en mobilité internationale, classe les pays les plus compétitifs en termes de package expatriation. Le moment est bien choisi : l'impératif économique pousse les États à intensifier leurs campagnes de vaccination, pour endiguer la menace du variant Delta et relancer la croissance.

Par « package d'expatriation »,  il faut entendre toutes les mesures pécuniaires et matérielles mises en place par l'entreprise qui envoie son salarié à l'étranger. Sans surprise, il comprend le salaire, et tout autre avantage pouvant être négocié entre l'entreprise et le salarié : primes diverses (risque, mobilité, coût de la vie...), aides au déménagement, au logement, aux transports, protection sociale, formation, cours de langue etc.; les bénéfices, et les taxes. Des avantages parfois conséquents pour le salarié, donc, et un coût pour l'entreprise. 
 

Si ECA rappelle la difficulté de comparer des packages d'expatriation entre eux, tant la définition d'un même emploi peut varier d'un pays à l'autre, il parvient à dresser un classement des nouvelles tendances post-confinement. Avec un salaire moyen de 86 271$, 143 354$ de bénéfices (primes et aides diverses fournies par l'employeur), et 175 960$ de taxes (package total : 405 585$), le Japon supplante le Royaume-Uni, et devient le pays le plus onéreux pour les entreprises étrangères souhaitant y envoyer leurs salariés. Le Royaume-Uni arrive deuxième, avec un package d'expatriation de 404 405$. L'Inde clôture le podium, avec un package de 318 596$. Déjà prisé par les expatriés avant la crise sanitaire, le Japon confirme sa position de destination attractive. En 2021, le salaire moyen tokyoïte avoisine les 3 000$ mensuels (chiffre : Nikkei), soit, l'un des salaires les plus élevés au monde. Le pays maintient son rang de 3e puissance mondiale, boosté par ses investissements dans la robotique et les technologies de pointe. 

Le Japon porté par ses secteurs de pointe

Malgré la crise mondiale engendrée par la pandémie, beaucoup de secteurs sont restés compétitifs, voire, ont augmenté leurs parts de marché. Pays de la robotique et de l'innovation technologique, le Japon se hisse grâce à ses marchés de pointe. Une bonne nouvelle pour les expatriés déjà sur place, ou projetant de travailler à Tokyo (c'est à Tokyo que se concentrent les salaires les plus élevés). Ainsi, en 2021, un cadre du secteur bancaire gagne, en moyenne, plus de 100 000$ annuels. Sous tension, le secteur médical voit également ses salaires augmenter, avec près de 100 000$ annuels pour un médecin (à nuancer selon les spécialités). Les secteurs des nouvelles technologiques et de l'innovation de pointe (automatisation, robotique, intelligence artificielle, ingénierie etc.) sont également compétitifs, avec des salaires moyens pouvant atteindre les 100 000$ annuels (chiffres linkajapancareers et careersaddict). Le Japon continue d'être porté par ses industries de pointe : Fanuc, Yaskawa, Toyota, Sony, Shiseido... et s'impose comme l'un des leaders mondiaux de l'automatisation et de l'innovation. 

Une réalité plus contrastée pour les petits salaires

Hauts salaires, pour coût de la vie élevé. La pandémie n'a fait qu'aggraver la situation. Le Japon parvient néanmoins à contenir l'inflation, qui reste moindre (0,5%), comparativement aux États-Unis et à l'Europe. Si elle se veut optimiste pour 2022, la Banque du Japon annonce cependant un recul du PIB (-1,3% au premier trimestre 2021). La nouvelle vague de coronavirus que connaît le pays a fait oublier le léger sursaut économique de 2020. L'effet JO est, lui aussi, nul. Le Japon compte sur ses exportations, avec une hausse moyenne de plus de 40% (juillet 2021). Une hausse salutaire, qui ne fait cependant pas oublier l'impact de la crise sanitaire. Les frontières japonaises restent fermées, gelant tout projet d'expatriation. Au 23 septembre, 56% de la population a reçu les deux doses de vaccin, 68%, au moins une dose. Les hauts salaires masquent un quotidien en demi-teinte, surtout pour les expatriés ne travaillant pas dans les secteurs de pointe. Selon le Nikkei, les cols-bleus étrangers ne gagneraient que 70% du salaire moyen japonais. Les secteurs fortement soumis à la concurrence ont été encore plus fragilisés par la crise sanitaire (restauration, commerces alimentaires...). Moins protégés que les salariés à temps plein, les travailleurs à temps partiel occupent des postes plus précaires. Eux aussi réclament une revalorisation de leurs salaires. 

Avec le départ du Premier ministre Yoshihige Suga, le Japon entre dans une nouvelle période d'incertitude. Pour les expatriés, la question de l'ouverture des frontières décidera d'un possible futur professionnel sur l'archipel. Alors que les vaccinations sont en constante hausse, les lobbies économiques militent pour une réouverture des frontières. C'est le Keidanren, Fédération des organisations économiques japonaises, qui interpelle le gouvernement le 6 septembre dernier. S'appuyant sur l'excellent rebond vaccinal (12% des Japonais totalement vaccinés en juillet, 56% à ce jour), Masakazu Tokura, porte-parole du Keidanren, plaide pour un « équilibre nécessaire entre les mesures contre la propagation du virus et les activités socio-économiques ». La Fédération va plus loin et demande l'autorisation d'entrée sur le territoire, non seulement, pour les étrangers vaccinés (exemptés de quarantaine), mais aussi aux non-vaccinés (avec quarantaine). Ces demandes avaient été soumises à l'ancien Premier ministre Suga, qui se serait montré ouvert. Reste à savoir si les négociations reprendront avec le ou la futur(e) Premier ministre. Le Parti libéral démocrate (PLD) élira le successeur de Suga le 29 septembre.

Sources :