Syndrome de la cabane ou du prisonnier : qu'est-ce que c'est et comment s'en sortir ?

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Publié le 2020-05-27 à 08:57 par Francesca
Après avoir été en confinement pendant plusieurs mois, il peut être difficile de retourner au travail ou il arrive d'être anxieux à l'idée de simplement se rendre au supermarché. Ne paniquez pas ! C'est tout à fait normal. Giuditta Petrella, psychologue et psychothérapeute, nous explique comment se manifeste le syndrome de la cabane.

Après la fin du confinement, on parle du syndrome de la cabane et de la peur de quitter la maison, de quoi s'agit-il ?

Avec la fin du confinement, les gens ont commencé à avoir l'illusion que la vie pourrait redevenir normale. Cette pandémie a conduit à une longue période d'isolement; pour certaines personnes, c'était fatigant de ne pas pouvoir quitter la maison et de mener la routine quotidienne tandis que pour d'autres, c'était réconfortant de vivre au sein du foyer, percevant le confinement comme un sentiment de protection: un refuge dans un endroit où l'on se sentait protégé. Notre attention est dirigée vers ceux qui font face à la sortie de cet espace chaleureux et accueillant avec la peur. Les émotions qui émergent sont l'anxiété, la panique, la frustration, la tristesse, la confusion et si nous devions donner un nom à ce phénomène, ce serait le Syndrome de la cabane ou du prisonnier. Un terme peu connu mais qui commence aujourd'hui à se faire connaître. Le syndrome de la cabane n'est pas classé comme un trouble mental, mais comme une condition qui, si elle n'est pas traitée, peut entraîner des troubles mentaux telles que la dépression ou un trouble de stress post-traumatique.

Comment reconnaître cet état émotionnel lié à la peur de quitter son domicile ?

Les symptômes les plus courants à considérer sont les émotions telles que l'anxiété, les crises de panique, l'irritabilité, la tristesse, l'angoisse, un sentiment de vide. D'autres encore peuvent ressentir une fatigue persistante même s'il n'y a pas de manque de sommeil, de l'anhédonie et un sentiment d'apathie.

Dans cette phase de reprise de la «vie normale», un sentiment de désorientation peut émerger dans l'esprit de nombreuses personnes lors de la reprise des contacts avec le monde extérieur. Les craintes sont multiples: la phobie de contracter le virus, la pensée de la mort, la peur d'infecter des proches ou de reprendre les rythmes frénétiques abandonnés dans cette période d'emprisonnement; certaines personnes ont redécouvert la beauté de la proximité et des liens avec leurs proches et le temps passé en leur compagnie. Un autre effet important qui pourrait conduire à la peur de quitter la maison est l'idée de se retrouver dans un monde changé où il est obligatoire de porter un masque, de maintenir une certaine distance de sécurité, de se retrouver avec un être cher et de ne pas pouvoir s'embrasser. Toutes ces situations pourraient créer des sentiments d'«éloignement».

Comment gérer cette tempête émotionnelle ?

Une première étape dans la gestion de cette situation est de pouvoir atteindre une certaine prise de conscience. Il n'est pas toujours facile de reconnaitre les sonnettes d'alarme. Une chose est sûre: vous ne pouvez pas le faire seul ! Et dans ces moments, il est important de ne pas se sentir seul et abandonné, cela aide à restaurer la confiance de la personne en elle-même et dans le monde; l'espoir pour l'avenir et la possibilité de repenser le monde et les relations comme un lieu familier.

Dans ce processus d'acceptation d'une nouvelle réalité, il serait important de faire appel à la force de résilience que nous avons en nous. Qu'est-ce que la résilience? C'est la capacité de se réparer après un période trouble, de faire face, de résister, mais aussi de construire et de réussir à réorganiser positivement sa vie malgré des situations difficiles.

Au cours de la vie, des événements négatifs se produisent qui pourraient vous faire souffrir, déstabiliser et changer. La résilience psychologique pourrait être perçue comme la capacité de trouver de nouvelles ressources en nous et un nouvel équilibre enrichi par ce que nous avons vécu.

Tout le monde n'a pas la force de la résilience mais potentiellement tout le monde peut la posséder: l'aide d'un psychologue pourrait vous soutenir et vous accompagner dans ce processus de redécouverte de votre force sans vous sentir seul.

Le syndrome de la cabane survient également chez les enfants et les adolescents. Comment les aider à faire face à leurs peurs ?

Pendant la période de confinement due au Coronavirus, les enfants et les adolescents étaient peu pensés par le système social. Les parents, avec les outils à leur disposition, ont dû retrousser leurs manches pour les aider à survivre à cette tempête qui est venue subitement et qui a bouleversé le quotidien avec toutes les épreuves que cela implique. En fait, ils se sont retrouvés enfermés dans la maison, ce qui a dû suspendre brusquement les liens avec une partie de la vie qui est importante pour eux: l'école, les enseignants, les amis, les activités parascolaires et bien d'autres choses qui sont importantes pour eux.

Dans ce confinement, les enfants et les adolescents, parfois grâce à l'aide de leurs parents, parfois avec leurs propres moyens, ont dû s'en sortir, reconstruisant une routine quotidienne faite de nouveaux rituels et schémas. De plus, les adolescents, pour qui la relation avec le groupe de pairs est important pour l'affirmation de soi et de son identité, ont eu recours aux médias sociaux pour maintenir ce besoin vital en vie.

Presque inconsciemment, ils se sont retrouvés à vivre une nouvelle réalité, de sorte qu'à la fin du confinement, ils peuvent avoir pour réflexe de se retirer, beaucoup d'entre eux ont peur de sortir de cet endroit sûr que sont les quatre murs de la maison: un endroit qui pendant plusieurs mois a été leur espace sur.

Quelles stratégies un parent peut-il mettre en place pour aider son enfant à surmonter ses peurs et à recommencer à vivre ?

La communication et le réconfort sont fondamentaux, il ne faut pas faire semblant que tout va bien car les enfants comprennent tout. Expliquez toujours bien en utilisant un langage qu'ils comprennent afin de transmettre un sentiment de sérénité et de sécurité.

Nous devons les accompagner en douceur vers la nouvelle normalité en faisant d'abord de petits déplacements afin de leur montrer qu'en prenant les précautions nécessaires tout ira bien et les aider lentement à regagner confiance en leur l'environnement.

En ce qui concerne les adolescents, au cours de cette longue période de confinement, ils ont créé leur propre monde numérique qui les a connectés à l'école, aux amis, aux parents, aux jeux: tout cela depuis leur chambre. Le risque encouru est que cet isolement puisse devenir quelque chose d'agréable et qu'il se transforme en un retrait pathologique. Pour éviter que cela ne se produise et que l'isolement ne devienne une barrière protectrice, la tâche de l'adulte serait d'encourager l'adolescent à quitter la maison et à socialiser.

L'enfant et l'adolescent ne doivent pas être laissés seuls mais accompagnés dans ce processus de transformation vers une nouvelle vie en recommençant pas à pas à vivre, apportant en eux une expérience stressante mais non traumatisante. Il est important d'écouter leurs peurs, leurs préoccupations, leurs angoisses et de les aider à soutenir leurs ressources internes et leurs capacités personnelles.