Expat entrepreneur : que faire quand les affaires ne vont plus ?

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Publié le 2023-09-11 à 14:00 par Asaël Häzaq
« Déferlante », « vague », « avalanche »… Des mots forts relayés dans la presse internationale pour évoquer un phénomène qui inquiète. Les affaires des entrepreneurs ne sont plus aussi florissantes qu'avant. Une situation imputée à la crise sanitaire, mais pas seulement. Une situation encore plus délicate pour nombre de petits patrons. Quelles solutions pour les expats entrepreneurs en difficulté ?

Des faillites d'entreprises qui se multiplient

Doit-on parler d'un « choc mondial » ? Suisse, France, Canada, États-Unis, Royaume-Uni, Japon, Maroc, Italie, Allemagne... Les faillites d'entreprises se multiplient dans un monde toujours frappé par la crise économique et l'inflation. L'agence fédérale canadienne annonce 31 224 dossiers d'insolvabilité entre avril et juin, soit une hausse de 23 % comparativement à l'an dernier. Situation plus apaisée en Suisse, avec 2998 faillites comptabilisées depuis le début de l'année. Mais le nombre de faillites s'essouffle en août, constate Dun & Bradstreet dans une récente étude. Le spécialiste des informations d'entreprise avait observé une accélération des faillites depuis le début de l'année.

En avril 2023, une étude d'Allianz Trade, société d'assurance-crédit aux entreprises, note une hausse des faillites d'entreprise dans le monde : +2 % en 2022 et +23 % en 2023. L'étude table sur une amélioration en 2024, avec seulement +4 % de faillites. Ces « défaillances d'entreprises » n'épargnent aucun pays. Avec 13 000 faillites d'entreprises estimées, le Maroc affiche un nouveau record, en hausse de 5 % par rapport à 2022. En tout, l'étude compte +53 % de faillites d'entreprises établies au Maroc depuis 2019. Allianz Trade prévoit une hausse de 16% des faillites au Royaume-Uni, 22 % en Allemagne, 24 % en Italie et 41 % en France. Les chiffres estimés pour la Chine (+4 % à peine de faillites) sont très faibles et invitent à la vigilance. Le pays est toujours secoué par une crise immobilière sans précédent, qui fragilise de nombreux entrepreneurs nationaux et expatriés.

Affaires en berne : quelles sont les causes ?

Selon les conclusions de l'étude, ces « défaillances d'entreprises » sont en partie dues à la pandémie. Mais pas seulement. En France, par exemple, le nombre de faillites « est au plus haut depuis 2016 », selon un rapport du cabinet Altares publié en juillet 2023.

Il faut effectivement prendre en compte les autres facteurs contextuels : le marasme économique ambiant, la faible croissance mondiale, les risques de récession, l'inflation… La situation est particulièrement inquiétante pour des Très Petites Entreprises (TPE) et Petites et Moyennes Entreprises (PME). Malgré des carnets de commandes parfois pleins, ces entreprises peuvent être contraintes de mettre la clé sous la porte, faute de trésorerie. Elles subissent les défaillances d'entreprises plus grandes, ne reçoivent pas à temps le paiement de leurs clients, rencontrent des problèmes d'approvisionnement, etc. Un effet domino assez inquiétant pour faire redouter une nouvelle crise financière.

Il faut aussi compter les nombreuses TPE et PME noyées sous les emprunts, notamment ceux contractés pendant la pandémie. Au Japon, par exemple, on a compté +80 % de TPE et PME sollicitant des associations de crédit pour rembourser un prêt (chiffre : Nikkei). Au Canada, les entreprises évoquent une pression supplémentaire à cause des hausses du taux d'intérêt.

Difficultés des expatriés entrepreneurs : quelles solutions ?

Quelles solutions pour les expatriés entrepreneurs ? Que faire quand les affaires ne marchent plus ? On pense d'emblée à des solutions radicales : fermer son activité et rentrer dans son pays, envisager une nouvelle expatriation, ou se reconvertir et changer de statut (devenir salarié, par exemple). Mais avant d'en arriver à ces solutions extrêmes, il convient de chercher les causes du ralentissement des activités.

Comprendre l'origine du problème

Les affaires sont-elles en berne depuis longtemps ou ont-elles subitement baissé ?

La baisse d'activité est-elle due à la pandémie ?

Les difficultés rencontrées sont-elles dues à un prêt qu'on ne parvient pas à rembourser ? À des fonds qu'on n'arrive pas à percevoir ? À une baisse de la consommation ? À un manque de clients ?

Ces questions sont indispensables pour évaluer les bonnes stratégies à mettre en place. Par exemple, un manque de clients peut pousser à relancer les prospections, à mettre au point une nouvelle stratégie de marketing et de communication, à revoir sa zone de chalandise, à repenser le produit par rapport à la clientèle ciblée.

Les besoins de la clientèle de telle ville à l'étranger ne conviendront pas forcément aux besoins de tels autres clients. La zone de chalandise a peut-être évolué avec la pandémie, la crise énergétique, la crise du logement, etc. Il s'agit peut-être d'un problème de prix. Comment font les concurrents ? Comment se repositionner sur le marché pour capter à nouveau la clientèle ? Ces réflexions, qui s'apparentent un peu à un nouveau business plan, permettront d'étudier plus en profondeur la situation de l'entreprise à l'étranger, pour trouver des solutions adéquates.

Se faire aider

Des analyses similaires sont à effectuer selon le ou les problèmes rencontrés par l'entrepreneur expatrié. Mais il n'est pas toujours facile de s'auto-évaluer. Aux potentielles difficultés de l'expatriation s'ajoute le choc personnel. L'expat entrepreneur peut être fragilisé par la situation qu'il subit ; fragilité sur le plan financier (ne plus pouvoir se verser de revenu), sur le plan familial, relationnel… S'il est parti en famille, la situation de l'entreprise impacte aussi celle des autres membres du foyer. D'où l'importance de se faire aider.

Tout d'abord, sur le strict plan de l'entreprise, s'entourer de professionnels connaissant le marché local peut permettre de mieux comprendre pourquoi les affaires ne tournent plus, et de trouver des solutions. On parle davantage d'aides à la création d'entreprise, mais existe-t-il des aides financières pour soulager les expats entrepreneurs en difficulté ? Les États ont débloqué des prêts pour les entreprises en difficulté durant la Covid, mais ces coups de pouce sont terminés, et les remboursements parfois rendus très compliqués à cause des difficultés qui durent.

Il faut penser à toutes les éventualités, y compris à celle du redressement judiciaire ou de la mise en faillite. Quel est le droit du pays d'accueil en matière de création d'entreprise, de cessation d'activité ? Que faire si l'entreprise est endettée ? Sous quel statut juridique a-t-on crée l'entreprise ? Les biens personnels risquent-ils d'être saisis ? Solliciter un conseiller juridique permettra d'établir le meilleur plan pour l'entreprise, en fonction de son statut.

Il est tout aussi utile de fréquenter des groupes d'entrepreneurs expats ou non. Ils apporteront un soutien psychologique bienvenu, et des conseils utiles pour faire face à la situation.

Quand la fermeture de l'entreprise s'impose

S'il s'avère impossible de redresser l'entreprise, il faut oser cesser son activité, pour mieux recommencer. Là encore, l'assistance d'un spécialiste du droit local est recommandée, tout comme ses conseils pour rebondir. La fermeture d'une entreprise à l'étranger n'est pas forcément synonyme d'échec. Au contraire, l'expérience tirée de l'échec permettra de mieux envisager un nouveau projet professionnel.