Découvrez les pays les plus libéraux en matière de visas

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Publié le 2023-10-09 à 10:00 par Asaël Häzaq
Venir au Kenya sans se soucier de la question du visa ? C'est ce qu'envisage le président kenyan pour tous les voyageurs étrangers, indépendamment de leur nationalité. Retour sur l'annonce et décryptage. Quels sont les pays les plus libéraux en matière de visas ?

Bientôt plus besoin d'un visa pour se rendre au Kenya ?

« Bienvenue à la maison ». Le président du Kenya, William Ruto ouvre le premier Sommet africain sur le climat en rappelant que « le Kenya est le lieu où l'humanité a commencé ». Le Sommet, qui s'est tenu du 4 au 6 septembre, à Nairobi, la capitale kenyane, a notamment rassemblé la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le Coordinateur Résident des Nations Unies au Kenya Stephen Jackson, l'envoyé spécial du président Biden pour le climat, John Kerry et le secrétaire général de l'ONU António Guterres.

C'est lors de son discours d'ouverture que le président Ruto, également docteur en écologie végétale, rappelle que le Kenya est le berceau de l'humanité. C'est à partir de ce territoire que les humains ont commencé à parcourir librement le monde. C'est cette liberté qu'entend réintroduire le président kenyan, en supprimant l'exigence de visa pour tous les voyageurs étrangers. Actuellement, les ressortissants du Ghana, de Singapour, de la Jamaïque, de Chypre, des Bahamas, de la Barbade ou encore de l'Afrique du Sud sont exemptés de visa pour aller au Kenya. Cet été, le Kenya a signé des accords avec de nouveaux pays : le Sénégal, l'Indonésie, les Comores, la République du Congo.

En mai, le président Ruto évoquait une suppression de l'obligation de visa pour les ressortissants des pays membres de l'Union africaine (UA). En juillet, en marge de la 5e réunion de coordination semestrielle entre l'Union africaine (qui s'est tenue à Nairobi), le président Ruto parle d'une exemption de visa pour les ressortissants africains. Son annonce lors du Sommet africain est donc un nouvel élargissement. Il est « injuste de demander un visa à quiconque rentre chez lui » affirme le président Ruto, qui « envisage sérieusement » d'appliquer l'exemption de visa s'appliquerait à tous les voyageurs, indépendamment de leur nationalité.

Visas : l'approche libérale à l'épreuve des inégalités

Le Henley Passport Index, qui classe les destinations accessibles sans visa, permet de mettre en lumière les différences existant entre les pays. Les États les plus libéraux sont ceux octroyant le plus d'exemptions de visa. À l'opposé, les États les plus stricts n'autorisent que peu d'exemptions de visa. En 2023, Singapour se classe premier, avec 192 destinations accessibles sans visa. Avec 190 destinations, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne sont 2e. L'Autriche, la Finlande, la France, le Japon, le Luxembourg, la Corée du Sud et la Suède sont 3e, avec 189 destinations accessibles sans visa. À l'opposé, la Syrie, l'Irak et l'Afghanistan sont respectivement 102, 103, et 104e, avec 30, 29 et 27 destinations accessibles sans visa.

Mais le rapport pointe aussi les inégalités en matière d'accords bilatéraux. C'est d'ailleurs en vue résoudre ce problème que le président Ruto a entrepris sa tournée d'été pour signer des accords d'exemption de visa avec d'autres pays africains. Défendre et améliorer la libre circulation des ressortissants africains en Afrique est d'ailleurs au cœur de la stratégie de l'Union africaine. Le Rapport 2021 sur l'ouverture des régimes de visa en Afrique met en lumière le lien entre libre circulation et développement économique.

Opter pour une politique plus libérale en matière de visa serait aussi un moyen de lutter contre les inégalités. Or, le Henley Passport Index rapporte que les États du Sud sont davantage exclus des accords bilatéraux. Une inégalité qui, selon l'étude, contribue à un creusement des inégalités Nord/Sud, avec de larges zones exclues de la liberté de libre circulation.

Visas : vers plus de facilité ou de contraintes ?

Faut-il élargir l'initiative kenyane au monde ? Ce n'est pas l'option retenue par les autres puissances. Ainsi, l'Union européenne (UE) renforce ses frontières extérieures pour notamment « préserver la sécurité de l'Europe », et « protéger le principe de libre circulation des personnes » à l'intérieur de ses frontières. L'UE a mis à jour son système d'information sur les visas (en 2021) pour rendre plus simple l'octroi de visa de courts séjours. Le système européen d'information et d'autorisation concernant les voyages (ETIAS) participe aussi à la simplification des procédures d'entrée et de sortie du territoire européen.

Mais si les 27 pays européens sont habilités à délivrer les visas Schengen, tous ne montrent pas la même souplesse. L'Islande est le pays le plus libéral. D'après les données de SchengenVisaInfo, à peine 146 demandes de visa ont été refusées en 2022, sur 7715 dossiers, soit 1,9 % de refus, ou presque 100 % de visa accordé. La Lituanie arrive 2e (7,8 % de taux de refus). La Lettonie est 3e (9,5 % de taux de refus), juste devant la Slovaquie, ex aequo avec la Finlande. Cette ouverture s'explique en partie, car ces États font partie des moins sollicités pour les demandes de visa.

À l'inverse, Malte, la Suède, la Belgique, la France et la Norvège reçoivent bien plus de demandes, entre 22 275 (Malte) et un peu plus de 170 000 (Belgique). La France explose les compteurs avec 1 918 515 demandes de visa. Les taux de refus grimpent à 35,5 % pour Malte, 28,4 % pour la Suède, 27,1 % pour la Belgique, 21,3 % pour la France et 20,3 % pour la Norvège.

Demandes de visa : une affaire diplomatique

Des inégalités existent aussi en fonction de la nationalité des demandeurs. La politique n'est jamais loin, et les brouilles diplomatiques entre deux États se répercutent négativement sur les voyageurs. D'après SchengenVisaInfo, en 2022, la France a rejeté 48,2% des demandes de visas des ressortissants algériens. En cause, une décision de Paris datant de septembre 2021, visant à diminuer de moitié l'octroi de visas aux ressortissants algériens, marocains et tunisiens. Décision prise en réaction aux tensions entourant les obligations de quitter le territoire français (OQTF). La France reproche en effet aux 3 États cités une lenteur dans la délivrance des laissez-passer, documents pourtant nécessaires pour faire appliquer les OQTF. On est encore loin du modèle sans visa prôné par le Kenya.