Permis de travail : que risquent les expatriés qui s'absentent longtemps de leur pays d'accueil ?

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Publié le 2022-11-22 à 14:00 par Asaël Häzaq
Le permis de travail permet-il de tout faire ? À l'heure du télétravail à l'international et du nomadisme numérique, on pourrait prendre le permis de travail pour un visa tout permis. S'il accorde effectivement des droits, il est également assorti de règles. Quels risques en cas d'infraction ? Peut-on quitter son pays d'accueil autant de temps que l'on veut ?

Permis de travail et absences répétées : le Koweït serre la vis

La crise sanitaire et le boom du télétravail ont amené de nouvelles pratiques, parfois à la limite de la légalité. Certains salariés partent télétravailler à l'étranger dans le dos de leur employeur. Ils croient profiter d'un vide juridique, mais en réalité, commettent bien une infraction. Que dire des salariés expatriés ? Peuvent-ils quitter leur pays d'accueil à leur guise, et pour la durée qu'ils veulent ? La réponse est non. La récente annonce du Koweït rappelle que le permis de travail – et tout visa – est conditionné par des règles. En cas d'infraction, on risque l'annulation pure et simple du titre de séjour.

La décision est tombée le 24 octobre. Le Département des affaires de résidence du ministère de l'Intérieur du Koweït ajoute une disposition à sa loi sur le séjour des expatriés. Les visas des étrangers qui quittent le territoire pendant 6 mois ou plus seront annulés. Auparavant, seuls les titulaires d'un visa privé résidant 6 mois et plus hors du Koweït étaient concernés. Le calcul du temps d'absence commençait en mai 2022. La nouvelle mesure entrera en vigueur le 31 janvier 2023 avec effet rétroactif au 1er août 2022. C'est à partir de cette date que sera calculé le temps d'absence hors du Koweït. Les permis de séjour des expatriés qui auront séjourné 6 mois ou plus hors du Koweït seront automatiquement annulés. Sont concernés : les visas d'auto-parrainage, de famille, les visas étudiants ou gouvernementaux.

Déterminé à accélérer la koweïtisation des emplois, le gouvernement veut inverser la tendance. La population totale du Koweït est estimée à 4,6 millions d'habitants, dont 3,4 millions d'étrangers. Le gouvernement veut ramener l'équilibre, et commence par le marché du travail. Officiellement, la révision de la loi sur le séjour des expatriés vise à stopper le commerce de permis de travail illégaux. En toile de fond, une ligne qui se durcit contre les étrangers, accusés par certains d'avoir plombé l'économie durant la Covid.

Permis de travail et séjours à l'étranger : que disent les autres États ?

Beaucoup d'autres États appliquent une mesure similaire : le titre de séjour d'une personne séjournant hors du pays d'accueil pendant 6 mois ou plus sera annulé.

Les Émirats arabes unis (EAU) précisent que la mesure concerne les expatriés vivant hors du territoire 6 mois ou plus de manière continue. Mais le gouvernement prévoit des exceptions, qui touchent notamment certains travailleurs expatriés : les expatriés qui travaillent dans le secteur public et qui sont envoyés par leur employeur pour suivre une longue formation à l'étranger sont autorisés à rester à résider hors des EAU le temps de la formation (y compris si elle dure plus de 6 mois). Même règle pour les expatriés travaillant pour un employeur qui détient des bureaux à l'étranger. Les expatriés accompagnant des diplomates émiratis sont aussi visés par cette exception.

Aux États-Unis, la règle est claire : le détenteur d'une carte verte (green card) qui séjourne à l'étranger plus de 6 mois, ou qui a multiplié des séjours hors du territoire américain risque « l'abandon » de sa carte verte. Les risques plus grands si les services du CBP (Customs and Border Protection) ont adressé un avertissement. La règle semble plus floue concernant les résidents permanents légaux (lawful permanent residents (LPR)). En principe, le détenteur d'un LPR qui séjourne à l'étranger de manière « non temporaire » perd son statut. Mais que faut-il entendre par « non temporaire » ? En l'absence de durée quantifiée, c'est le bon sens qui prévaut : la durée de séjour aux États-Unis doit être supérieure à la durée totale des séjours passés hors du sol américain. Ainsi, les services du CBP pourront confirmer que la résidence principale est bien aux États-Unis.

Les limites du télétravail à l'étranger

Le permis de travail n'est pas une autorisation de voyage. C'est ce que rappellent les autorités canadiennes. C'est aussi ce que rappellent les juristes, confrontés à la vague du télétravail et du nomadisme numérique. Par principe, le permis de travail est délivré par un pays pour exercer une activité professionnelle donnée. Si les courts séjours à l'étranger sont permis, télétravailler dans un pays autre que son pays d'accueil pour une longue durée n'est pas autorisé.

En somme, pour conserver son statut, il faut maintenir des liens avec le pays d'accueil, l'un des premiers étant la résidence. Les séjours passés à l'étranger ne doivent pas être supérieurs au temps passé sur le territoire du pays d'expatriation. En cas d'infraction, les sanctions sont lourdes : annulation du titre de séjour, avec toutes les difficultés que l'on peut imaginer pour refaire une demande de titre dans ce pays.