L'Allemagne souhaite faciliter l'accès à sa citoyenneté pour les expats

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Écris par Ameerah Arjanee le 15 novembre, 2022
Le gouvernement allemand a décidé d'assouplir ses lois sur la naturalisation. À compter de décembre 2022, des discussions seront en cours pour recommander que le nombre d'années de résidence nécessaires pour faire une demande de citoyenneté soit réduit de 8 à 5 ans. En outre, la double nationalité sera enfin autorisée pour tous les expatriés, et non plus seulement pour quelques privilégiés. À l'heure où le pays souffre d'une pénurie de main-d'œuvre, ces amendements devraient attirer davantage d'expatriés qui espèrent devenir des citoyens européens.

La double nationalité : autrefois réservée à quelques expatriés

L'Allemagne faisait partie des rares pays de l'Union européenne à restreindre la double nationalité. L'Autriche, les Pays-Bas, la Slovaquie, la Lituanie et la Lettonie sont d'autres pays de l'UE qui appliquent des restrictions similaires.

En revanche, d'autres pays de l'UE économiquement puissants et comptant de nombreux immigrants, comme la France, l'Espagne et l'Italie, acceptent la double nationalité depuis très longtemps. Les grands pays d'immigration en dehors de l'UE, comme le Royaume-Uni, les États-Unis, le Canada et l'Australie, reconnaissent également la double nationalité. Les politiques restrictives de l'Allemagne sur cette question lui ont fait perdre un avantage concurrentiel par rapport à ces autres concurrents dans la course mondiale aux immigrants qualifiés. Ce n'est pas que la double nationalité était impossible à obtenir en Allemagne, elle était simplement limitée à quelques cas très spécifiques. Elle était autorisée pour les expatriés d'autres pays de l'UE ou de Suisse. Elle était également autorisée pour les expatriés dont le pays d'origine n'autorisait pas la déchéance de leur nationalité (Maroc, Argentine, Uruguay, Mexique). D'autres exceptions étaient prévues pour les étrangers qui espéraient acquérir la nationalité par filiation ou par ascendance. Elle était aussi exceptionnellement autorisée pour les Allemands de première génération qui avaient un parent né à l'étranger et un parent allemand. Ces Allemands de la première génération peuvent également avoir deux parents nés à l'étranger, à condition que l'un de ces parents ait vécu en Allemagne pendant au moins huit ans au moment de la naissance de l'enfant. Il existait aussi une exception humanitaire pour les expatriés qui ne peuvent plus renoncer à leur ancienne nationalité en raison de leur âge avancé, de problèmes de santé ou de contraintes financières. Renoncer à sa nationalité peut être une procédure coûteuse. Il faut, par exemple, débourser 2 350 dollars américains pour renoncer à sa nationalité américaine. Les expatriés qui souhaitent obtenir la double nationalité doivent demander un permis de conservation (Beibehaltungsgenehmigung").

Révision des 8 ans de résidence autrefois exigés pour la naturalisation

Avant les dernières réformes, l'Allemagne exigeait également une plus longue période de résidence avant que les expatriés ne puissent demander la citoyenneté. Les expatriés devaient avoir séjourné en Allemagne pendant 8 ans consécutifs avant de pouvoir renoncer à leur ancienne nationalité et devenir citoyens allemands.

En comparaison, en France, au Royaume-Uni, aux États-Unis et aux Pays-Bas, les expatriés doivent avoir vécu dans le pays pendant seulement 5 années consécutives pour pouvoir demander la citoyenneté. En Australie, l'exigence est encore plus faible : 4 ans. Au Canada, les expatriés doivent avoir vécu dans le pays pendant 3 des 5 dernières années pour entamer le processus de naturalisation. S'il est vrai que l'Espagne et l'Italie ont un temps d'attente encore plus long (10 ans), l'Allemagne n'offrait toujours pas les conditions les plus compétitives.

Le précédent gouvernement allemand, dirigé par Angela Merkel de 2013 à 2021, s'est montré inflexible lorsqu'il s'agissait de réformer les règles de citoyenneté. En septembre 2021, une nouvelle coalition tripartite au pouvoir et un nouveau chancelier, Olaf Sholz, ont été élus. Ce nouveau gouvernement est plus enclin à modifier les lois sur la citoyenneté, surtout après que la pandémie a entrainé une pénurie de main-d'œuvre dans le pays.

Des lois sur la citoyenneté plus souples pour stimuler l'immigration

À partir de décembre 2022, l'État allemand autorisera enfin la double nationalité. Les précédents critères d'éligibilité hyperspécifiques pour la double nationalité deviendront caducs, puisque désormais, tout expatrié est éligible. Le nombre d'années de résidence pour demander la citoyenneté sera également réduit à 5 ans, de sorte qu'elle soit enfin à égalité avec d'autres terres historiques d'immigration. Pourquoi cet assouplissement des lois maintenant ? Cette réforme devrait jouer en faveur des objectifs de l'Allemagne en matière d'immigration. L'objectif actuel du pays en matière d'immigration est un chiffre ambitieux de 400 000 nouveaux travailleurs qualifiés (c'est-à-dire des migrants économiques) par an.

L'Allemagne doit faire face à une concurrence féroce de la part d'autres puissances d'immigration (souvent plus importantes) qui ont également augmenté leurs objectifs, notamment le Canada et l'Australie. La pandémie, la fermeture des frontières et la Grande Démission ont créé des pénuries de main-d'œuvre dans tous ces pays, qui sont maintenant engagés dans une course pour attirer les talents mondiaux afin de combler leurs postes vacants. L'assouplissement du parcours et des conditions d'obtention de la citoyenneté européenne attirera de nombreux expatriés qualifiés en dehors de la zone.

L'Allemagne connaît une pénurie de travailleurs qualifiés dans différents secteurs : les soins de santé, les soins aux personnes âgées, l'industrie manufacturière, la construction, les technologies de l'information, les sciences naturelles, l'ingénierie, la restauration, l'hôtellerie, les métiers spécialisés (par exemple : la plomberie, l'entretien des circuits électriques). Au début de cette année, Christian Duerr, un parlementaire de la coalition gouvernementale, a souligné que « la pénurie de travailleurs qualifiés est devenue si grave qu'elle ralentit considérablement notre économie. » L'assouplissement des lois sur la citoyenneté est l'une des nombreuses mesures prises par le gouvernement pour attirer les immigrants. En octobre, il a également augmenté le salaire minimum de 10,45 € à 12 € afin de rendre le pays plus attractif pour les travailleurs.