Royaume-Uni : 5 semaines pour traiter les demandes de visas étudiants internationaux

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Publié le 2022-06-29 à 10:00 par Asaël Häzaq
C'est une mise à jour qui fait parler : la Haute Commission britannique allonge le délai dans le traitement des visas étudiants à 5 semaines. En parallèle, les autorités annoncent un nouveau visa de travail réservé aux talents internationaux. Comment expliquer cette politique ?

Visa pour étudier au Royaume-Uni : pourquoi les étudiants internationaux doivent attendre

Sur son site web, le British Council joue la carte de l'apaisement. Michelle Donelan, ministre britannique des Universités, assure : « Le Royaume-Uni est toujours ouvert à tous les étudiants internationaux, y compris ceux de l'UE, et nous apprécions l'importante contribution qu'ils apportent à nos universités ». Il faudra juste patienter. Cinq semaines en moyenne donc. Une situation stressante pour de nombreux étudiants qui pensaient avoir passé toutes les barrières pour s'inscrire.

En parallèle, les autorités britanniques multiplient les appels aux talents internationaux. Dernier fait en date : la création d'un nouveau visa pour les diplômés des « meilleures universités du monde ». Avec ce visa, le pays veut retrouver les grâces des talents européens, privés de leur avantage à cause du Brexit. Il veut aussi booster des secteurs d'emploi sous pression, notamment dans la logistique, l'agro-alimentaire, et l'industrie. Seuls les diplômés (undergraduate/licence ou postgraduate/doctorat) des 50 premières universités étrangères pourront postuler pour un visa court : 2 ans (licence) ou 3 ans (doctorat). Il semble que le gouvernement mette la priorité sur ces diplômés, au détriment des étudiants étrangers.

Étudier au Royaume-Uni : les changements depuis le Brexit

Il y a clairement un avant et un après 1er janvier 2021, date d'entrée en vigueur du Brexit. La mobilité internationale obéit à de nouvelles règles. Il faut désormais un visa pour étudier au Royaume-Uni, que l'on soit ressortissant ou non d'un pays membre de l'Union européenne (UE). Seule exception : les cursus universitaires de moins de 6 mois. Les autres programmes (undergraduate, postgraduate échange universitaire, Erasmus...) suivent la nouvelle procédure. Le pays a bien tenté de trouver une solution pour reprendre les échanges universitaires, mais elle peine à convaincre.

Erasmus : le Pays de Galle et l'Irlande ripostent

Pour remplacer Erasmus, le gouvernement britannique a créé « Turing ». Lancé en grande pompe le 12 mars 2021, le programme Turing (hommage au célèbre mathématicien britannique) ne séduit pas. Il ne couvre pas les frais de scolarité, assure à peine une partie des frais de voyage des plus précaires… Étudiants et enseignants doivent tout faire à leurs frais. Le Premier ministre Johnson alloue volontairement une faible enveloppe au programme : un peu plus de 120 millions d'euros, contre près de 3,40 milliards d'euros pour le programme européen. Et les linguistes de dire que Turing ne remplace pas Erasmus, mais glisse plutôt vers un partenariat commercial. Rien à voir avec la philosophie d'échange et de partage promue par le système européen. Turing servirait en fait les intérêts de « Global Britain », philosophie pro Brexit aux parfums impérialistes développée par Boris Johnson.

Face à autant de mauvais points, certains organisent la riposte. L'Irlande a passé un accord pour rester dans le programme européen ; le gouvernement débloquera une enveloppe de 2,1 millions d'euros par an pour assurer la continuité des échanges universitaires. Le Pays de Galles va débloquer plus de 75 millions d'euros par an (en plus du financement de Londres) pour lancer son propre Erasmus. Piloté par l'université de Cardiff, le programme commencera en septembre prochain. Les établissements d'enseignement supérieur gallois pourront donc redémarrer les échanges d'étudiants et d'enseignants avec les partenaires européens.

En revanche, l'Écosse et la Grande-Bretagne font grise mine. La Commission européenne n'a pas cédé aux appels de l'Écosse pour rester dans le programme européen.

Hausse inquiétante des frais de scolarité

Depuis la sortie du Royaume-Uni de l'UE, tout est plus compliqué et plus cher. La hausse des frais de scolarité pèse particulièrement sur les budgets. Les frais de scolarité étaient déjà en hausse avant le Brexit. Ils ont explosé depuis : +50% pour une inscription en undergraduate (licence) ou postgraduate (master) dans un tiers des universités britanniques.

Une légère différence demeure cependant, pour les étudiants de l'Union européenne et de l'Espace économique européen (EEE). Ceux inscrits avant 2021 continuent de bénéficier d'un coût réduit et peuvent accéder aux bourses. Les autres payent les frais appliqués aux étudiants internationaux, qu'ils soient ou non ressortissants de l'UE/EEE.

Les diplomates s'alarment. Catriona Laing, Haute-commissaire britannique au Nigeria, presse les autorités de vite traiter les demandes des étudiants. Étudiants invités à postuler auprès des universités bien en avance, pour espérer commencer leur rentrée universitaire sereinement.

Grogne des étudiants étrangers privés de cours en présentiel

Les étudiants étrangers se désespèrent. Brexit et Covid ont fait fondre leurs finances. Les frais de scolarité n'ont pas baissé avec les cours à distance. Idem pour le loyer, que les étudiants ont payé même s'ils avaient dû retourner chez eux. L'on ne compte plus les cas d'étudiants étrangers contraints d'abandonner leurs études, leur projet de vie. En 2021, ils font circuler une pétition réclamant le remboursement des sommes payées. L'ignorance du ministère de l'Éducation n'a fait que renforcer leur grogne.

Que vaudra le diplôme ? Les étudiants de l'année 2020-2021 s'inquiètent. Leur diplôme aura-t-il la même valeur que ceux des autres ? Sera-t-il compétitif sur le marché du travail ? D'aucuns estiment avoir reçu un enseignement au rabais. La note est amère.

Attirer les diplômés internationaux : la stratégie britannique est-elle la bonne ?

États-Unis, Canada, France, Suisse, Australie… Les grandes puissances se disputent les talents étrangers. Le Royaume-Uni est certain d'avoir marqué un point en créant son nouveau visa de travail qui fait la promotion des grandes universités. Mais cette vision est-elle la bonne ? Les étrangers diplômés vont-ils affluer ?

Un nouveau visa de travail qui suscite la polémique

On l'appelle le « high potential individual visa ». Le gouvernement a choisi la liste des universités éligibles. Une liste restreinte. Aucune université d'Afrique, d'Amérique latine ou d'Asie du Sud-Est. Tollé du monde universitaire. Londres, embarrassée, garantit que seuls « la compétence et le talent » comptent. L'argument peine à convaincre. Car Londres se base sur des classements eux aussi polémiques, qui utiliseraient des critères non applicables dans toutes les universités, et qui délaisseraient les fameuses compétences personnelles de l'étudiant. Les critères retenus seraient avant tout commerciaux, dans la droite lignée du Global Britain.

Parce qu'ils ne délivrent qu'une information partielle, les classements ont toujours été contestés. Sortir de telle ou telle université ne garantit pas une expatriation meilleure au Royaume-Uni. Pire : en excluant d'office des populations, le pouvoir s'attire une nouvelle fois la grogne du monde universitaire et enseignant. La mobilité étudiante continuera, mais avec l'idée que le Royaume-Uni sélectionne les « cerveaux » qu'elle juge digne d'entrer sur son territoire.

De plus, rien ne dit que les candidats éligibles choisiront le royaume britannique. Le visa est trop court (2 à 3 ans à peine) pour permettre l'acclimatation. Rien n'est mécanique, et les talents, aussi brillants qu'ils soient, ne seront pas 100% opérationnels avant plusieurs mois. Leur visa se terminera alors qu'ils commenceront à peine à embrasser leur nouveau quotidien. Étrange système, pour un gouvernement qui veut booster son économie par l'emploi. Les détracteurs jugent la stratégie Johnson contradictoire et bancale.

Conseils pour les étudiants qui veulent partir au Royaume-Uni

  • Le pays

L'on parle officiellement de « Royaume-Uni de Grande Bretagne et d'Irlande du nord ». Mais depuis le Brexit, le pays est plus divisé que jamais. L'Écosse et l'Irlande du Nord ont voté en majorité contre la sortie de l'Union européenne. L'Angleterre et le Pays de galles ont voté pour. La victoire historique des unionistes aux élections de mai 2022 place le pays devant de nouveaux défis. Connaître ces points de culture vous permettra de mieux comprendre les conflits qui secouent le pays (surtout si vous faites vos études en Écosse ou au Pays de Galles).

  • Les visas

Il existe deux sortes de visas pour étudier au Royaume-Uni. Le premier est un visa de courte durée, de 6 à 11 mois. Selon la durée choisie, il coûte entre 112 et 186 euros. Il permet d'apprendre l'anglais ou de suivre une formation. Mais il ne permet ni d'étudier dans un établissement d'enseignement supérieur, ni de travailler. Ce visa n'est pas renouvelable.

Le second visa, est le « visa étudiant de niveau 4 ». Il concerne les étudiants ayant été reçus par un établissement accrédité par les autorités britanniques. Il permet de poursuivre des études supérieures sur une longue période. L'on peut aussi le prolonger et travailler.

Il n'y a plus de différence entre les ressortissants de l'UE et les autres. Tous doivent postuler auprès d'un établissement d'enseignement supérieur. Si leur dossier est validé, ils recevront une « confirmation d'acceptation d'études » (CAS) délivrée par leur future université. Ils devront prouver qu'ils sont aptes à suivre des cours en anglais en présentant un certificat. Ils devront également avoir un passeport valide.

Quelques différences concernant le coût du visa et les frais de santé : environ 400 euros pour une demande de visa étudiant; les Français bénéficient d'une réduction de 63 euros. Les étudiants étrangers paient 545 euros par an en couverture santé, mais ceux possédant une carte européenne d'assurance maladie pourront être intégralement remboursés.

À noter que ces changements ne s'appliquent pas aux Irlandais.

  • Les démarches

Internet regorge d'articles sur les nouvelles règles depuis le Brexit. Reportez-vous cependant en priorité vers le site web du gouvernement britannique et celui du British Council. Vous y trouverez des infos fiables (délai de traitement du visa, frais de scolarité, valeur des diplômes etc.). Côté logement, faites appel à votre université. Elle dispose peut-être d'un campus et/ou a des partenariats avec des agences immobilières. Consultez les groupes étudiants (notamment sur les réseaux sociaux). Évaluez votre quartier : sans surprise, Londres et le Sud-Est de l'Angleterre sont surchargés et chers. Les villes moyennes d'Écosse, du nord de l'Angleterre ou du pays de Galles sont moins chères.

  • L'expatriation

Planifiez toutes les démarches administratives à faire avant de partir. Vérifiez la validité des diplômes acquis dans votre pays. Signalez votre départ à votre banque, votre assurance maladie... Résiliez vos contrats (téléphone, abonnements divers...). Vous pouvez conserver les abonnements SVOD qui disposent d'une version anglaise. À votre arrivée, inscrivez-vous sur le registre consulaire de votre pays. Pensez à votre compte bancaire : 100% en ligne ou dans un établissement britannique ? Dans l'idéal, voyagez quelques semaines avant la rentrée, pour vous installer plus sereinement, et profiter des premiers instants de votre séjour.

  • L'anglais

Le nouveau système d'immigration britannique est à points. Il en faut au moins 70 pour faire sa demande de visa. La maîtrise de l'anglais rapporte 10 points. Ne faites pas l'impasse sur ces points et travaillez votre anglais bien avant le voyage. Il existe des applications gratuites d'échanges linguistiques. N'hésitez pas à avoir régulièrement votre « english time ». Suivez les informations en anglais. Lecture, musique, activités diverses... mettez plus d'anglais dans votre quotidien.

  • La recherche d'emploi

Votre université a certainement créé un service pour accompagner les étudiants à chercher un emploi. Renseignez-vous concernant les restrictions éventuelles de votre visa étudiant, et sa conversion en visa de travail. Travaillez votre CV et votre réseau. Restez positif et croyez en vos compétences. Le marché du travail britannique est très flexible et dynamique.

  • État d'esprit

Votre diplôme est tout aussi important que votre savoir-être. Soyez ouverts d'esprit et curieux. Ne pensez pas tout connaître du Royaume-Uni. La vie sur place est souvent bien différente de l'image véhiculée. Intégrez des groupes étudiants, pratiquez vos passions ou découvrez d'autres activités. Vous pouvez dès à présent fréquenter des groupes sur les réseaux sociaux pour vous aider à vous mettre progressivement à l'heure anglaise. Mais pas de panique. Des erreurs, vous en ferez. C'est aussi comme ça qu'on apprend. Donnez-vous le temps de vous acclimater à votre nouvelle vie.