35 ans d'Erasmus : une incroyable expérience de vie à l'étranger

Vie pratique
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Publié le 2022-02-04 à 10:00 par Asaël Häzaq
« Merci Erasmus ». Sur les réseaux sociaux, les commentaires pleuvent dans toutes les langues. Né en 1987, le programme de mobilité internationale a fêté ses 35 ans le 20 janvier dernier. Retour sur l'une des plus grandes réussites de la politique européenne à travers le regard de celles et ceux qui ont vécu l'aventure.

Merci Erasmus

Symbole du vivre ensemble, le programme Erasmus permet aux étudiants de poursuivre leur cursus dans un pays de l'Union européenne (UE).  « C'est ma plus belle aventure » témoigne Méxane, ancienne étudiante en Erasmus à Rome. Elena renchérit : « Impossible d'oublier Erasmus ». Lens se souvient de son année en Pologne « Erasmus a changé ma vie : j'y ai rencontré plein d'amis venant de plein de pays différents. Merci Erasmus. » Même reconnaissance pour Roberta : « J'ai amélioré mon anglais, j'ai grandi, je me suis fait des amis. Merci Erasmus ! » Les politiques aussi y vont de leur souvenir, saluant un programme illustrant bien les valeurs de l'UE. Assistant parlementaire à Paris, Maxime Bigot tweete : « Vivre Erasmus en Suède a été pour moi le début de l'indépendance, la découverte d'autres perspectives sur le monde, des amis de toutes les nationalités unis à vie par la même expérience. Heureux que d'ici 2027, 10 millions de jeunes puissent découvrir notre Europe. » Même reconnaissance pour Claire Lejeune, collaboratrice parlementaire : « Pour moi Erasmus+ était dans un pays partenaire : la Corée du Sud ! Une superbe expérience que je souhaite à chacun de pouvoir expérimenter. »

Erasmus+ pour toucher tout le monde

Erasmus rencontre vite un grand succès. En 2014, le programme grandit et devient Erasmus+. Il s'ouvre désormais aux demandeurs d'emploi, aux apprentis, aux formateurs, aux jeunes diplômés, aux collégiens et aux lycéens. Le 7 janvier, le journal télévisé France 2 donne la parole à deux apprentis venus se former à Göteborg, en Suède. Louis est apprenti cuisinier, Nicolas, apprenti pâtissier. Sylvain Marron, qui accueille Nicolas dans sa pâtisserie, est arrivé en Suède il y a 20 ans. Il encourage les jeunes à suivre l'exemple de Nicolas : « On a la possibilité d'envoyer les gens en Europe et d'avoir une structure, des moyens financiers… Pour les jeunes, c'est une chance. » Nicolas reconnaît que « sans la bourse, ça n'aurait pas été possible. » L'apprenti touche 1500 euros par mois d'Erasmus et Pôle emploi, bourse adaptée au niveau de vie en Suède. Jeff Lambert, qui emploie Louis dans son restaurant, voudrait un système encore plus ambitieux. Il regrette que seuls 10% des Erasmus soient des apprentis et plaide pour que les écoles se structurent en « plateforme européenne », car « aujourd'hui, les élèves ne savent pas où chercher. Et nous, les sociétés, on ne sait pas où les chercher. » Les deux apprentis confirment et saluent l'initiative de leur professeure française. Sans elle, ils n'auraient jamais envisagé de partir à l'étranger. Pour Ricardo aussi, il fallait oser partir. L'apprenti témoigne lors de la journée anniversaire des 35 ans d'Erasmus : « Après 8 mois de persévérance, je pars en Allemagne […] je dois relever plein de défis […]. Je souhaite à tous ceux qui rêvent de découvrir le monde d'oser […] car le monde leur est accessible. » 

C'est justement le message que veut faire passer Erasmus. 12 millions de personnes ont pu bénéficier du programme depuis sa création. Prochain objectif : viser les 10 millions de citoyens européens bénéficiaires à l'horizon 2021-2027. La commission européenne augmente de 80 % le budget Erasmus pour cette période (par rapport à la période précédente, 2014-2020). En partenariat avec Pôle emploi, l'organisme s'oriente vers une communication plus ciblée, surtout envers les apprentis et les demandeurs d'emploi. Marion Rolle, en charge des projets européens à Pôle emploi, revient sur son propre parcours et tweete : « Il y a 8 ans, je vivais Erasmus en Estonie. 5 ans plus tard, je m'engage dans la démocratisation de la mobilité des apprentis. Depuis peu ce sont les demandeurs d'emploi que j'accompagne. Erasmus+ est plus qu'une expérience, ça peut être un chemin de vie. » 

Inclusion et diversité

Marquée par les expériences positives, la journée anniversaire se tourne également vers l'avenir, avec les conclusions du Forum Citoyen Erasmus. 35 jeunes ayant expérimenté le programme et 35 ne l'ayant jamais fait ont planché sur les améliorations à apporter. Le journal français Les Echos rapporte le constat de Rémi, l'un des participants : « Tout le monde a le droit de partir, mais tout le monde ne le sait pas. » Tristan, lui, a franchi toutes les barrières pour relever le « challenge ». L'élève ingénieur en fauteuil électrique a passé 6 mois dans une université suédoise, et témoigne dans le journal le Monde : « On s'est mobilisés un an avant le départ pour trouver du personnel en Suède, le bon logement, chiffrer le surcoût et réunir les justificatifs nécessaires. » Soit 40 000 euros. Tristan est aidé par un auxiliaire de vie. Un coût supplémentaire pour l'étudiant, sachant que le salaire suédois de ce professionnel est trois fois plus élevé qu'en France. Le conseil général prend en charge une partie des coûts. Le projet devient réalité. Pour Tristan, la Suède est un choix stratégique : « C'est un pays « vélo-friendly ». Et ce qui est adapté pour un vélo l'est aussi pour un fauteuil ! » Il propose cependant une amélioration dans le programme Erasmus : « une note d'accessibilité pourrait être attribuée à chaque université d'accueil. »

Pour être connu et accessible au plus grand nombre, le programme Erasmus 2021-2027 s'oriente vers encore plus « d'inclusion et de diversité. » Sur le plan des ressources, la hausse budgétaire permettra d'offrir des compléments de bourses aux bénéficiaires ayant des revenus modestes. Sur le plan de la communication, des campagnes seront menées pour en finir avec l'image de « l'Auberge espagnole », film français au succès mondial. Loin d'être une année sabbatique festive, Erasmus est une année de travail. « J'ai dû bosser comme un dingue pour améliorer mon anglais », se souvient Camille. « J'avais des notes tout juste, or les notes comptent pour valider son année. Certains rient moins à leur retour en France. Oui, on découvre beaucoup de choses, et on travaille aussi. » Bertand a appris, trop tard, qu'Erasmus était aussi à destination des demandeurs d'emploi. « Aujourd'hui, je suis casé mais ça reste un énorme regret pour moi. Les gens ne s'imaginent pas à quel point partir à l'étranger est compliqué, surtout quand on vient d'un milieu modeste. » Message reçu. Loin d'être réservés à une élite, les programmes Erasmus touchent tous les publics. Inclusion, diversité, mobilité et partage sont, plus que jamais, les moteurs de la « nouvelle génération Erasmus ». 

Porte sur le monde, vecteur de socialisation

L'on oublie souvent que la liberté de circulation entre les pays de l'UE ne va pas de soi, mais résulte d'une volonté commune des États membres. Le Brexit signe la fin des échanges avec le Royaume-Uni. Sur les réseaux sociaux, beaucoup d'anciens et aspirants Erasmus regrettent la sortie du Royaume-Uni du programme. « C'est un vrai gâchis. Erasmus est un tremplin indéniable. Moi, ça m'a ouvert des portes professionnelles. Surtout, ça m'a ouvert au monde », témoigne Sora, chercheuse. Tsiferana confirme. Le data scientist a témoigné lors de la journée anniversaire des 35 ans d'Erasmus : « Depuis tout petit, je rêvais de découvrir la Réunion. Grâce au projet Erasmus+ de l'océan Indien je me suis enrichi de la diversité culturelle de l'île. Je me suis ouvert au monde. Notre plus grande richesse : notre unité dans la diversité ! » Un sentiment de reconnaissance partagé par beaucoup. Alors que la défiance semble gagner du terrain en Europe, Erasmus+ rassemble tous les citoyens. Pour Loren, le programme a agi comme un « révélateur », un « choc bienvenu », qui lui a permis de découvrir qu'il n'était « pas seul, mais entouré de plein d'autres gens comme lui, avec des rêves et des projets ». 

Projets professionnels qui deviennent parfois aventure d'une vie. Pour Manuella, c'est « beaucoup d'amis européens, une carrière dans l'industrie automobile, un mari et des enfants. Rien à voir avec mes projections, mais la vie est pleine de surprises ! Avec mon mari suédois, on s'amuse à dire que c'est un « mariage Erasmus » réussi ! » Mariage Erasmus aussi pour Louis, qui a rencontré son épouse lors de son année en Estonie. « Nos deux enfants parlent couramment français, estonien et anglais. Nous sommes une heureuse famille européenne. » Sonia, elle, a rencontré son mari en France. Mariée depuis 5 ans, elle exhorte son entourage à tenter l'aventure Erasmus et conclut : « Erasmus, c'est pour tout le monde. »