Conseils d'une psychologue : Comment célébrer la période festive pendant une pandémie

Comment le reconfinement affecte-il les expatriés ?

Commençons par l'aspect positif. Nous, les expatriés, sommes plus ou moins « formés » pour faire face à des situations difficiles et inattendues. Déménager à l'étranger est une étape délicate en soi, allant de la gestion du stress à la manière de faire face aux « surprises ». Même s'il s'agit aujourd'hui d'une situation exceptionnelle, avec la crise de COVID-19, en tant qu'expatriés, nous sommes en quelque sorte armés pour faire face à cela. Un défi que nous avons en commun est celui de maintenir nos relations avec nos proches dans notre pays d'origine. Généralement, nous savons comment y faire face et avons plus de moyens que les personnes qui n'ont jamais vécu à l'étranger. Nous avons la capacité d'aborder la distance de différentes manières. Nous avons intégré cette capacité dans nos vies de tous les jours. Nous savons donc que nous devons prendre l'initiative si nous ne voulons pas perdre le contact. Bien sûr, l'inconvénient (qui est l'une des principales raisons pour lesquelles nous sommes devenus expatriés) c'est notre choix. Nous avons choisi de partir explorer un nouveau pays et profiter du type de vie qu'il peut nous offrir. L'inconnu fait partie de cette aventure qu'est l'expatriation. Cependant, se faire de nouveaux amis et sortir ensemble peut ressembler à un parcours du combattant.

Quelles sont les conséquences du temps passé en isolement sur la vie sociale des expatriés ?

L'aspect du « libre arbitre » fait toute la différence. Nous avons une certaine perception du temps que nous devons passer à l'extérieur et à l'intérieur. C'est totalement différent si nous choisissons de rester à l'intérieur ou de limiter nos interactions. Par exemple, les introvertis souffrent moins que les extravertis parce qu'ils apprécient le temps qu'ils arrivent à passer seuls. Néanmoins, ils n'ont pas la capacité de contrôler le moment et la façon de nouer des liens avec d'autres personnes lorsqu'ils le souhaitent.

Cela dépend aussi de si l'on vit seul, en couple, avec des amis ou en famille avec des enfants. Il n'y a pas de réponse standard. Mais je peux dire que le confinement a des conséquences sur la santé mentale, comme l'anxiété et la dépression, que l'on soit expatrié ou pas.

Qu'en est-il de l'angoisse liée à la propagation du coronavirus ? Comment doit-on s'y prendre pour la reconnaître et la surmonter ?

Beaucoup de gens pensent que l'on ne ressent l'anxiété que lorsqu'on a une crise de panique ou lorsqu'on dépend de médicaments. En vérité, l'anxiété peut se manifester sous différentes formes :

• Fatigue: on n'arrive pas à bien dormir, et on se sent perturbé même si on arrive à dormir

• Problèmes de concentration

• Se sentir tout le temps inquiet pour presque tout

• Paralysie, stagnation.

Ces quelques signes d'angoisse, parmi tant d'autres, devraient être un avertissement pour tout le monde !

Comment y faire face?

La première étape est d'accepter qu'on pourrait avoir besoin d'aide. Ce n'est pas « normal » de se sentir instable et agité tout le temps. En tant qu'expatriés, nous sommes des personnes fortes et indépendantes, mais il faut aussi se permettre de se sentir vulnérables. Reconnaître le besoin de soutien et demander de l'aide sont des signes de maturité et d'estime de soi.

Évitez d'intérioriser ce genre de sentiments. Une bonne façon de lutter contre cela est de partager ce que l'on ressent avec les personnes qui nous sont chères. Dans la mesure du possible, essayez de rechercher de l'aide auprès des personnes qui ont eu la même expérience, ou auprès d'un psychologue ou d'un conseiller en expatriation.

Quels conseils donneriez-vous aux expatriés pour surmonter le reconfinement ?

Je leur donnerai deux conseils qui, à mon avis, sont pertinents pour prévenir les conséquences importantes sur la santé mentale :

Préservez et revendiquez votre espace

Si vous partagez la maison avec quelqu'un d'autre (qui que ce soit), essayez de trouver un espace et du temps exclusivement pour vous. Cela peut être votre voiture ou votre grenier. Quoi qu'il en soit, préservez cet espace pour vous pendant au moins une heure tous les jours pour pouvoir y faire ce que vous voulez. Vous pouvez également le conseiller aux autres personnes qui vivent sous le même toit que vous.

Restez connecté.

La connexion est l'ennemi de la solitude, de l'anxiété et de la dépression. Il s'agit non seulement du fait de parler, mais aussi d'avoir des conversations avec des personnes qui vous font vous sentir mieux et qui vous procurent un fort sentiment d'appartenance.

Voici quelques idées :

Prenez un café virtuellement tous les jours avec un proche, un ami, un collègue ou un membre de la famille qui se trouve dans votre pays d'origine. Pourquoi ne pas contacter cette personne que vous suivez depuis des mois sur Instagram ? Aujourd'hui, nous sommes tous sur le même bateau, donc je suis à peu près sure que la plupart des gens vous donneront une réponse positive.

Rejoignez des clubs de lecture ou de cinéma virtuels. Cela vous permettra non seulement de passer du temps seul mais aussi de discuter avec d'autres personnes au sujet des films ou des livres que vous avez particulièrement appréciés.

L'échange linguistique peut également se faire virtuellement, surtout si vous souhaitez apprendre la langue de votre pays d'accueil. Publiez une annonce sur les réseaux sociaux ou demandez autour de vous. Cela vous aidera à faire de nouvelles rencontres tout en améliorant vos compétences linguistiques.

Comment faire pour renouer avec sa vie sociale au terme du confinement ?

C'est un nouveau territoire pour les professionnels de la santé mentale. Des recherches sont en cours et il est clair que les conséquences du confinement feront l'objet de nombreuses études dans les 10 à 20 prochaines années.

Je pense que la meilleure chose à faire est d'écouter votre instinct et votre corps et leur donner du temps. Nous traversons un traumatisme collectif et, comme tout traumatisme, le processus de guérison diffère d'une personne à l'autre. Alors, quand vous vous sentez prêt à « sortir », faites-le. Entre temps, faites de votre mieux pour maintenir vos interactions sociales en ligne. Une fois que le confinement sera une chose du passé, vous pourrez à nouveau avoir une vie sociale active.

Cette année, de nombreux expatriés seront contraints à passer les fêtés de fin d'année loin de leurs familles dans leur pays d'origine. Comment faire pour gérer cette situation ?

Malheureusement, cette année, cela va être un problème pour le monde entier. Avec la pandémie, les différentes formes de voyage sont limitées. Il peut donc être difficile, voire impossible, de rejoindre votre famille. Heureusement, il existe plein de moyens de communiquer avec vos proches ! Voici 2 exemples :

Organisez une visioconférence avec les membres de votre famille.

Bien sûr, ce ne sera pas la même chose qu'une présence physique, mais vous aurez toujours l'occasion de discuter avec les membres de votre famille et de participer à quelques activités en leur compagnie même à distance. Si vous n'êtes pas fan des visioconférences, sachez que passer du temps avec votre famille virtuellement les rassurera que vous tenez à eux en leur accordant votre temps pendant cette période festive.

Envoyez-leur une lettre ou un colis

En cette période de fin d'année, envoyer une lettre ou un colis peut s'avérer une attention soignée et personnalisée, même si cela a l'air de remonter au 20e siècle. C'est un excellent moyen de témoigner de votre affection à vos proches même si vous ne pouvez pas être là physiquement.

Gardez en tête que cette situation ne va pas durer éternellement.

Si vous êtes loin de vos amis et de vos proches cette année, ça ne devrait pas forcément être le cas ces prochaines années. Il ne s'agit que d'une situation temporaire, même si elle a l'air de durer trop longtemps. Remémorez-vous les bons moments passés ensemble pour avoir un peu de réconfort.

Que diriez-vous aux expatriés qui pourraient être totalement seuls et confinés en cette période de fin d'année ? Comment peuvent-ils prendre soin de leur santé mentale ?

Essayez de trouver quelqu'un avec qui vous souhaitez célébrer.

Si vous avez vécu suffisamment longtemps dans votre quartier, il y a de fortes chances que vous vous soyez fait de nouvelles connaissances. Essayez de discuter avec eux et de faire des projets ensemble pour les vacances. Ils pourraient même vous inviter à passer du temps avec leur famille, ce qui pourrait être une expérience unique pour vous. Ce sera réconfortant de voir des visages amicaux lors d'une journée particulièrement éprouvante pour vous.

Faites du bénévolat

Faire preuve de gentillesse envers autrui, qu'il s'agit de vos proches ou de personnes qui vous sont étrangères, libère de l'ocytocine, également connu comme « l'hormone de l'amour », et du sérotonine qui régule l'humeur. Cela nous procure un certain degré d'énergie et nous permet de nous sentir bien. Dans votre quartier ou votre ville, il y a sans doute des endroits qui ont besoin de bénévoles pendant la période des fêtes. Ce serait un excellent moyen d'y apporter votre aide tout en faisant de nouvelles rencontres, et ainsi lutter contre la solitude.

Faites quelque chose d'agréable pour retrouver la pleine conscience

Qu'en est-il de ce massage ou de cette journée au spa dont vous avez tant envie depuis quelque temps ? Il est temps de vous l'offrir ! Prendre soin de soi est un excellent moyen de faire face au sentiment de solitude entraîné par l'absence des personnes qui vous sont chères. Il existe aussi d'autres moyens de le faire, comme garder un journal intime dans lequel vous pourrez noter vos pensées et vos émotions, regarder vos films préférés, préparer des repas que vous aimez ou faire une randonnée.