Nouvelles politiques de visas dans le monde : attention aux dangers !

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Publié le 2022-10-24 à 10:00 par Asaël Häzaq
D'un côté, des États durcissent de plus en plus leurs politiques migratoires. De l'autre, les mêmes États rencontrent des pénuries de main-d'œuvre. Pénuries qui se sont étendues au monde, et qui menacent la croissance, parfois de façon alarmante. D'autres États optent pour une large ouverture aux étrangers, perçus comme des moteurs indispensables de la croissance. Face à ces constats, vers quel pays se tourner ? Que faut-il prendre en compte avant de s'expatrier ? Une expatriation se justifie-t-elle toujours ?

Plus de visas de travail pour contrer la pénurie de main-d'œuvre ?

S'expatrier, oui, mais pour un travail qualifié. De nombreux pays font face à une pénurie de main-d'œuvre. Les États-Unis enregistrent plus de 10 millions de postes vacants. C'est plus de 450 000 en Australie, et plus de 6 millions au sein de l'Union européenne (UE). En Allemagne, 87 % des entrepreneurs font part de leurs difficultés à recruter du personnel qualifié. Ils sont 90 % en France. La pénurie touche même les pays où le taux de chômage est élevé. L'Espagne, malgré un taux de chômage de 12,4 %, manque de travailleurs qualifiés. Les États prônant la priorité à la main-d'œuvre locale (comme l'Arabie saoudite et son plan de saoudisation des emplois) sont aussi impactés par cette pénurie. Une aubaine pour les candidats à l'expatriation ?

Face à ce constat, les États revoient leur politique de visas. Le Portugal a assoupli sa loi sur l'immigration pour attirer les talents internationaux. Le plan d'immigration canadien 2022-2024 prévoit d'accueillir près de 450 000 nouveaux résidents permanents par an. À l'instar des autres pays, le Canada privilégie l'immigration économique. C'est aussi ce que recommande le Conseil d'analyse économique (CAE) à la France, qui voit en l'immigration qualifiée une clé pour la croissance. Ces données sont essentielles pour les candidats à l'expatriation. Les pays les plus ouverts sont souvent les plus plébiscités par les étrangers.

Politiques de visas dans le monde

En septembre dernier, le président Macron annonce une nouvelle loi sur l'immigration pour 2023. Sa priorité : « intégrer beaucoup plus vite et mieux celles et ceux qui ont un titre provisoire par la langue et par le travail ». Priorité à l'immigration économique, donc. Mais en France, le sujet reste sensible. Certains contestent l'immigration positive. Les voix d'extrême droite qui soufflent sur l'Europe relativisent le besoin en main-d'œuvre étrangère, qui, selon eux, freinerait la croissance au détriment des locaux. La Suède ou le Danemark ne cessent de durcir leur politique migratoire, et plaident pour une immigration très sélective. De tels changements politiques peuvent-ils freiner les projets d'expatriation ?

D'autres pays, pourtant en manque chronique de travailleurs, demeurent fébriles sur la question des visas. Au Japon, la JICA (Agence japonaise de coopération internationale) tire la sonnette d'alarme. Dans un rapport, elle estime que le pays devra embaucher 6,74 millions de travailleurs étrangers d'ici à 2040, pour espérer atteindre une croissance annuelle de 1,24 % (le taux fixé par le gouvernement). Soit, 300 % d'étrangers supplémentaires : ils ne sont que 1,72 million aujourd'hui.

La délivrance ou non des visas découle de la volonté politique. Quelle vision tel pays a-t-il en matière d'immigration ? Quelle est son ouverture ? Quel accueil réserve-t-il aux étrangers ? Voilà des questions essentielles à se poser avant d'envisager une expatriation.

Pourquoi s'expatrier : ce qu'il faut prendre en compte

L'économie tient une place capitale. Le pays recrute-t-il ? Dans quels secteurs ? Quel est son taux de chômage ? La Suisse a accueilli plus de 75 000 travailleurs étrangers depuis le début de l'année (essentiellement des frontaliers). Le pays, qui a bien résisté à la Covid, affiche une bonne reprise économique et un taux de chômage à son plus bas niveau. L'économique n'explique cependant pas tout. Les immigrés en Suisse disent se sentir « bien » dans leur pays d'accueil. L'Université de Genève réalise régulièrement des sondages d'opinion sur le sujet. En 2020, 77 % des répondants affirment que la Suisse est « le bon endroit où vivre ». Ils apprécient les perspectives de carrière (80 % estiment que leur situation professionnelle s'est améliorée en Suisse) autant que la qualité de la vie.

Faire le point sur sa situation

Suisse, Canada, Australie, États-Unis, Émirats arabes unis… Comment choisir son pays d'expatriation ? Tout d'abord, une mise au point s'impose : situation professionnelle, familiale, où en est-on ? Part-on seul ou accompagné ? Quels visas pour les accompagnants, et quelles perspectives pour eux ? La note peut être salée pour le conjoint suiveur. Perte de travail, de source de revenus, dévalorisation de soi… Il est indispensable qu'il se définisse en tant qu'acteur à part entière du projet. Côté salaire, il faut se demander si l'on pourra vivre avec un seul salaire, et si oui, durant combien de temps. La question est encore plus importante si des enfants font partie du voyage. Pourra-t-on bien les prendre en charge ?

Attention à l'âge. Sans surprise, les jeunes actifs auront plus d'opportunités que les plus âgés. Même dans les États aussi ouverts que le Canada, on mise en priorité sur l'immigration économique d'actifs compétents tout de suite ou dans le futur (les étudiants, par exemple). Les personnes en fin de carrière pourront avoir plus de mal à obtenir un visa, sauf si elles affichent un très haut statut (cadre dirigeant, chef d'une grande entreprise...).

Définir ses besoins

Les besoins ciblent autant la sphère professionnelle que la sphère personnelle. Côté carrière, que vise-t-on en optant pour l'expatriation ? La vie professionnelle actuelle est-elle devenue insatisfaisante ? A-t-on besoin de plus de responsabilités, de challenge, d'indépendance, de découverte, de renouveau ?

Est-on satisfait dans sa vie personnelle ou y a-t-il un manque ? L'expatriation est-elle perçue comme une solution ? Est-ce un vieux rêve, un projet mûrement réfléchi ?

Visualiser ses objectifs

Contrairement à certaines idées reçues, l'expatriation est, certes, une aventure, mais une aventure préparée (ne serait-ce que pour les visas). Définir ses objectifs est une autre manière de s'interroger sur le pourquoi de l'expatriation. Avoir des ambitions permet de se projeter positivement : faire carrière à l'étranger, monter son entreprise, augmenter ses revenus, ou encore, changer de métier. Il ne faut cependant pas oublier la question de l'échéance. De combien de temps dispose-t-on pour réaliser ses projets ?

Penser à la durée du séjour

On ne pense pas une expatriation courte (quelques mois à quelques années) comme on pense une expatriation longue. Souvent, le délai de l'expatriation est déterminé par le visa : un an pour le PVT (permis vacances travail) ou le visa étudiant (souvent renouvelable), quelques mois à plusieurs années pour le visa de travail ou le visa nomade numérique… Dans certains cas, il est possible de renouveler son visa. D'autres (PVT, par exemple) sont délivrés une seule fois dans la vie.

Si l'expatriation dans un pays donné est une évidence chez certains, elle est parfois plus floue pour d'autres, quand bien même ils aimeraient leur pays d'accueil. L'inverse est aussi vrai. Un rêve de vie au Canada peut tourner court. Le climat, la culture, les changements ne passent pas toujours. Difficile de savoir à l'avance si l'on s'adaptera au pays étranger. Parfois, un pays d'accueil choisi « au hasard » peut devenir un véritable pays de cœur. La durée du séjour varie donc en fonction de tous ces différents aspects.

Se renseigner et se former

Culture du pays, climat, place des femmes, système politique, économie… Se renseigner sur le futur pays d'accueil permettra d'éviter (ou de mieux vivre) le choc culturel et les autres déconvenues. Parler la langue du pays ou l'apprendre, connaître la culture, rend plus proche des locaux, et facilite l'intégration.

S'expatrier : peser le pour et le contre

La situation économique du pays ne fait pas tout, pas plus que les potentiels hauts revenus. Si l'économique a une incidence, surtout en cette période de crise, le personnel est tout aussi important. Parmi les causes de la pénurie, les experts soulignent l'augmentation des problèmes de santé mentale, surtout depuis la Covid. La préservation du bien-être et de la santé mentale est de plus en plus citée par les candidats au départ. S'ils veulent augmenter leurs revenus ou relever des défis, ils veulent aussi préserver leur vie personnelle et aspirent à un meilleur cadre de vie. Partir, oui, mais pour bien vivre.