L'envers de la carte postale bahreïnie

Bonjour à toutes et à tous,

lorsque l'on se rend dans un pays pour du tourisme, on est souvent charmé par tout ce que l'on découvre.

Une expatriation est bien différente. Car si vivre à l'étranger est toujours une expérience très enrichissante, le parcours de tout expatrié comporte son lot de difficultés.

Aussi, quand on me demande des conseils sur la vie à l'étranger, je dis souvent qu'il faut savoir regarder la carte postale des deux côtés.

Vous qui êtes expatrié au Bahrein, comment décririez-vous les deux côtés de votre carte postale bahreïnie?

Merci d'avance pour votre participation,

Julien

Alors... personne depuis trois jours ?? Timides ou rien à dire ??  :cool:

Bon on va commencer par les bons côtés de la vie ici :

- Le dépaysement : c'est sûr que venir de France à Bahreïn, c'est pas comme partir vivre en Suisse hein ^^

- Les gens du pays : si l'on excepte le quota incompressible d'abrutis présents dans tous les pays du monde, les bahreïnis sont des gens d'une grande gentillesse, très respectueux, ouverts d'esprit et agréables.

- Les gens d'autres pays : vivre à l'étranger offre l'incroyable opportunité de rencontrer / travailler avec des gens de tout un tas de pays du monde à condition de faire quelques efforts.

- Les salaires : généralement, on part à l'étranger pour un salaire meilleur que celui que l'on avait dans son pays d'origine. Ce n'est pas toujours la Bérézina mais c'est toujours mieux que rien ! Comme en plus, hormis les détachés d'une entreprise française, ici on ne paye pas d'impôts sur le revenu, la TVA est inexistante, et l'essence ne coûte rien, on a un pouvoir d'achat supérieur.

- L'autonomie dans le travail : généralement on a plus d'autonomie à l'étranger car les entreprises sont moins importantes et moins structurées qu'en France ou en Europe. Les responsables ont donc un champ de manœuvre plus étendu et plus de responsabilités à niveau égal.

- Le climat : le Moyen-Orient c'est la chaleur, les palmiers, la mer...

- L'histoire et la culture : vivre ici c'est une chance unique de comprendre l'Islam, de découvrir l'histoire de l'archipel et de la région. C'est aussi découvrir des artisanats inexistants en Europe comme le tressage des palmes, la sculpture sur gypse, la construction de dhows (bateaux traditionnels du pays) et un tas d'autres.

- Le niveau d'adaptation requis : en comparaison de nos voisins Qataris, Koweïtiens ou a fortiori Saoudiens, l'effort demandé pour se conformer aux règles de vie est relativement minime. On trouve du porc, de l'alcool, des produits occidentaux, même s'ils ne sont pas halal, etc... Les femmes peuvent travailler conduire et avoir une vie sociale indépendamment de leur mari, leur père ou leur fils aîné.... Il existe un respect de la liberté de culte.... On peut s'habiller comme on veut... Etc...


Après bien sûr, le revers de la médaille :

- On a rien sans rien : Ici le contrat hebdomadaire, c'est 48h. Certes les salaires sont plus élevés, mais on fait un nombre sensible d'heures en plus. On est relativement taillables et corvéables à merci et dans la réalité, on est souvent responsables de bien plus de choses que ce qui était initialement prévu au contrat ou que ce qui correspond à l'intitulé du poste.

- Bahreïn est un village : avec un peu plus d'un million d'habitants dont la moitié sont des expatriés (majoritairement indiens), environ 2000 français, c'est une petite communauté. Pour peu que l'on vive dans un environnement très occidentalisé (ex : Amwaj Islands), on est bien vite dans l'impression de vivre dans un village ou dans une petite ville de province ou tout le monde connait un peu tout le monde, tout le monde a entendu parler de toi avant même de te connaître etc...

- La vie n'est pas toujours simple pour les épouses : bon de quoi se plaignent-elles ? Elles ont une grande maison, dans un compound avec piscine, leur mari a des revenus confortables et pourvoit aux besoins de la famille, souvent une femme de ménage s'occupe du quotidien.... Ben oui mais bon, quand on été cadre dans une entreprise, on ne se reconvertit pas en 5 minutes au macramé et à l'enfilage de perles. D'autant que le mari providentiel est globalement très peu là et que quand il rentre, madame qui n'a pas fait grand chose de sa journée est ravie d'enfin pouvoir s'activer, sortir... quand lui ne rêve que de s'écrouler devant le JT après une journée harassante ! Certaines vivent bien la conversion, d'autres souffrent réellement du manque de stimulation sociale / intellectuelle que l'on peut parfois ressentir, particulièrement quand on ne parle pas l'anglais et qu'on ne conduit pas / que l'on n'a pas de voiture.

- Lorsqu'on a un contrat de droit local, on est soumis à une grande précarité. Certes le droit du travail local existe et est sensiblement calqué sur le modèle égyptien, lui-même calqué sur le modèle français. Toutefois, pour un expatrié, faire valoir ses droits en justice en cas de litige relève de la croix et la bannière pour un résultat particulièrement incertain.

- Le risque d'effet de bulle : Certes me direz-vous, ce risque n'est pas propre à l'expat ou au pays, il existe aussi dans nos pays d'origine. Toutefois, il me semble qu'il est particulièrement prononcé quand on vit dans un pays où les disparités sociales sont très fortes. De quoi s'agit-il ? Tout simplement du fait de vivre enfermé dans une bulle, sans avoir conscience des réalités du pays et de ses habitants. Ainsi sur la partie anglaise du forum je vois régulièrement des réponses à de futurs migrants quant aux salaires à demander que je trouve particulièrement choquantes. En effet dire à une personne qui demande si 800 BHD est un salaire suffisant que cela permet « à peine de survivre à Bahreïn » alors que 80% des expatriés, notamment du sous continent indien gagnent moins de 150 BHD par mois c'est assez surprenant ! C'est ça l'effet de bulle, penser que tout le monde vit comme soi, avec les mêmes besoins parce que nous avons tendance naturellement à nous entourer de gens comme nous et à finir par penser que tout le monde est pareil. C'est bien entendu totalement artificiel et n'oublions pas que nous sommes des privilégiés, dure leçon que bien des expatriés au Moyen Orient ont appris lors de la crise il y a 3 ans en perdant brutalement leur emploi. Passer brutalement d'une vie confortable dans une grande maison au soleil avec la mer, la piscine, deux voitures, la femme de ménage le jardinier, des loisirs pour les enfants à retour au 3 pièces cuisine avec un budget tendu chaque mois ce n'est pas si simple, surtout si on a un peu oublié qu'on avait beaucoup de chance d'être où nous sommes et que cela ne durera probablement pas.

- Les départs incessants : l'une des difficultés quand on vit à l'expat, c'est que bien sûr on tisse des liens, des accointances, des amitiés, parfois fortes. Et puis les années passant les gens s'en vont vers d'autres horizons, retournent en France ou c'est vous qui êtes re re re muté :D
Pour certain, cette impression de toujours devoir remettre l'ouvrage sur le métier est lassante, un peu comme si tous les deux ou trois ans on retournait tout ton jardin et il te fallait recommencer. Du coup certains serial expats finissent par ne plus nouer que des relations cordiales, mais superficielles...

Voilà, l'expat, c'est comme tout dans la vie, il y a du bon et du moins bon, au Bahreïn, comme ailleurs. Après si l'on sait anticiper les difficultés, et goûter des bons côtés on vit vraiment des choses formidables

Bon voilà je m'enflamme je me passionne et je vous ai encore collé une tartine :D
Pardon d'être aussi bavard à l'écrit qu'à l'oral et désolé pour la probable migraine :p

Amicalement

Olivier

Olivier-France a écrit:

- La vie n'est pas toujours simple pour les épouses : bon de quoi se plaignent-elles ? Elles ont une grande maison, dans un compound avec piscine, leur mari a des revenus confortables et pourvoit aux besoins de la famille, souvent une femme de ménage s'occupe du quotidien.... Ben oui mais bon, quand on été cadre dans une entreprise, on ne se reconvertit pas en 5 minutes au macramé et à l'enfilage de perles. D'autant que le mari providentiel est globalement très peu là et que quand il rentre, madame qui n'a pas fait grand chose de sa journée est ravie d'enfin pouvoir s'activer, sortir... quand lui ne rêve que de s'écrouler devant le JT après une journée harassante ! Certaines vivent bien la conversion, d'autres souffrent réellement du manque de stimulation sociale / intellectuelle que l'on peut parfois ressentir, particulièrement quand on ne parle pas l'anglais et qu'on ne conduit pas / que l'on n'a pas de voiture.


Ça sent le vécu Olivier :-)

En tout cas perso, je savoure, et je refuse de me plaindre (surtout que je reviens d'un séjour en France de 15j, ça m'a fait l'effet d'une piqûre de rappel)

Olivier-France a écrit:

- Le risque d'effet de bulle : Certes me direz-vous, ce risque n'est pas propre à l'expat ou au pays, il existe aussi dans nos pays d'origine. Toutefois, il me semble qu'il est particulièrement prononcé quand on vit dans un pays où les disparités sociales sont très fortes. De quoi s'agit-il ? Tout simplement du fait de vivre enfermé dans une bulle, sans avoir conscience des réalités du pays et de ses habitants. Ainsi sur la partie anglaise du forum je vois régulièrement des réponses à de futurs migrants quant aux salaires à demander que je trouve particulièrement choquantes. En effet dire à une personne qui demande si 800 BHD est un salaire suffisant que cela permet « à peine de survivre à Bahreïn » alors que 80% des expatriés, notamment du sous continent indien gagnent moins de 150 BHD par mois c'est assez surprenant ! C'est ça l'effet de bulle, penser que tout le monde vit comme soi, avec les mêmes besoins parce que nous avons tendance naturellement à nous entourer de gens comme nous et à finir par penser que tout le monde est pareil. C'est bien entendu totalement artificiel et n'oublions pas que nous sommes des privilégiés, dure leçon que bien des expatriés au Moyen Orient ont appris lors de la crise il y a 3 ans en perdant brutalement leur emploi. Passer brutalement d'une vie confortable dans une grande maison au soleil avec la mer, la piscine, deux voitures, la femme de ménage le jardinier, des loisirs pour les enfants à retour au 3 pièces cuisine avec un budget tendu chaque mois ce n'est pas si simple, surtout si on a un peu oublié qu'on avait beaucoup de chance d'être où nous sommes et que cela ne durera probablement pas.


Excellent ! je suis tout à fait d'accord avec toi

Et je trouve qu'on prend vite le rythme expat' malheureusement sur certaines choses, à vouloir trop consommer, faire plein de choses, se faire autant d'amis que possible alors qu'on oublie de vivre.. simplement
ça, c'est mon point de vue personnel

autre point négatif : en ce moment c'est pas gai :-(
je rââââââle sur la circulation aussi, on manque de courtoisie, on crée des doubles files qui font de véritables bouchons, et les pneus qui brûlent et qui bloquent la circulation alors que tu as toute l'île a traversé pour chercher tes gamins
bref

sinon c'est que +++++  :heart:

j'ai adorer ta réponse merci elle très réaliste et donne une idée de ce que c'est la vie d'expat


Merci  :one