Ces petites choses qui embêtent les Français quand ils sont à l'étranger

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Publié le 2021-10-19 à 11:00 par Asaël Häzaq
Alors que les frontières s'ouvrent et que les vols internationaux reprennent, les Français sont nombreux à remettre leurs projets de voyage et d'expatriation sur le tapis. Ceux de l'étranger se préparent aussi à rentrer au pays, gardant en tête que, Covid-19 oblige, le pass sanitaire compatible est aujourd'hui un sésame obligatoire pour nombre d'activités effectuées sur le territoire. Mieux vaut l'avoir à portée de clic ou de main pour profiter de ce voyage tant attendu avec, au programme : détente, repos, calme… et complaintes ? 

Mais de quoi pourraient se plaindre les Français ? Et de quels Français parle-t-on ? Les expatriés se sont, on l'espère, acclimatés à leur pays d'accueil. Les touristes découvrent ou redécouvrent une destination pourtant choisie volontairement. Chaque pays a ses particularités. L'étranger, par définition, ce n'est pas la France. L'évidence se passe de tout commentaire, et pourtant, incompréhensions culturelles et autres quiproquos s'invitent parfois dans les bagages des Français à l'étranger.

Compatriote Français en vue

L'on pourrait, a priori, s'imaginer chanceux de trouver un compatriote dans son pays d'accueil : occasion de nouer quelque nouvelle amitié et de plaisanter entre Français. C'est oublier l'objectif de son séjour. Rien de pire, aux yeux de nombreux Français, que de partir à l'étranger pour se retrouver coincé entre des compatriotes. 

Alors, les Français se plaindraient-ils d'eux-mêmes ? Heureusement, beaucoup de Français s'accommodent fort bien de la présence de leurs homologues. Celles et ceux qui s'irritent devant leurs compatriotes craignent souvent d'être assimilés au stéréotype du Français en vacances : râleur, bruyant, pingre… Un portrait désagréable qui, hélas, traverse les époques. Ainsi, les Français remportent régulièrement la palme des touristes et expatriés les plus terribles. D'où le réflexe, pour certains, de ne surtout pas être associé à cette triste caricature. Ces Français fustigent donc le comportement d'autres Français qui, à grand renfort d'incivilités, écornent l'image de tout un pays. 

On note particulièrement cette crainte du côté des expatriés. Autant, les groupes d'entraide francophones sont très appréciés, autant, les rassemblements avec des Français un peu trop proches des images décriées sont évités. En septembre 2019, à l'occasion de la coupe du monde de rugby organisée au Japon, la France s'impose face à l'Argentine. Scènes de liesse dans les rues et les transports de Tokyo. Les clichés de Français massés dans les trains, bloquant la circulation des passagers, ont fait le tour d'Internet. D'aucuns diraient qu'ils n'étaient pas les seuls : des supporters d'autres nations ont aussi joyeusement paralysé le trafic. À situation exceptionnelle, comportement exceptionnel ? Les Français expatriés ont plutôt dénoncé cette incivilité « exceptionnelle » qui s'ajoute aux nombreuses autres « ordinaires ». 

Anglais obligatoire à l'étranger ?

L'anglais, première langue commerciale au monde, n'est plus une « langue étrangère ». L'on comprendra difficilement qu'on ne sache pas parler un anglais, même rudimentaire. Pour les Français en voyage à l'étranger – et pas forcément les plus âgés d'entre eux – la barrière de la langue peut constituer une vraie source d'ennuis. Le naturel revient vite, et les incompréhensions peuvent rendre le voyage cocasse, ou infernal, car, dans nombre de pays, qu'ils soient anglophones ou non, tout ou presque a sa traduction anglaise : guides, instructions dans les transports, fiches de renseignements, menus des restaurants… L'anglais, c'est la bouée de sauvetage. L'on est quasiment sûr de trouver un anglophone, quel que soit le pays dans lequel on voyage. L'affirmation est cependant à nuancer : un écart dans une ville éloignée des zones touristiques suffit pour s'en rendre compte. 

La maîtrise de l'anglais reste cependant un impondérable. Or, les Français sont connus pour leur faible niveau d'anglais. Cliché ? Peut-être : en 2020, l'Institut « Education First » fait entrer pour la première fois la France à la 28e place des pays non anglophones maîtrisant l'anglais… Un score appréciable au niveau mondial, mais moins au niveau européen (la France arrive dernière).

Faudrait-il parler anglais pour passer un bon séjour à l'étranger ? Certains Français mènent la fronde, et fustigent « l'anglicisation » du monde. Ils militent pour le retour du français à l'international. La langue n'a-t-elle pas eu, jadis, son heure de gloire ? Pourquoi pas des traductions véritablement multilingues, et pas seulement en anglais ? Autant dire que le combat est perdu d'avance. 

Ailleurs, ce n'est pas chez soi

Lapalissade, bonjour. Et pourtant, il revient plus vite qu'on ne le croit. À l'étranger, certains Français activent leur comparateur interne et évaluent tout ou presque à l'aune des services qu'ils connaissent. Négocier les prix, ou pas ? Donner un pourboire ? Prendre son temps pour manger, ou se hâter ? Aux États-Unis, le pourboire est une institution, et se veut généreux. En Chine et au Japon, c'est tout le contraire : laisser un pourboire donnerait l'impression que l'employé n'est pas payé à sa juste valeur. Idem au Portugal, qui n'a pas la culture du pourboire. Radins, les Français ? Peut-être ne veulent-ils pas commettre d'impair, d'autant plus que l'erreur est vite arrivée. Au restaurant, les Français sont connus comme aimant prendre leur temps. Un déjeuner peut se transformer en plusieurs heures de discussions animées, avec toujours une seule commande de passée. Attitude inconcevable au Japon, ou l'on se lève après avoir fini de manger, pour laisser sa place à d'autres. Oubliées aussi, les discussions bruyantes au restaurant ou dans les transports. Le Japon a opté pour les izakaya, sortes de bistrots dévolus à l'ambiance festive. Et dans les transports, c'est silence de rigueur. Le même calme est observé au Canada, où les discussions au téléphone sont très mal vues. 

Ces règles de bienséance semblent bienvenues. Pourtant, certains Français y voient une contrainte supplémentaire. La liberté disparaît devant l'excès de politesse, et les séjours à l'étranger prennent un arrière-goût de leçon de morale.

Cher Frenchy

Les Français ne se plaindraient-ils pas davantage de cette image qu'ils renvoient, à tort ou à raison ? Selon les situations, être Français est un avantage, ou un inconvénient. Le Français est perçu comme élégant, aimant faire la conversation, curieux, raffiné… Mais aussi peu hygiénique, bougon, râleur, irritable, avare, condescendant… Une image bien moins reluisante, que ne veulent surtout pas embrasser les Français de l'étranger. Au fond, l'ailleurs fascine autant qu'il effraie. Le pays étranger modifie, même imperceptiblement, les comportements et les manières d'appréhender l'environnement. Pourquoi ne pas en profiter pour faire une mise à jour, et s'accommoder de ce qui, a priori, n'enchante guère ? Ainsi transformées en défis culturels, les contraintes peuvent devenir des expériences enrichissantes.