Lionel Magisson, expat et président de la Chambre de Commerce France-Maurice : La passion de l'entrepreneuriat

Interviews d'expatriés
Publié le 03 février, 2021
Lionel Magisson aime l'entrepreneuriat mais surtout, l'entrepreneur. Ce Normand arrive dans l'Océan Indien au début des années 1990. Après quelques années à La Réunion, c'est à l'île Maurice qu'il posera ses valises et il décidera de lancer son entreprise en 2011. Depuis 2019, il occupe la Présidence de la Chambre de Commerce France-Maurice (CCIFM). Il parle à Expat.com de son parcours d'expatrié, de son pays d'adoption et de la CCIFM.

Tout d'abord, parlez-nous un peu de votre parcours d'expatrié.

Je suis Normand - et Mauricien, d'ailleurs, j'ai 55 ans, marié et deux enfants, (27 et 11 ans). J'arrive pour la première fois dans l'Océan Indien au début des années 90 pour faire vivre une entreprise de la vallée normande installée à l'île de la Réunion, à 10,000 km de l'hexagone, mais sur un territoire magnifique et Français. Huit ans après, j'avais accompli ma mission et je ressentais le besoin et l'envie de bouger. J'avais déjà des amis à Maurice, je connaissais cette île, je connaissais des Mauriciens qui étaient à différents postes partout dans le monde. Je savais que cette destination m'offrirait beaucoup d'opportunités. J'arrive ainsi dans le pays en 1998 avec un permis de travail pour l'un des plus grands groupes du secteur privé. J'y ai travaillé pendant 7 ans, avant de rejoindre un promoteur immobilier en 2007 et de finalement créer ma propre entreprise en 2011. L'Ile Maurice m'a accueilli et adopté, et m'a permis de faire une belle rencontre qui a scellé ma vie à Maurice, marié à une Mauricienne depuis 17 ans ! 

Qu'est-ce qui vous a poussé à vous mettre à votre compte ?

J'ai toujours été proche de la culture entrepreneuriale, créer de la richesse, développer de l'activité, créatrice d'emploi, j'aime l'entrepreneur dans le sens propre du terme, tout en ayant besoin des autres, l'entrepreneur prend souvent ses responsabilités face à lui-même dans la prise de décision. Et à Maurice, je trouve qu'il y a une vraie culture de l'entrepreneuriat. Derrière chaque Mauricien, il y a un entrepreneur né ! Le besoin de créer pour avancer et subvenir à ses besoins, qu'il soit planteur ou industriel le Mauricien à cette liberté d'oser entreprendre. 

Et j'ai eu envie moi aussi de me lancer, la volonté d'innover, et la même verve celle d'entreprendre. J'évolue dans l'immobilier, apportant des services adaptés aux besoins, le but étant d'accueillir et de loger des professionnels, des familles et investisseurs étrangers mais pas seulement. Nous offrons aussi nos services aux Mauriciens.

Vous vivez à Maurice depuis 22 ans, et en 22 ans un pays évolue. Surtout, un pays aussi jeune que l'île Maurice. Quel regard portez-vous sur cette évolution ?

Ce que je vois encore et encore, c'est vraiment la résilience. Maurice est résiliente et le citoyen mauricien l'est aussi. L'île sait se positionner comme acteur régional et international important de par sa connexion à l'Asie, l'Afrique et l'Europe. Maurice ce beau ‘corail' au milieu de l'Océan Indien fait partie des plus hautes sphères de politique et de décision.

Il est vrai qu'il y a des efforts à faire pour être meilleur élève. Nous avons positionné notre pays à un niveau international et il faut maintenant s'assurer d'être le plus propre possible.

Il y a une richesse énorme de compétences à Maurice qui doit continuer à évoluer. Le bilinguisme, par exemple, est extraordinaire. Et être bilingue, c'est le minimum ! Sur la plage, les vendeurs alternent souvent entre quatre ou cinq langues. Maurice a tous les atouts nécessaires pour assouvir ses désir d'être le pont entre l'Asie et l'Afrique et l'Europe et de devenir un centre financier pour l'Afrique. Nous devons innover pour créer de la richesse, de l'emploi. L'océan, nos cinq piliers économiques ne suffisent pas à créer de la croissance, nous devons nous inscrire dans ce concept de l'économie circulaire, l'économie bleu, qui doivent être nos priorités nationales et régionales. Sachant que nous sommes sur un petit territoire au milieu de l'océan, nous devons maintenir notre autonomie, prendre le ‘'lead'' et créer de la croissance tout en préservant ce qui fait la richesse de l'Île Maurice.

Quel constat faites-vous de l'écosystème start-up à Maurice ?

De par le fonctionnement de la société et de l'économie mauricienne, il y a toute la place pour que les start-ups se positionnent et réussissent à Maurice. Il y a d'ailleurs de plus en plus d'incubateurs. L'île Maurice a la chance d'avoir un secteur privé fort qui est capable d'investir dans son pays et au-delà. Le Mauricien est un entrepreneur né et il a la capacité d'aller à l'international, de s'instruire à l'international et de ramener cela et l'adapter au contexte mauricien et régional. Et puis, actuellement, c'est un climat difficile, nous avons besoin de faire appel aux petits génies, aux entrepreneurs qui dans toute leur innocence et leur soif sont capables d'oser et d'innover.

Justement, dans ce climat particulier, quelle lecture faites-vous, en tant qu'entrepreneur, de la politique économique du pays ?

Il n'y a pas que la COVID, entraînant une crise sanitaire qui suivie d'une crise économique et sociale mais aussi les sanctions du Groupe d'Action Financière contre la juridiction mauricienne. C'est une situation difficile et il va nous falloir s'en sortir rapidement. 

Pour cela, un bon exercice de communication est nécessaire afin de conserver l'image de Maurice. Le traitement doit se faire au coeur et à en croire les différentes institutions gouvernementales, mais aussi l'Union Européenne, l'Ile Maurice travaille assidûment et nous devrions être en conformité avec les règles d'échanges et d'informations fiscales en 2021, et d'ici là, nous serons également plus armés contre la COVID.
Il faut saluer la gestion de la crise sanitaire à Maurice. Malgré cela, les deux piliers de l'économie mauricienne, l'hôtellerie et le textile sont au tapis. Assurément cela affecte toute l'économie et bien d'autres secteurs. Nous devons collaborer et travailler avec les îles de la région notamment sur des sujets comme l'économie bleu, l'économie circulaire, l'agriculture, … Il faut travailler ensemble pour sortir de cette crise fin 2021 début 2022.

Notre rôle à la CCI France-Maurice comme d'autres organisations et institutions et d'accompagner, nos entreprises, aider les professionnels, en créant des passerelles avec nos, news letter, notre site web, nos 5 commissions, des formations, des événements, des rencontres avec le secteur privé et le secteur publique, afin d'échanger sur les aides, les idées, le dialogue, le partage et la communication, ceux sont les priorités de nos actions à la chambre.

Vous êtes le Président de la Chambre de Commerce France-Maurice (CCIFM) depuis maintenant deux ans. Qu'est-ce qui vous a amené à prendre ce rôle ?

Cela s'est fait assez naturellement. Tout d'abord mon rapprochement avec la CCIFM est lié au fait de me rapprocher de mes centres d'intérêt, l'entrepreneuriat, l'entrepreneur. Quelque chose m'a plu dans cette dynamique de partage, d'innovation et de développement. Mais aussi la France qui est mon pays d'origine et je suis heureux de mettre à profit mon expérience pour aider nos membres. La Présidence de la CCIFM me rapproche de la France. Il est vrai que j'avais perdu un peu le fil et d'être engagé au niveau de la CCIFM m'a remis dans le cycle. Et puis, comme je le dis souvent “Participer, c'est agir”. J'apprends beaucoup, je donne le meilleur de moi-même, humblement, et je suis ravi de pouvoir servir la chambre et donc ses membres.

Quelles sont les missions de la CCIFM ?

Les CCI existent dans 94 pays à travers le monde et sont en affiliation avec la Team France Export, les Ambassades et d'autres organisations. Les rôles principaux : le regroupement des entrepreneurs français et mauriciens pour promouvoir la collaboration et l'accueil d'entrepreneurs français souhaitant s'installer à Maurice.

La CCIFM est un point de rencontre où les entrepreneurs peuvent partager leur expertise, s'entraider, tisser des liens commerciaux. Elle est aussi une passerelle entre ses membres et l'Etat mauricien. Elle se veut également être un point d'information pour ses membres. L'idée est d'assurer la pérennité et la résilience des entreprises membres.

Nous avons aussi un côté social important. Nous organisons des évènements, comme le tournoi multisport, qui permettent la participation des membres d'une entreprise et pas seulement de la personne déléguée pour la représenter à la Chambre mais l'ensemble de l'entreprise membre.

Nous mettons également à la disposition de nos membres des espaces de coworking et salles de réunion, principalement pour les petites entreprises, mais aussi de la location d'espaces bureaux, des services à la demande, étude marché et tous services facilitant l'implantation d'une entreprise française à l'Île Maurice.  

Comment la CCIFM s'adapte-t-elle avec la crise ?

Nous essayons d'apporter des services innovants. Mais ce sont les membres eux-mêmes la solution. Nous essayons de faire interagir nos membres un maximum, de les mettre en relation entre eux et les organisations locales, en trouvant l'expertise dont un membre a besoin chez un autre. Cela apporte innovation et développement. Nous bénéficions aussi de l'appui de la CCIFI, de la French Tech et d'autres institutions. Nous organisons des webinaires, des ateliers de travail, des formations, des événements, et apportons de la joie et de la bonne humeur et convivialité en cette période de crise. Du sérieux, de l'envie et de l'optimisme !

Et toujours avec ce slogan, “Participer c'est agir!"

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