Créer son entreprise à l'étranger : «Il est essentiel de prendre en compte les spécificités locales»

Interviews d'expatriés
Publié le 2014-09-11 à 00:00 par Expat.com team
Les Français sont de plus en plus nombreux à s'expatrier : 1 642 953 en 2013. Et parmi eux, nombreux sont ceux tentés par l'entrepreneuriat. Ingrid Labuzan, journaliste économique, est partie à la rencontre d'entrepreneurs français dans le monde. Elle nous livre ses « clés du succès » pour créer son entreprise à l'étranger...

Comment vous est venue l'idée de votre livre, « Créer son entreprise à l'étranger - Les clés du succès » ?

J'ai écrit pendant plusieurs années des portraits d'entrepreneurs français pour un magazine économique. Cette rubrique avait beaucoup de succès auprès des lecteurs. Un jour, j'ai lu un article sur le nombre croissant de jeunes diplômés qui choisissent de s'expatrier et je me suis demandé s'ils optaient pour des emplois traditionnels ou pour l'entrepreneuriat.

En quoi cet ouvrage peut-il aider les candidats à la création d'entreprise dans un pays étranger ?

Cet ouvrage se constitue comme un guide pour la création d'une entreprise à l'étranger : les démarches à effectuer, auprès de qui trouver de l'aide, que ce soit d'un point de vue commercial, juridique, fiscal... Il traite également des écueils à éviter et, en ce sens, les conseils des entrepreneurs interviewés sont précieux.

Dans votre ouvrage, vous indiquez qu'il y a un engouement croissant pour l'entrepreneuriat : comment expliquez-vous ce phénomène ?

Je pense que la situation économique y est pour beaucoup. La bonne tenue des pays émergents dans la crise a attiré beaucoup de monde. La recherche d'une meilleure qualité de vie est également un argument que j'ai souvent entendu. Il est intéressant d'observer que les entrepreneurs qui ont sauté le pas n'envisagent pas de retour en France, du moins pas avant de nombreuses années.

Quels sont les critères à prendre en considération lorsque l'on est en train de monter son projet de création d'entreprise hors de ses frontières ?

Il essentiel de prendre en compte les spécificités locales. Trop souvent, seul l'aspect économique du projet est étudié. Mais oublier les us et coutumes, les pratiques dans les affaires, est une erreur. La constitution d'un réseau sur place est une étape primordiale dans le succès du projet. Un associé local de confiance permet souvent d'aplanir ces difficultés et d'éviter de commettre des impairs.

Comment préparer son projet ?

Il est indispensable de valider en amont la faisabilité de son projet. Cela passe par obtenir le visa adéquat, par vérifier les règles existantes en matière de création d'entreprise par un étranger. Certains pays imposent par exemple un associé local, un niveau minimum d'investissement, ou encore de créer des emplois. Il faut également songer à se protéger et étudier les statuts juridiques disponibles pour sa société. Enfin, l'idéal est de se rendre sur place pour se créer un réseau

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Quels sont les outils dont dispose un expatrié pour l'aider dans son projet de création d'entreprise ?

Les Chambres de Commerce et d'Industrie constituent une bonne porte d'entrée pour découvrir un nouveau marché, obtenir des données chiffrées et être mis en contact avec des partenaires localement implantés. La Maison des Français de l'Étranger fournit des renseignements précieux, surtout concernant les démarches administratives liées à une expatriation. Des sociétés privées réalisent également des études de marché en fonction de vos besoins. En Europe, les entrepreneurs peuvent profiter de l'équivalent du programme Erasmus, qui leur est dédié. Enfin, diverses associations, groupes ou clubs existent selon les régions, comme par exemple le French Business Council à Dubaï.

Quelles sont les régions du monde où il semblerait plus facile de monter sa société et pourquoi ?

Ce n'est pas tant une question de région que de règles et de lois locales. Ainsi, il est admirativement long et compliqué de créer une société au Brésil, alors que les démarches ne prennent qu'une journée en Nouvelle-Zélande. C'est pour cela qu'il est essentiel de se renseigner en amont. Parfois, il est quasi indispensable de se faire aider par un avocat local tant les démarches sont complexes.

Votre ouvrage rassemble aussi des « portraits » d'entrepreneurs qui ont fait le choix de s'expatrier : qui sont ces entrepreneurs que vous avez rencontrés ?

J'ai souhaité rencontrer des entrepreneurs aux profils et parcours variés. Certains étaient déjà expatriés quand ils ont lancé leur projet, d'autres ont tout préparé depuis la France. Certains étaient à l'époque jeunes diplômés, d'autres ont choisi de changer de vie. Il est intéressant de voir que leurs conseils se rejoignent, alors que ces entrepreneurs sont implantés dans 12 pays différents, à travers le monde.

Au fil de ces rencontres, quels sont les projets qui vous ont le plus marqués et pourquoi ?

Je suis admirative des projets que l'on pourrait imaginer comme difficiles. Je pense notamment à une jeune femme qui a choisi de créer une société en Espagne au plein cœur de la crise. Elle a fait fi, avec raison d'ailleurs, de tous les commentaires pessimistes qu'elle a pu entendre. Beau projet également que celui de Benjamin Bonnell, qui a créé une entreprise solidaire au Sénégal. L'aboutissement d'une idée qu'il avait échafaudée alors qu'il n'était qu'étudiant. Enfin, le récit de la jeune femme qui a créé sa société à Dubaï et est allée à l'encontre des idées reçues que j'avais sur la région, notamment sur l'opportunité pour une femme d'y faire des affaires.

A partir de leurs expériences, pouvez-vous dresser un portrait-type de l'expatrié français créateur d'entreprises ?

Il est difficile de réaliser un portrait-type, en revanche certaines qualités se dégagent, comme la ténacité et la patience. Entreprendre à l'étranger nécessite également des capacités d'adaptation. En effet, comme me l'ont dit nombre d'entrepreneurs, il ne faut pas débarquer avec l'idée de copier quelque chose qui a fonctionné en France. Au contraire, il faut prendre en compte toutes les spécifiés locales.

Quelle est l'image des entrepreneurs français à l'étranger ?

Elle varie selon les pays. En règle générale, ils sont bien accueillis, mais on attend d'eux qu'ils fassent leurs preuves avant de leur faire totalement confiance. Pour ceux qui choisissent d'entreprendre dans les pays émergents, gare aux attitudes de colonisateur. Personne n'aime être pris de haut, par un étranger qui plus est.

Quels seraient vos conseils, « les clés du succès », pour celles et ceux qui veulent créer leur entreprise à l'étranger ?

Il existe de nombreux outils pour vous aider en amont, n'hésitez pas à tirer toutes les ficelles possibles, depuis la France, puis sur place. Bien plus qu'en France, le réseau est essentiel lorsque vous créez une société à l'étranger. Enfin, comme je le disais plus haut, il ne faut pas chercher à simplement répliquer un concept et des méthodes français.

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