Chef d'entreprise à l'Ile Maurice : du bureau à l'apéro sur l'eau

Bonjour Sylvie, peux-tu te présenter brièvement et nous parler de tes projets ?

J'ai 51 ans et je vis à l'Ile Maurice depuis 15 ans. Arrivée suite à l'expatriation de mon mari pour 2 ans, nous avons décidé après quelques mois de rester ici, tant nous avons été séduits par l'île, ses habitants, l'état d'esprit qui y règne, où ce qui est naturel est d'aller de l'avant, de se projeter positivement vers l'avenir.

J'ai créé rapidement une société de fabrication et export de soins dermo-cosmétiques, milieu duquel je venais en ayant travaillé plus de 10 ans pour les parfums Christian Dior et Givenchy.

Quelles étaient les formalités à remplir pour que tu puisses t'installer à l'île Maurice ?

Les formalités pour s'installer à l'Ile Maurice et obtenir un permis de résidence et de travail en tant qu'investisseur étaient très légères à l'époque. Une visite médicale, radio des poumons et test VIH, puis une déclaration d'investissement de quelques dizaines de milliers d'euros suffisaient. La société était créée sous 3 jours avec tous les permis émis. Il me semble qu'aujourd'hui, en tant que créateur d'entreprise, la somme minimum d'investissement est de 100 000 $ et les formalités sont un peu plus longues, mais dès qu'une personne souhaite investir à Maurice, le Board Of Investment (BOI) tente de lui faciliter la vie.

Parles-nous de ce que tu aimes le plus et le moins à l'Ile Maurice.

Vivre à l'Ile Maurice, c'est vivre sous le soleil quasiment toute l'année. Il y a peu de formalisme dans les codes vestimentaires (sauf dans l'administration, et encore, les tongs sont souvent autorisées). C'est aussi se concentrer sur l'avenir plutôt que de se focaliser sur les avantages acquis.

Maurice est un pays jeune et sa croissance depuis les années 1970, après son indépendance, a été fulgurante. Maurice a souvent été appelée le « Dragon de l'Afrique ». Toutefois, lorsqu'un pays grandit aussi vite, certaines étapes sont parfois sautées, ce qui peut conduire à une certaine approximation dans le développement. La patience et la tolérance sont deux qualités essentielles.

Peux-tu nous décrire l'Ile Maurice en une phrase ?

Située entre l'Afrique et l'Asie, ayant des fondements de civilisation bâtis par l'Europe, Maurice, servie par un peuple doux, fier et volontaire, c'est un avenir brillant !

Qu'est-ce qui t'a le plus surpris à ton arrivée à l'Ile Maurice ?

La gentillesse spontanée de la population. Qui a déjà rencontré un homme en mobylette qui s'arrête avec le sourire pour vous aider à sortir d'un espace de stationnement en faisant la circulation ? Moi, oui, et plusieurs fois à Maurice !

Est-il difficile de trouver un logement à l'Ile Maurice ? Quels sont les types de logement disponibles pour les expatriés ?

Il y a plusieurs types de logement à l'île Maurice : des appartements ou villas dits de luxe qui correspondent le plus souvent aux goûts des expatriés et il faut compter un loyer entre 2 000 et 5 000 €, ainsi que des logements plus modestes autour de 800 à 1 000€ pour un trois-chambres. Ces dernières années ont également vu la création de résidences essentiellement pour les étrangers, dotées d'une salle de tennis, d'une salle de sport, etc.

Qu'est-ce qui caractérise le marché du travail mauricien ? Est-il facile pour un expatrié d'y être embauché ?

Comme dans beaucoup de pays, pour être embauché à Maurice, l'employeur doit prouver qu'il n'a pas trouvé localement un profil qui lui corresponde. Les formalités sont lourdes et le salaire minimum tourne autour des 1 500 €, ce qui représente une somme importante pour les entreprises mauriciennes, à moins d'embaucher un cadre supérieur.

Quelles sont les procédures pour la création d'une entreprise à l'Ile Maurice ? As-tu rencontré des difficultés ?

Pour moi, ce fut simple il y a 15 ans, mais les choses ont beaucoup changé. En clair, aujourd'hui il est difficilement concevable de débarquer à Maurice sans projet et de regarder ce qu'il est possible de créer. Le marché mauricien est étroit (1,3 million d'habitants), et les entreprises mauriciennes verraient d'un mauvais œil arriver de la concurrence sur leurs propres activités. Créer une entreprise à l'Ile Maurice doit donc relever d'un projet original et innovant, différent de ce qui se fait actuellement, sinon l'aventure risque d'être difficile.

Quels sont les moyens de transport disponibles à l'Ile Maurice ? Comment te déplaces-tu ?

La vie est compliquée sans voiture car il n'y a pas vraiment de centralisation, donc on passe beaucoup de temps à rouler. Il existe bien des bus, mais les horaires ne sont pas toujours fiables et les trajets parfois compliqués à connaître. Après 18h et le week-end, on multiplie la difficulté par deux. Les centre-villes ne sont pas vraiment des centres de vie car les gens habitent plutôt à l'extérieur des villes, d'où la difficulté d'être sans voiture. Bientôt, un métro léger arrivera pour desservir les principales villes du centre, mais il faudra attendre quelques années.

As-tu eu des difficultés à t'adapter à ton nouvel environnement et à la société mauricienne ?

Non, mais comme partout, il convient de se montrer humble et modeste et d'éviter les remarques désobligeantes, comme « chez nous en France, c'est mieux parce que… ».

A quoi ressemble ton quotidien d'expatriée à l'IIe Maurice ?

Je suis chef d'entreprise, donc je travaille beaucoup. Toutefois, mes loisirs prennent souvent des allures de rêve pour un Français. Je sors du bureau, je prends un bateau pour faire un apéro au coucher de soleil. L'Ile Maurice a aussi des golfs formidables avec des vues fabuleuses sur mer. La qualité des services est telle que l'on se sent très privilégié.

Y a-t-il à l'Ile Maurice des activités nocturnes pour les fêtards ?

Nous sommes très loin de l'ambiance Ibiza. Il y a de nombreuses occasions de faire la fête, quelques concerts de DJ de temps en temps, mais globalement la vie nocturne est extrêmement calme.

Quelles nouvelles habitudes as-tu adoptées à l'Ile Maurice ? Quelles vieilles habitudes as-tu laissé tomber ?

Les gens sont moins pressés qu'en Europe. J'ai appris à relativiser les choses et à plus faire attention aux gens. Quelqu'un s'est mal garé et je dois freiner, voire attendre quelques instants pour passer ? Ce n'est pas grave. Finalement, suis-je si pressée ?

La main d'œuvre n'étant pas très onéreuse, on a souvent une « bonne », une femme de ménage et un jardinier. La vie d'une femme s'en trouve complètement modifiée.

Quel est ton avis sur le coût de la vie à l'Ile Maurice ? Combien coûtent un trajet en bus, une bière, ou encore un bon pain ?

Il serait faux d'imaginer que rien n'est cher à Maurice. Si l'on mange les légumes et la viande locale, les prix sont environ 30% moins cher qu'en France. Si par contre, on souhaite se faire quelques petits plaisirs, les prix doublent voire triplent. Par exemple, la baguette de pain mauricienne coûte environ 20 centimes et la baguette à la française environ 80 centimes. Ensuite, 4 yaourts locaux coûtent environ 2 € et une boîte de fromage blanc 10 €. Tout est à l'avenant. Le vin et les voitures sont également très chers à cause des taxes et du besoin d'importation (autour de 180% de taxes).

Qu'est-ce qui te manque le plus par rapport à ton pays d'origine ?

Rien, sinon la rigueur dans l'organisation, mais quand je vois que cela a conduit à supporter de plus en plus de normes, je suis bien heureuse de composer parfois à Maurice.

Quels conseils donnerais-tu aux futurs expatriés à l'Ile Maurice ?

Si vous savez comment sauter le pas économiquement, pas d'hésitation. Mais attention ! Ici, on nous accueille et il est impératif de respecter les règles mauriciennes. Si elles ne vous conviennent pas, repartez, car ce n'est pas à vous d'imposer vos règles et coutumes. Le peuple mauricien est sage et peu rebelle. Les immigrés arrogants sont très mal acceptés et ont la vie dure.

Quelles seraient, selon toi, les 5 choses à emmener dans sa valise à l'Ile Maurice ?

Pour ma part, je ne ramène quasiment jamais rien de France car on trouve à peu près tout.

Tes projets d'avenir ?

Rester à l'Ile Maurice et continuer à essayer de développer nos sociétés.