Ophélie à Stamford : « Sitôt arrivée à Stamford, je suis tombée amoureuse de ma ville »

Interviews d'expatriés
Publié le 2016-10-31 à 12:00
Ophélie vit depuis deux ans en Angleterre, dans la petite ville de Stamford au nord de Londres, où elle travaille comme assistante de français et professeur. Dans cette interview, la blogueuse nous décrit ce que c'est que d'être une expatriée française au pays de Shakespeare.

Bonjour Ophélie, peux-tu te présenter brièvement et nous parler de tes projets en Angleterre ?

J'ai 26 ans et je viens de fêter mes deux ans en Angleterre ! Je suis actuellement assistante de français dans le secondaire, dans un collège-lycée privé du Lincolnshire, à Stamford plus précisément. En plus de ça, je suis également professeur de FLE (Français Langue Etrangère) dans une école de langue. J'y enseigne ma jolie langue maternelle à des adultes. Ces deux boulots sont super enrichissants. Ils me permettent notamment de comprendre comment fonctionne le système éducatif anglais. En ce qui concerne mes projets en Angleterre, j'en ai un principal : passer un diplôme britannique pour être prof de français dans le secondaire. J'aime tellement l'Angleterre que je n'ai pas particulièrement envie de rentrer en France. Malheureusement, avec le résultat du référendum et la victoire du Brexit, il est un peu plus compliqué d'envisager l'avenir en Angleterre. Il faut réfléchir à des plans de secours.

Pourquoi as-tu décidé de t'installer en Angleterre ?

Lorsque j'étais en troisième année de licence d'anglais, il y a quelques années, je suis partie une année scolaire à Glasgow, en Ecosse, dans le cadre du programme d'échange Erasmus. Ça a été l'élément déclencheur de mon second départ. Cette première expérience m'a beaucoup fait grandir. J'avais 21 ans quand je suis partie, et vivre à l'étranger m'a aidé à devenir bien plus indépendante. Et ça m'a donné goût à la vie au Royaume-Uni. À peine rentrée en France à la fin de l'année scolaire, je pensais déjà à réitérer l'expérience, mais cette fois-ci, dans un autre cadre que celui des études. C'est donc pour cette raison que j'ai choisi de postuler au programme d'échange du CIEP, via la fac, pour obtenir un poste d'assistante de français en Angleterre. J'ai eu mon mot à dire dans le choix du pays et de la région, mais pas dans le choix de la ville. J'ai atterri à Stamford car l'école avait accepté mon dossier. Je n'ai pas regretté d'être partie un seul instant.

Dovedale

Comment s'est passée ton arrivée et les premiers instants de ton installation ?

Mon arrivée s'est vraiment bien passée, au-delà de ce que j'espérais. Il faut dire que j'attendais ce nouveau départ depuis deux ans, et que j'étais très heureuse à l'idée d'une nouvelle vie. Je partais donc dans un très bon état d'esprit. Je précise également que le cadre dans lequel je suis partie m'a vraiment facilité la vie. L'école pour laquelle j'allais travailler me fournissait un logement et s'occupait de toute la partie administrative dès mon arrivée. En plus de ça, on est même venu me chercher à la gare de Stamford ! Il n'y avait absolument rien dont je devais m'occuper, si ce n'était de devoir vider mes valises et de partir à la découverte de la ville. L'assistante d'espagnol de l'école était sur place depuis deux ans, elle m'a présentée à pas mal de gens, ce qui a réglé le problème de "comment vais-je me faire des amis ?".

Le top du top, c'est que sitôt arrivée à Stamford, je suis tombée amoureuse de ma ville. Ses vieilles maisons en pierre, ses rues piétonnes pavées, ses petites boutiques indépendantes.. Ça respirait un charme fou, et je m'y suis tout de suite sentie chez moi. Moi qui suis plutôt introvertie, ces premiers instants ont été un régal.

Après deux ans passés en Angleterre, que retiens-tu de la culture du pays et des différences de celle-ci avec la France ?

Après deux ans, je trouve qu'on se rend moins compte des différences culturelles entre l'Angleterre et la France. Quelques unes me viennent quand même à l'esprit. LA MOQUETTE par exemple. Elle est absolument partout (dans les couloirs de l'école ou à l'hôpital, parfois même dans les salles de bain et les cuisines des maisons). J'avoue que c'est LE truc que je n'arrive pas à comprendre, et auquel je n'arrive pas à m'habituer, même après deux ans. Plus sérieusement, je trouve les Britanniques globalement plus polis et plus courtois. Sorry est le mot que l'on sort sans arrêt dans la journée, même quand on n'a rien fait ! Dans les magasins, il n'est pas rare de se faire appeler love, sweetheart ou darling par les commerçants, ce que je trouve adorable ! Et ici, personne ne semble craindre le froid ! Je suis déjà emmitouflée dans mon manteau alors que les locaux sortent encore en short et t-shirt.

Il y a aussi la manière qu'ont les Anglais de faire la queue, pour tout et n'importe quoi, leur surconsommation de plastique qui me choque toujours autant, l'organisation des rayons dans les grandes surfaces… Ce sont des petits détails que je ne remarque plus au quotidien (sauf cette histoire de plastique !), mais qui me sautent aux yeux quand je rentre en France. Pour le coup, j'ai l'impression que c'est la France qui est différente, et non l'Angleterre !

Dashbourne

Décrirais-tu la vie en Angleterre comme chère ?

C'est difficile à dire. Quand on travaille en Angleterre, on est payé en livre sterling et donc on ne réfléchit plus trop à la valeur des choses. J'avoue ne plus faire la conversion livre-euro à chaque fois que j'achète quelque chose et donc je ne me rends plus vraiment compte. Parmi les choses qui sont plus chères, on trouve les loyers et la nourriture en tête de liste. L'Angleterre doit importer beaucoup d'aliments, ce qui a un impact considérable sur les prix. Après, il suffit de s'organiser pour arriver à manger sans y laisser un rein. Les marchés par exemple, c'est un très bon endroit pour acheter fruits et légumes frais à moindre coût. Pour les loyers, quelle que soit la ville, c'est cher. Bien évidemment, tout dépend du quartier et de la rue où on souhaite s'installer, mais c'est hors de prix. C'est pour ça que la colocation est le moyen de logement le plus prisé d'ailleurs. Les transports sont assez onéreux également, mis à part les taxis qui, du coup, sont très prisés.

Par contre, tout ce qui est vêtements, livres et CDs, objets de la vie quotidienne, etc., je trouve tout ça bien moins cher ! Boire un verre ou sortir manger n'est pas très onéreux non plus. Les pubs sont les meilleurs endroits pour apprécier une sortie à moindre coût ! Je pense donc que la vie en Angleterre est aussi chère qu'en France, mais qu'on ne dépense pas de la même manière.

La cuisine anglaise n'est pas la plus réputée à travers le monde. Pourrais-tu casser quelques clichés ?

J'avoue que je ne suis pas très fan de la cuisine française, alors je ne suis probablement pas la mieux placée pour répondre à cette question. Étant végétarienne depuis des années, je n'ai jamais pris de plaisir à manger les plats français typiques. La nourriture anglaise peut parfois être surprenante, mais je ne comprends pas vraiment la vision qu'on en a, en tant que Français. Je pense que la mauvaise réputation de la cuisine anglaise est due à la simplicité des plats, tout simplement. Le repas de Noël par exemple, est un peu curieux : choux de Bruxelles et purée de pommes de terre accompagne la dinde farcie ! On est loin de nos repas de fête français, qui regorgent de plats sophistiqués !

En réalité, c'est la manière de se nourrir qui est différente, pas forcément la nourriture en elle-même. On ne s'assoit que très peu à table pour manger par exemple. Le matin, le petit-déjeuner est similaire à celui que l'on prend en France : des toasts beurrés ou avec de la confiture, des céréales.. Le breakfast si connu n'est pas quelque chose qui se mange au quotidien ! Du moins, pas chez tout le monde. Pour le déjeuner, il est vrai que les Anglais mangent sur le pouce, car les pauses-déjeuners sont vraiment courtes (20 à 30 minutes le plus souvent). Du coup, un sandwich fait souvent l'affaire. Et pour le dîner, c'est un peu comme ceux qu'on a en France. Néanmoins, il y a pas mal de plats "typiques" dont je raffole : l'English Breakfast et les Sunday Roasts, version végétariens par exemple. Les currys anglais aussi, sont vraiment bons ! Et le Cream Tea est un délice ! Une tasse de thé brûlant, accompagnée de scones sur lesquels on étale de la clotted cream et de la confiture de fraise. Un véritable plaisir gustatif ! Parmi les saveurs sucrées, le toffee, le Millionaire's Shortbread et le sticky toffee pudding sont vraiment trois desserts dont je ne pourrais pas me passer !

Dartmouth

Tu as pu voyager dans le pays, quelles sont les différences culturelles, historiques ou de paysages entre les différentes régions anglaises ?

La première différence, ce sont les accents ! C'est la première chose qu'on remarque quand on se déplace en Angleterre. Plus on va au nord, plus l'accent est difficile à comprendre tant il se rapproche de l'accent écossais, réputé très harsh. Dans le sud, l'accent est plus plat, moins teinté de nuances. En ce qui concerne les paysages, tout est vert, que ce soit au nord, au sud ou dans l'est. Et tout est plat ! Ici, pas de grands plateaux montagneux comme en France, tout est vraiment d'une platitude incroyable. Au mieux, c'est vallonné. L'Angleterre réserve également de très jolies surprises. En vacances dans le sud-ouest, une amie et moi étions tombées sur de magnifiques petites criques près de la ville de Dartmouth, avec une eau turquoise digne des décors de Pirates des Caraïbes ! L'histoire britannique a beaucoup marqué l'architecture des villes. Certaines villes ont été très marquées par la Révolution Industrielle du XVIIIe siècle, par exemple. Birmingham et Manchester sont de bons exemples avec leurs bâtisses en briques rouges. D'autres villes ont gardé les traces d'un passé bien plus ancien : York, Canterbury, Chester… Vieilles rues pavées, maisons à colombage, toits de chaume… C'est ça que j'aime en Angleterre : pour être dépaysé, il suffit d'aller jeter un œil dans la ville d'à-côté !

Quel climat règne en Angleterre depuis le Brexit? Comment réagissent les Anglais face à cela?

Tout dépend de la ville dans laquelle on vit. Je dois bien avouer que dans ma campagne stamfordienne, le Brexit n'a pas changé grand-chose à mon quotidien. Je ne me sens pas moins en sécurité, je n'ai pas subit d'attaques racistes ou autres. Mais dans les villes comme Birmingham, Manchester ou Newcastle, où les populations d'émigrés sont plus importantes, c'est différent. Le climat est beaucoup plus tendu, avec des attaques racistes qui fleurissent. Des attaques que les pro-Brexit justifient grâce au résultat du référendum, ce qui est navrant. On lit bien plus de faits divers concernant les attaques racistes dans les journaux. Mais tout le monde n'est pas comme ça. Il ne faut pas oublier les 49% de la population qui désiraient rester dans l'Union Européenne. Juste après les résultats, beaucoup de gens qui étaient contre le Brexit ont fait une demande pour obtenir la double nationalité anglo-irlandaise, histoire de garder un pied dans l'Union Européenne. En travaillant à l'école, j'ai remarqué que beaucoup étaient choqués que le Brexit l'ait remporté. Les enfants avec qui je travaille m'ont demandé comment ils allaient faire maintenant, pour partir étudier à l'étranger. Cependant, si les réactions à vif étaient vraiment fortes, l'été a un peu tassé toute cette histoire. On n'en parle plus tant que ça au quotidien. Il ne reste qu'une chose à faire : attendre de voir comment toute cette histoire va évoluer pour le pays, mais également pour les expatriés en Angleterre (et plus largement au Royaume-Uni). C'est un peu le problème majeur de toute cette histoire : les Britanniques ont voté, certes, mais sans savoir pour quoi. Personne ne sait ce qu'il va se passer pour le Royaume-Uni une fois que l'article 50 aura été révoqué.

Cottage alley

Quels conseils donnerais-tu à un(e) futur(e) expatrié(e) en Angleterre?

Je lui conseillerais de se renseigner sur la culture du pays. Bien que l'Angleterre ne soit pas si différente que ça, c'est quand même un autre pays. Il y a pas mal de petits détails qui sont différents, comme les règles de politesse, par exemple. J'avoue que je suis particulièrement agacée par les Français qui débarquent en Angleterre et trouvent à redire sur tout, sans prendre en compte la culture du pays. J'envisage l'expatriation comme la chose suivante : on débarque, donc on s'adapte. Et pas l'inverse ! Mais à part ça, je lui dirais également de ne pas se prendre la tête : s'expatrier en Angleterre n'est pas la chose la plus difficile, les démarches sont très accessibles. Le dernier conseil serait de ne pas trop fréquenter de Français : c'est quand même plus sympa de rencontrer des locaux plutôt que d'autres expats du même pays que le sien.

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