Coraline à Kyoto : « où qu'on aille on croisera toujours le chemin d'un temple ou d'un sanctuaire »

Interviews d'expatriés
Publié le 2014-05-02 à 00:00 par Expat.com team
Coraline vient du Var, dans le Sud-Est de la France. En août 2013, elle a posé ses valises à Kyoto avec un visa PVT. Elle travaille dans une boulangerie française et profite de son temps libre pour voyager dans la région...

Pourquoi as-tu choisi de t'installer à Kyoto ?

Je suis venue à Kyôto car mon ami devait faire ses études à l'université de Doshisha, pendant 1 an. Nous avons donc décidé de partir ensemble, et j'ai pris un visa working holiday. Nous avons aussi choisi Kyôto car culturellement, cette ville est extraordinaire. De plus, Kyôto est bien placée pour les voyages.

Comment s'est passée ton installation ?

Nous avons cherché, mon ami et moi, un appartement dans un premier temps, mais cela s'avérait difficile. Nous avons contacté la société Leopalace21 qui est très avantageuse et très professionnelle, mais les seuls appartements disponibles étaient non meublés. Du coup, nous avons cherché un homestay, et nous avons trouvé quelque chose de peu cher dans le sud de Kyôto. Si nous payions 6 mois d'un coup, cela nous revenait à environ 450 euros par mois, et nous avons donc envoyé l'argent. En arrivant, la propriétaire des lieux nous attendait. Finalement, c'était plus une share house qu'un homestay, mais nous y avons passé de bons moments. Pour les 6 mois restant, nous avons cherché sur place.
Nous avons ensuite commencé les démarches administratives à savoir : la Resident Card (qui fait office de carte d'identité au Japon), nous sommes allés chercher une mairie d'arrondissement proche de notre logement (sous les conseils de notre propriétaire) et en une heure nous avions inscrit notre adresse sur la carte. Après cela, nous sommes allés ouvrir un compte en banque. Cela a été plus compliqué, nous avons dû faire un Inkan à notre nom (tampon japonais qui fait office de signature) avant de pouvoir ouvrir notre compte, et une semaine après nous recevions notre carte de retrait et nous pouvions effectuer des virements bancaires.
Enfin, nous sommes allés chercher notre téléphone chez Softbank, nous avons demandé, sur les conseils d'amis et de personnes sur les blogs, un « prepaid phone ». Nous avons donc payé notre téléphone et la batterie ainsi qu'une charge pour 2 mois.

Tu as opté pour un visa PVT : quelles sont les démarches que tu as du accomplir et quels sont les avantages de ce visa ?

Pour obtenir le PVT, il faut remplir certains critères simples (avoir moins de 30 ans, ne pas être accompagné d'un enfant, ne pas déjà avoir utilisé le PVT au Japon, être en bonne santé). Si tout cela est bon, il faut ensuite créer un dossier à l'aide des documents fournis par le site de l'ambassade du Japon en France, à savoir : le passeport et des photocopies ; un formulaire de demande de visa ; une photo d'identité ; un justificatif financier (en 2013, il fallait avoir 4,500? sur le compte, ou bien 3 100 euros plus un billet d'avion à présenter) ; un curriculum vitae ainsi qu'une lettre de motivation ; un certificat médical ainsi qu'un programme de séjour (avec noté les logements prévus, les boulots que l'on compte faire et l'argent que l'on compte gagner, les endroits où l'on compte aller...).
L'avantage de ce visa, c'est clairement que l'on peut travailler. Bien sûr, on doit faire un travail à temps partiel (le temps plein est interdit), mais une fois sur place les patrons engagent parfois à temps plein (c'est mon cas par exemple). Cela permet à la fois de voyager, mais aussi de financer son voyage en travaillant de temps en temps à droite à gauche. Car avec seulement 4 500 euros (et c'est pourtant une somme conséquente), on ne peut pas s'en sortir une année entière si l'on veut voyager.

Comment as-tu procédé pour trouver un travail à Kyoto ?

En ce qui concerne la recherche d'emploi, il me fallait absolument un téléphone car à chaque fois je me faisais rejeter sous prétexte que, justement, je n'avais pas de téléphone. J'ai long-temps cherché seule, arpenté des heures et des heures les divers sites d'offres d'emploi en anglais et même en japonais, je me suis inscrite à des sites de babysitting et de cours de français... Finalement, j'ai obtenu une réponse positive pour un entretien de la part d'un restaurant français tenu par un français. Il m'a embauchée, mais hélas cela ne me suffisait pas car ce n'était que des week-end de temps en temps. J'ai donc cherché autre chose et je me suis donc tournée vers Hello Work (l'équivalent de notre Pôle Emploi en France, en bien mieux). Après quelques démarches avec eux, ils ont cherché pour moi des postes correspondant à mon profil et à ce que je recherchais. J'ai donc obtenu un entretien avec les patrons d'une boulangerie qui ouvrait bientôt sur Kyôto, et celui-ci fut positif. J'ai finalement quitté le restaurant et je me consacre désormais à ce travail à la boulangerie, en tant que vendeuse.

As-tu eu des difficultés d'adaptation (barrière de la langue, coutumes) ?

Je parlais déjà la langue, donc cela a été plus facile pour moi, mais cela n'a pas été simple tout de même. De même, j'étais déjà partie 3 mois dans le cadre d'un échange universitaire, donc je connaissais déjà quelque peu le pays. Je dirais donc que non, je n'ai pas eu de difficulté d'adaptation et que, au contraire, grâce au fait que je parle, les Japonais m'ont très bien accueillie et j'ai souvent reçu des faveurs incroyables de leur part.

Qu'est-ce qui t'a le plus surpris à Kyoto ?

Je dirais la ville en elle-même. J'étais en réalité déjà venue une journée sur Kyôto mais sans vraiment visiter. Une fois habitant là-bas, je me suis rendue compte combien c'était grand comparé à ce que j'imaginais (car on dit toujours que Kyôto est une petite ville comparé à Ôsaka et Tôkyô, et c'est vrai mais cela reste une grande ville tout de même). Je m'attendais donc à une ville entièrement dans le style traditionnel peut-être, et toutes ces voitures, tous ces bâtiments assez moches à certains endroits, toutes ces allées avec tous ces fils électriques... Cela m'a surpris, car je cherchais les temples et les sanctuaires. Mais avec le temps, j'ai appris à comprendre la ville et son fonctionnement et à m'y faire, et finalement, il suffit d'ouvrir les yeux et de ne pas se focaliser sur ce côté moderne de la ville pour se plonger dans la tradition.

Les Japonais sont-ils accueillants ? Est-il facile de s'intégrer et de faire de nouvelles connaissances ?

Les Japonais sont extrêmement accueillants. Où que j'aille, il me suffit d'avoir une carte en main pour qu'on m'aborde avec un anglais hésitant et pas très bien maîtrisé pour m'aider. Et quand on voit que je parle japonais, c'est tout de suite «l'extase» pour eux, ils s'exclament, semblent heureux... Ils sont toujours là pour aider, pour offrir (du sake, des chips, un porte-clés, une grand-mère qui vendait ses petits porte-monnaie le long du chemin des philosophes m'en a même offert un pour ma maman, qu'elle a fabriqué à base de vieilles ceintures de kimono). Par contre, c'est toujours bref, histoire d'un instant, d'une discussion. Par contre, les Japonais adorent me voir au travail dans la boulangerie. Ils ne le disent pas forcément (quoi que certains aiment me parler, me dire qu'ils sont allés à Paris et au mont St Michel, ou que leur fille ou leur filleul y est pour l'année...), mais lorsque je suis partie en voyage mes collègues m'ont dit que les Japonais demandaient où j'étais passée.
Sinon je n'ai jamais réussi à avoir de vraie relation avec des Japonais durant ces 7 mois à Kyôto. Bien sûr je m'entends extrêmement bien avec mes collègues de travail, mais cela en reste là et ça ne va pas beaucoup plus loin. Parfois, j'arrive à inviter une de mes collègues avec qui je m'entends vraiment très bien et que j'apprécie beaucoup, mais cela reste difficile.
Les seuls Japonais avec qui je me suis très bien intégrée, c'est le couple qui m'a accueilli pendant un mois en WWOOF à Hokkaidô. Comme ils ont l'habitude de recevoir des étrangers, ils sont très ouverts et adorent les européens.

Peux-tu partager avec nous un trait caractéristique de Kyoto qui te plaît particulière-ment ainsi qu'un aspect négatif ?

Ce que j'adore dans Kyôto, c'est que où qu'on aille on croisera toujours le chemin d'un temple ou d'un sanctuaire, et que même si cela fait 5 fois que l'on passe devant, je ne cesse d'être surprise. Je n'aime pas énormément les grandes villes, mais dans Kyôto il me suffit de prendre le vélo et d'aller dans un grand sanctuaire ou un complexe de temples pour me reposer dans les jardins, au calme. Je m'amuse aussi, dans mes sanctuaires préférés, à y aller à toutes les saisons pour voir les changements de la nature opérer : par exemple au Himukai Daijingu (à Keage), j'y suis allée en fin d'été pour la première fois, puis en automne au moment des fleurs d'érable qui se colorent, puis en hiver sous la neige, et enfin sous les cerisiers en fleurs. De plus, un autre aspect très positif pour moi, c'est que Kyôto est entourée de montagnes, et moi qui adore la forêt, les randonnées, il me suffit de prendre le vélo ou les transports en commun pour me retrouver au départ d'un sentier de randonnée et pour m'évader le temps d'une journée.
L'aspect négatif, ben je dirais que quand on n'a pas d'amis japonais, on ne peut pas profiter d'aller dans les karaoké, les bars, dans les soirées animées, ou même tout simplement d'aller admirer les cerisiers en fleurs dans les parcs ou le long de la rivière avec un bentô, et Kyôto reste, à mon sens, une ville où les gens semblent un peu fermés (contrairement à Ôsaka par exemple), et donc il est important d'arriver à se faire des amis étrangers aussi si l'on ne veut pas passer l'année seul.

Une idée reçue sur le Japon qui s'est avérée totalement fausse :

Rien ne me vient vraiment à l'esprit. Car les idées reçues ne concernent pas tous les Japonais et tout le pays, cela peut être vrai pour une petite partie de la population mais nous sembler important une fois sur place (comme pour les jeunes qui lisent les mangas). Je dirai peut-être l'idée que les Japonais mangent tous et que des sushi. Cela est faux : les sushi, c'est loin d'être le repas de base, c'est plutôt un plaisir qu'ils vont se faire de temps en temps. En France, souvent quand on dit qu'on va au restaurant japonais, on va manger des sushi (attention, ne faisons pas de généralisation non plus). Ici, c'est des nouilles, des takoyaki, des okonomiyaki, des bentô surtout aussi, des udon, des soba, des donburi... Et j'en passe. La cuisine japonaise est très variée.

Qu'est-ce qui te manque le plus par rapport à la France, ton pays d'origine ?

Clairement, la nourriture. J'adore la nourriture japonaise pourtant, sous toutes les coutures (sushi, takoyaki, nattô...), mais le fromage, la baguette que l'on achète tous les jours, les friandises sucrées et au chocolat, les crêperies et autres petits restaurants où l'on va entre amis... Ça me manque.

A quoi ressemble ton quotidien d'expatriée ?

Mon quotidien d'expatrié, c'est travail et voyage. Je travaille quelques semaines ou quelques mois, puis je prends des semaines de vacances (non payées bien sûr). Mes patrons japonais ont accepté (et me l'ont proposé d'eux-mêmes) que je parte et que je revienne ensuite. Dès que mon ami a des vacances, on part voyager. Et je pars aussi, en dehors de ses vacances, faire du wwoofing.

Tu voyages régulièrement : quels sont les pays que tu as déjà visités ?

J'ai beaucoup voyagé sur du court terme. L'Italie bien sûr (puisque j'habite juste à côté), l'Angleterre dans ma jeunesse, je suis partie aux États-Unis deux fois dans l'ouest et une fois à New-York, au Québec, je suis aussi partie au Chili et 2 fois au Japon.

Quels conseils peux-tu donner à ceux qui veulent s'installer à Kyoto ?

Si vous aimez la culture japonaise, les sanctuaires, les temples, la tradition... Foncez ! N'hésitez pas à demander conseils autour de vous, à fouiller les blogs, à poser vos questions sur les forums pour chercher tout ce qui est logements par exemple. Et puis, ne rejetez pas les autres français ou étrangers une fois sur place, parfois c'est important de se faire des relations.
Par contre, si vous êtes plutôt du genre geek, otaku, à aimer faire la fête, sortir en boîte dans les bars ou aller faire des karaoké, Kyôto c'est sympa, mais pas pour longtemps. Je pense que Ôsaka et Tôkyô sont bien plus propices à ce genre de sorties. Kyôto est vraiment une ville culturelle.

Quels sont tes projets pour les années à venir ?

Je n'ai aucunement l'intention de rester au Japon, je rentrerai en France à la fin de mon visa pour reprendre mon ancien travail là-bas. Je reviendrai volontiers en tant que touriste, mais je n'y vivrai jamais. J'aime voyager, donc je pense voyager encore dans d'autres pays même si le Japon reste un de mes coups de c?ur. Mais pour moi, la France est clairement le pays où je veux vivre.

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